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En Corse, le retour de la fièvre catarrhale ovine fait trembler les éleveurs


Jeanne Leboulleux-Leonardi le Samedi 7 Octobre 2023 à 12:38

Un premier cas de fièvre catarrhale ovine – la fameuse Bluetongue, puisque les bêtes qui en sont victimes présentent une langue bleue – vient d’être détecté à l’extrême sud de la Corse. Même si nous sommes en fin de saison chaude, le danger pour l’élevage ne doit pas être sous- estimé selon Joseph Colombani, Président de la Chambre d’Agriculture de Haute-Corse qui explique pour CNI les enjeux et les mesures qu’il est souhaitable de prendre.



Photo NM - CNI
Photo NM - CNI
- Joseph Colombani, pouvez-vous nous dire en quelques mots ce qui se passe ?
- Des brebis présentant les symptômes de la fièvre catarrhale ont été repérées à Figari. C’est somme toute assez banal : avec un été qui se prolonge, ça arrive. Car c’est une maladie qui est transmise par la piqûre d’un moucheron du genre “culicoïde” qui transporte le virus d’une bête à une autre. Et la chaleur et l’humidité rendent ce moucheron très actif. Aucune incidence sur l’homme – pas même au travers du lait ou de la viande. Mais elle provoque des morts et des avortements chez les animaux touchés.

- C’est nouveau en Corse ?
La maladie est arrivée en Corse il y a environ vingt ans. Avant, elle était cantonnée dans le nord de l’Afrique. C’est une conséquence du réchauffement climatique… Tous les deux ou trois ans, nous connaissons une épizootie. Et de façon classique, ça commence par l’extrême sud de l’île.

- Présente-t-elle des particularités cette année ?
Oui. En fait, il existe 27 sérotypes de ce virus. Jusque-là, nous étions principalement concernés par les sérotypes 1 et 4. Mais ici, il s’agit du 8. Même contagiosité, même mortalité que les deux autres. Mais par contre, si les animaux ont été vaccinés contre les sérotypes 1 et 4, leur vaccin sera moins efficace contre le sérotype 8. Quels sont les moyens de lutter contre cette maladie ? La vaccination est le seul moyen de lutte. Mais elle n’est pas obligatoire. En fait, la FCO [NdlR : Fièvre Catarrhale Ovine] est une maladie à déclaration obligatoire, mais, en Corse, elle n’est plus à gestion obligatoire. Cela veut dire que la vaccination n’est pas prise en charge par l’État. Or, lorsque l’on doit vacciner 200-300 brebis, voire plus, entre le vétérinaire et le coût du produit, ça représente une dépense importante pour les éleveurs. Et dans ce cas de figure, encore faut-il trouver un vaccin pour le sérotype 8 : pas sûr qu’il soit disponible immédiatement, ni dans les quantités suffisantes ! D’autre part, les éleveurs sont un peu réticents à vacciner leurs animaux, notamment au cours des mois de septembre, octobre et novembre qui correspondent à la période de mise-bas. Car entre les manipulations nécessaires pour la vaccination et le produit… Faire vacciner les animaux risque donc d’être délicat.

- N’existe-t-il pas un autre moyen de lutte ?
- En fait, si, mais j’insiste, cette technique est beaucoup moins efficace que le vaccin. Le moucheron vecteur de la maladie est sensible à un produit désinfectant : la Versatrine. Ce produit fait un rempart d’une dizaine à une quinzaine de jours qui empêche le moucheron de piquer. Nous conseillons donc vivement aux éleveurs qui ont ce produit dans leurs armoires de faire un traitement préventif immédiatement, sans attendre. Quant à ceux qui n’en ont pas, nous leur conseillons, s’ils en ont les moyens, d’en acheter et de faire également le traitement.

- Ce traitement va avoir un coût également pour les éleveurs. Vous prévoyez quelque chose ?
La Chambre d’Agriculture va effectuer des démarches auprès de l’ODARC pour voir s’il est possible de débloquer une aide sanitaire exceptionnelle afin de soutenir cette opération de désinfection. Cela, afin d’éviter la propagation de la maladie, et donc les pertes en cheptel et en lait… avec les conséquences financières correspondantes. Mais je le répète, la technique la plus efficace, c’est la vaccination.