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Déserts médicaux en Corse : De nouveaux arrêtés de zonage pour mieux « lutter contre les disparités géographiques »


le Dimanche 14 Mai 2023 à 18:43

L'ARS de Corse a publié il y a quelques jours les nouvelles zones d'installation possible pour les médecins et infirmiers libéraux. En vigueur depuis le 1er mai dernier, ce zonage ouvre notamment droit à des aides pour les médecins libéraux dans les territoires considérés comme fragiles, qui représentent une grande majorité de l'île.



(Photo d'illustration)
(Photo d'illustration)
Il y a quelques jours, l’Agence Régionale de Santé de Corse (ARS) a publié les nouveaux arrêtés de zonage pour les médecins et infirmiers libéraux applicables depuis le 1er mai dernier, dont l’objectif est de « rééquilibrer l’offre de soins sur le territoire et de lutter contre les disparités géographiques ». Établies en moyenne tous les trois ans, ces cartographies permettent en effet d’identifier des zones géographiques caractérisées par une offre de santé insuffisante ou par des difficultés dans l’accès aux soins. Elles viennent ainsi délimiter les zones d’installation possibles pour les nouveaux professionnels, en prenant en compte une meilleure répartition géographique et leur en donnant accès à des aides  dans les zones où l’offre est insuffisante. Afin de réaliser ce travail, l’ARS a opéré une large concertation avec les représentants des professionnels de santé (ordre et URPS), l’Assurance Maladie, la Collectivité de Corse et la commission spécialisée de l’offre de soins, émanation de la conférence régionale de la santé et de l’autonomie (CRSA).
 
Au niveau des médecins libéraux tout d’abord, l’ARS note que « la Corse fait face depuis plusieurs années à une diminution du nombre (de professionnels), conséquence d’une pyramide des âges défavorable avec de nombreux départs en retraite et une faible installation de nouveaux médecins même si le solde est légèrement positif en 2022 ». Afin de lutter contre ce phénomène, des zones « caractérisées par une offre médicale insuffisante ou par des difficultés dans l’accès aux soins », où « les médecins seront soutenus par des aides financières ou matérielles pour l’installation et le maintien »* ont été déterminées.

Pour définir ce zonage, l’ARS indique que « la méthodologie nationale repose principalement sur l’indicateur d’« Accessibilité Potentielle localisée (APL) » qui est calculé chaque année par la DREES (direction de la Recherche, des Études, de l'Évaluation et des Statistiques du Ministère de la santé et de la prévention), en considérant notamment l'activité par praticien (nombre de consultations ou visites effectuées dans l'année), le temps d'accès au praticien et la consommation de soins par classe d'âge ». « L’ARS Corse, en concertation avec l’ensemble des acteurs, a fait le choix d’affiner cette méthodologie avec l’appui de la Fédération Corse de la Coordination et l'Innovation en Santé (FCCIS) pour mieux prendre en compte les spécificités régionales ou locales et, in fine, augmenter le nombre de territoires éligibles aux aides », ajoute-t-elle dans un communiqué. « Depuis son élaboration, nous n’avons eu de cesse de critiquer la méthodologie des zonages des médecins, outil qui conditionne le niveau des aides octroyées à l’installation. Progressivement, de nouveaux modes de calcul (comme l’APL) ont été mis en œuvre, de nouveaux critères introduits. Aujourd’hui, bien que nécessairement imparfait, le zonage n’obéit plus strictement à la logique comptable et purement mathématique des débuts », commente pour sa part Le Dr Antoine Grisoni, médecin généraliste et président de l’URPS Médecins Libéraux de Corse.

À l'exception d'Ajaccio et Bastia, l'ensemble des territoires de l'île considérés comme des "zones fragiles"

Le zonage des médecins libéraux en vigueur depuis le 1er mai (Cartographie ARS)
Le zonage des médecins libéraux en vigueur depuis le 1er mai (Cartographie ARS)
Au résultat, les micros-régions de l’île ont été classées selon trois catégories. En premier lieu, les zones d’intervention prioritaires (ZIP) situées dans une large partie centrale de l’île allant de la pointe du Cap Corse au Sartenais Valinco, en passant par le Nebbiu, le Centre Corse, le Fiumorbu, jusqu’à l’Alta Rocca. Ces zones sont définies comme étant les territoires « les plus fragiles dans lesquels les médecins éligibles peuvent bénéficier de toutes les aides au maintien et à l’installation » (en rouge sur la carte ci-dessus). En dehors des aires ajaccienne et bastiaise, considérées comme des zones hors vivier « caractérisées par une offre de soins considérée comme satisfaisante », le reste de l’île (en orange) est par ailleurs classé en zones d’action complémentaires (ZAC). « Il s’agit de zones fragiles mais à un niveau moins important que les ZIP. Dans ces zones, les médecins éligibles peuvent bénéficier de toutes les aides au maintien et à l’installation à l’exception des aides conventionnelles et des exonérations fiscales », précise l’ARS. 
 
« On voit que tous les territoires vont pouvoir bénéficier de soutiens hormis Ajaccio et Bastia. On peut se poser la question pour ces deux villes dont la situation en matière de déserts n’est pas forcément plus favorable qu’ailleurs mais, à tort ou à raison, on peut supposer qu’en l’absence de réponse libérale de ville, au moins pour les soins dits non programmés, les patients « citadins » peuvent recourir aux établissements de santé, publics et privés de proximité. On le sait, au vu de l’état de ces structures, ça n’est pas forcément le plus adapté, mais pour le moment, nous n’avons pas mieux car les moyens ne sont pas extensibles et doivent être priorisés au bénéfice des zones les plus en danger », analyse le Dr Antoine Grisoni. « Concernant ce travail, notre vigilance reste constante, car les difficultés que représentent la carence en spécialistes, l’âge et le temps de travail effectif de certaines consœurs et confrères et la nécessité impérative d’une mise à jour beaucoup plus fréquente qu’actuellement, nous l’imposent », reprend-il. Il note par ailleurs que les aides sont « encore trop nombreuses et parfois illisibles ». 

« Nous plaidons pour une simplification et une mutualisation ARS, CPAM et région : il faut bien le dire, nous attendons toujours de ce point de vue le choc de simplification administrative. Mais les aides financières ne font pas tout, loin de là. Le plus important peut-être, est de faciliter la qualité de vie au travail, qui consolide l’existant et est facteur d’attractivité pour le futur », souligne-t-il encore, en concédant que « ce zonage reste un outil de plus en plus utile qui peut servir de ligne directrice à nos actions ». 

La Corse sur-dotée en infirmiers libéraux

Enfin, du côté les infirmiers libéraux, « avec l’accord des représentants de la profession infirmière et après consultation de la CRSA », l’ARS Corse informer avoir également arrêté un nouveau zonage applicable à compter du 1ermai qui établit que « tous les territoires de Corse apparaissent comme des zones sur-dotées dans lesquelles la régulation des installations est applicable ». « Dans ces zones, l’accès à au conventionnement, et donc à l’installation d’un nouvel infirmier, ne peut être accordé qu’au seul successeur de l’infirmier cessant définitivement son activité », précise le communiqué. Dans ce droit fil, le 10 mai, la directrice générale de l’ARS a d’ailleurs annoncé la mise en œuvre de mesures contraignantes dont le verrouillage de toute nouvelle installation d’un infirmier libéral.
 
 
 
 
L’ensemble des aides à l’installation sont à retrouver sur le Portail d’Accompagnement des Professionnels de Santé (PAPS) sur www.corse.paps.sante.fr