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En Corse, les entreprises ont retrouvé leur niveau d'activité d'avant-covid


Naël Makhzoum le Vendredi 17 Février 2023 à 16:20

Comme chaque année, la Banque de France a sondé les chefs d'entreprises insulaires pour dresser un bilan de leur activité sur l'année écoulée et se projeter sur 2023. Si le secteur de la construction a plus de mal, l'industrie et les services marchands se portent très bien.



Jean-Luc Chaussivert, directeur régional de la Banque de France en Corse, au côté de Matthieu Bussière, directeur des études monétaires et financières au siège.
Jean-Luc Chaussivert, directeur régional de la Banque de France en Corse, au côté de Matthieu Bussière, directeur des études monétaires et financières au siège.
Avec surprise, le bilan de l'année écoulée n'est pas mauvais. Même plutôt positif pour les entreprises corses. Comme tous les ans, la branche insulaire de la Banque de France a sondé un panel de chefs d'entreprise courant janvier pour déterminer leur état de santé. Au total, l'étude englobe 19 900 salariés répartis en 750 entreprises qui produisent 3,4 milliards d'euros de chiffre d'affaires. Et ce, dans trois grands secteurs : l'industrie, le BTP et les services marchands.

"La Corse a eu des performances inattendues par rapport à ce que les chefs d'entreprise prévoyaient en début d'année, alors même qu'on ne connaissait pas encore la guerre en Ukraine, se réjouit Jean-Luc Chaussivert, directeur régional de la Banque de France en Corse. On retrouve un niveau d'activité d'avant-crise covid et c'est une belle surprise, qui se confirme par l'évolution de l'effectif salarié dans ces trois secteurs."

Une Corse résiliente malgré un contexte difficile et deux difficultés majeures rencontrées dans l'approvisionnement et surtout, le recrutement. Et ce, après une année 2021 de rattrapage, où tous ces secteurs enregistraient une hausse de plus de 11% liée à un rebond post-covid.

Industrie

L'activité industrielle a augmenté de 6,3% sur l'année 2022, contre 10% à l'échelle nationale. Pas forcément négatif, sachant que l'industrie n'est pas la source principale d'activité de l'île. Les effectifs, eux, sont en hausse de 4,2%. "C'est assez surprenant si on regarde tout ce qu'a impliqué la guerre en Ukraine, avoue Jean-Luc Chaussivert. D'autant plus que les chefs d'entreprise avaient anticipé une augmentation de seulement 4,9%, avant même qu'ils n'aient connaissance de la guerre."

Un effet prix ? Sûrement une des raisons qui explique cette forte résilience. D'autant que "s'il y a augmentation d'effectif, c'est qu'il y a augmentation du volume", rappelle le directeur régional de la Banque de France.

Autre surprise de taille : une nouvelle hausse de 2,4% de l'activité est encore prévue pour l'année à venir. Un fait assez rare, au sortir de deux "bonnes années" - au sens purement statistique, car l'année à été mouvementée - qui devraient logiquement déboucher sur un plateau, une stabilisation de l'activité.

Construction

Le BTP est celui qui atteint justement ce plateau avant les autres. Si l'évolution de l'activité est en hausse de 5,1% en 2022 (+2,7% d'effectifs), elle ne représente pas forcément la situation actuellement traversée par la filière. "C'est un secteur tiré par des travaux publics liés aux routes et réseaux, et beaucoup de travaux énergétiques dans le second œuvre, détaille Jean-Luc Chaussivert. Mais il ne faut pas s'y méprendre, ces chiffres correspondent beaucoup plus à un allongement de la dynamique de 2021. En 2022, l'activité a connu un vrai ralentissement des prises de commandes."

D'où, logiquement, des perspectives beaucoup plus pessimistes pour 2023. Une baisse de 1,4% de l'activité est attendue, "mais on n’est pas dans l'effondrement, tempère le directeur, observant une stabilité prévisionnelle des effectifs. Les chefs d'entreprise doivent se dire : "même si mon volume baisse un peu, je ne vais pas me séparer de mes effectifs". C'est trop précieux, trop difficile à retrouver sur le marché s'il y a un chantier." 

Services marchands

Les services marchands sont, comme souvent en Corse, les bons élèves de ce bilan. L'activité a connu une hausse de 8,2%, contre 4,2% initialement prévus. "Avoir une telle différence entre ces deux chiffres est exceptionnel, assure Jean-Luc Chaussivert. On peut probablement l'expliquer par le fait que les touristes sont venus massivement en Corse, car c'est une destination en France qui offre le panorama d'une île sans les inconvénients. Notamment du coût des transports, car partir loin coûte plus cher."

Ni les manifestations ni la hausse des incendies criminels qu'a vécus l'île ne semblent donc avoir impacté négativement le secteur. Les effectifs aussi ont augmenté de 3,6%, "et il y avait même encore de la demande qui aurait pu améliorer cette activité", révèle le directeur régional. Une stabilité est donc logiquement attendue pour l'an prochain dans cette activité. 

Le problème du moteur de l'économie régionale est aujourd'hui de ne pas réussir à recruter. Notamment du fait des difficultés liées au logement ou au transport. Et si des efforts sont faits concernant les salaires et les conditions de travail, la pénurie de main-d'œuvre est un problème difficile à résoudre. "Certains chefs d'entreprise ont donc commencé les recrutements de leurs saisonniers plus tôt que d'habitude pour essayer de capter la main-d'œuvre", explique Jean-Luc Chaussivert.

Pour cause, juste derrière la Bretagne, la Corse est la deuxième région de France au taux de chômage le plus bas.