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DSP aérienne : Pour le PNC, "Air Corsica a vocation à voler dans tout l’espace aérien européen"


Patrice Paquier Lorenzi le Mardi 28 Novembre 2023 à 18:47

A deux jours d’une session qui s’annonce mouvementée à l’Assemblée de Corse, notamment concernant l’attribution prochaine de la future DSP aérienne, les membres du « Partitu di A Nazione Corsa » ont tenu une conférence de presse à Corti. Saveriu Luciani, un des leaders du PNC, a notamment dénoncé « l’impréparation de la Majorité Territoriale » concernant la gestion de l’attribution de la future DSP aérienne de la Corse pour la période 2024-2027. Mais, il a également apporté un soutien sans équivoque à la compagnie régionale, en annonçant son soutien lors du rapport, qui sera soumis au vote de l'Assemblée.



Le PNC a tenu une conférence de presse avant le débat et le vote de la DSP aérienne, qui se tiendra jeudi à l'Assemblée de Corse. (credit photo Magali Gozzi)
Le PNC a tenu une conférence de presse avant le débat et le vote de la DSP aérienne, qui se tiendra jeudi à l'Assemblée de Corse. (credit photo Magali Gozzi)
- Un rapport sur la future DSP aérienne va être présenté à la session de jeudi, mais le climat général semble vous inquiéter...
- Nous sommes inquiets en effet. Aujourd’hui, il y avait une manifestation des lycéens agricoles à Borgo. Nous nous sommes rendus à Vivariu pour apporter notre soutien aux agriculteurs touchés par la fièvre catarrhale. Lors de la dernière session, la majorité des transporteurs scolaires sont venus avec une quarantaine de cars pour signifier leur mécontentement. Jeudi et vendredi, il va y avoir des centaines de salariés d’Air Corsica et d’Air France devant les grilles de l’Assemblée. Nous nous retrouvons devant un climat d’inquiétude généralisé et qui n'est pas propice à la sérénité. Nous avons l’impression de revivre les mêmes erreurs qui ont conduit à ce que l’on a connu dans la DSP maritime.
 
- Vous critiquez sévèrement la Majorité territoriale dans la gestion de cet épineux dossier. Que leur reprochez-vous ?
- Encore une fois, l’Exécutif a manqué d’anticipation et nous arrivons aujourd’hui à un degré d’impréparation mortifère. Avec cette gestion tardive des dossiers, nous nous retrouvons à chaque fois sous une pression sociale écrasante. L’échec caractérise aussi la stratégie du Conseil Exécutif dans la gestion des contrats de DSP. Comme nous l’avions déjà pointée fin 2022, à l’occasion de l’attribution de la DSP maritime, avec un montant total de 106,6M€, la marge de manœuvre financière pour la négociation des contrats dans l’aérien restait et reste très maigre. Dans ce contexte sur lequel plane un manque d’anticipation flagrant, la stratégie proposée sur l’aérien consiste à scinder la décision ; si elle permet ainsi de valider l’attribution des lots sur le bord à bord (pour un montant de 56,5M€), elle inspire notre inquiétude et nos craintes quant à l’attribution des lots sur le Paris Orly. Il ne restera en clair que 20M€ pour négocier 4 lots qui représentent actuellement 43,5M€ et dont le périmètre a été élargi. Figer les positions sur le bord à bord ne permettra pas d’envisager une renégociation de ces montants et obligera donc de conditionner l’attribution des lots vers Paris Orly à deux options de financement : Soit l’obtention dans le courant du premier trimestre 2024 d’une manne financière étatique qui couvrirait les contrats sur l’intégralité de la période, soit jusqu’en 2027, soit la perspective d’un financement en fonds propres par la Collectivité de Corse, ce dont nous doutons fortement…
 
- Une rallonge de 40 millions d’euros a toutefois été accordée in fine, concernant l'enveloppe de continuité territoriale...
- En effet, grâce à l’action du groupe Liot. Voilà à quoi tient l’attribution de la future DSP. On est sur un fil. De plus, cette rallonge ne concerne qu’un seul exercice, mais après on fait quoi ? Sauf qu’on sait depuis juin 2021, que nous allions arriver à cette situation de blocage. Il aurait fallu aller au rapport de force avec l’État. Parce que nous voyons beaucoup plus loin. Qu’en sera-t-il en 2027 ? Les conditions politiques auront sûrement changé d’ici là. Il y aura de nouvelles compétences. Comment va-t-on organiser cette nouvelle DSP avec une dette de plus d’un milliard d’euros et un nouveau risque de contentieux avec Volotea, comme nous avons pu le connaître avec la Corsica Ferries.
 
- Malgré tout, allez-vous voter le rapport de l’Exécutif préconisant l’attribution de la DSP concernant les lignes de bord à bord à Air Corsica ?
- En tant que patriote et nationaliste corse, nous sommes attachés aux compagnies historiques que sont Air Corsica et Air France. Bien évidemment, et sans surprise, ils pourront compter sur nos voix. On votera ce rapport. Air Corsica sait faire et bien faire son boulot. L’attribution des lignes de bord à bord ne souffre d’aucune contestation. L’opérateur historique a toujours donné au fil du temps entière satisfaction, bénéficie d’un savoir-faire indéniable, et a su réaliser l’effort financier nécessaire sur les lots où ils étaient mis en concurrence par Volotea. Mais nous interpellons aujourd’hui l’Exécutif afin de ne pas se tromper de débat. Jeudi, il faut qu’on parle des vraies problématiques. Nous ne pouvons plus arriver à ces situations de blocage. La Majorité doit changer sa stratégie de gouvernance en ayant une position plus militante. Nous aurions pu voter et clôturer le dossier de la DSP en un rapport. Là, il va falloir revoter fin mars concernant les lignes de Paris-Orly si l’on choisit le parler vrai, le risque existe de voir la destination Paris disparaître de ce giron à l’horizon des fins de contrats 2024-2027. Autant le dire et prévenir : en l’état, sauf avis contraire et au regard du désengagement déjà opéré par ailleurs, l’opérateur historique Air France ne sera très probablement plus de la partie à ce moment-là. Or nous avons l’impérieux devoir de sécuriser sur le long terme ce pour quoi nous nous sommes toujours battus, un service public corse. 
 
- Vous demandez aussi aux compagnies historiques de changer de modèle économique…
- Air Corsica doit voler partout en Europe, elle a vocation à voler dans tout l’espace aérien européen. Elle le fait déjà, mais elle doit maintenant avoir les moyens de ses ambitions. Il faut une politique beaucoup plus ambitieuse. Il faut qu’elle sorte de cette image de compagnie régionale pour devenir une véritable compagnie aérienne européenne.  Il faut aussi se poser la question de la gouvernance et de l’apport de notre compagnie aérienne au développement économique de notre île. Car au-delà des centaines de familles concernées au premier chef, c’est de l’avenir de ce pays qu’il s’agit, et Air Corsica doit y prendre toute sa place. Quant à Air France, elle doit clairement réaffirmer sa volonté de rester implantée sur la Corse par le biais de la ligne Paris-Orly et de poursuivre son action comme partenaire historique. Tous les observateurs ont constaté que l’entreprise a effectivement fait le choix stratégique de se retirer de l’aéroport de Paris Orly. Les inquiétudes sociales vont donc vers les personnels d’Air France affectés aux lignes de DSP entre la Corse et Paris Orly et basées en Corse. Les assurances d’aujourd’hui tiendront-elles longtemps ? Ici encore, comment qualifier le manque crucial d’anticipation du Conseil exécutif ? Doit-on éternellement rendre la Corse otage de l’incertitude ou de la providence d’un vote du budget au Palais Bourbon ?