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DOSSIER. En Corse, "équiper les professionnels d'outils pour repérer précocement les victimes est une priorité"


Naël Makhzoum le Dimanche 9 Octobre 2022 à 20:15

La première édition de l'Agora de la santé qui se tient du 4 au 15 octobre à travers l'île marque une volonté importante : celle de ne plus ignorer les violences en Corse, mais de les affronter. Organisé par l'agence régionale de santé de Corse (ARS) avec de nombreux partenaires, cet événement inédit souhaite aborder de manière globale et directe le phénomène qui se traduit de plusieurs manières et qui ne se limite pas aux violences conjugales, sexistes et sexuelles. Ainsi, la maltraitance institutionnelle, les violences intrafamiliales ou envers les enfants sont parmi les thèmes évoqués à l'occasion des trois jours de colloque ajaccien.
Et alors que l'objectif premier de ce rassemblement d'acteurs du social, de la santé, de la justice, des institutions est de faire connaître les problématiques communes à tous ces secteurs, les mesures de lutte contre les violences émergent.
CNI aborde dans ce dossier quelques-uns de thèmes développés au cours de cette agora.



La procureur de la République d'Ajaccio et la directrice générale de l'ARS de Corse à la conference de presse de présentation de l'événement. Photo Michel Luccioni
La procureur de la République d'Ajaccio et la directrice générale de l'ARS de Corse à la conference de presse de présentation de l'événement. Photo Michel Luccioni
Malgré la connaissance des faits de violence, il est encore difficile de les quantifier. "On n'a pas forcément de repères numériques, avoue Marie-Hélène Lecenne, directrice générale de l'Agence Régionale de Santé (ARS) de Corse qui a organisé la première Agora de la Santé en Corse. Si on prend l'exemple du phénomène de négligence pour l'enfant, c'est une forme de violence assez invisible."
 
L'accumulation de faits-divers et notamment des féminicides a alimenté la réflexion et conduit à réfléchir sérieusement au problème. "Les phénomènes de violence sont des déterminants de santé au sens où à l'origine, on retrouve des personnes avec un passé traumatique, explique Marie-Hélène Lecenne. Il y a une hypothèse nationale selon laquelle un tiers des enfants en institut médico-éducatif auraient un passé traumatique." 
Des chiffres jamais validés, mais qui collent avec les difficultés à discerner ces phénomènes de violences. Car même si l'on sait, par exemple, qu'environ 1300 enfants sont accompagnés au domicile ou placés sur l'île pour seulement 300 places, établissements et famille d'accueils réunis, savoir qui parmi eux ont subi des violences est une tâche plus ardue encore.
 
De nouvelles mesures contre les violences
 
Face au nombre de cas passés sous silences, équiper les professionnels d'outils pour repérer précocement les victimes est une priorité. "Un nouveau référentiel de la Haute Autorité de Santé, diffusé en mars dernier en annexe de la loi sur la protection de l’enfance, permet d’évaluer les différences de développement des enfants victimes de traumatismes et de violences, présente la directrice de l'ARS. C’est un outil de repérage des victimes indépendant d’une judiciarisation du sujet." 

Dans la même dynamique, l'Unité d'accueil pédiatrique pour enfants en danger (UAPED) permettra aussi à l'échelle corse, d’être saisi par le Procureur voire la PMI ou la protection de l’enfance pour évaluer la situation d’un enfant en danger.
 
Et alors que l'objectif premier de ce rassemblement d'acteurs du social, de la santé, de la justice, des institutions est de faire connaître les problématiques communes à tous ces secteurs, les mesures de lutte contre les violences émergent. "Dans les établissements de santé, médicaux-sociaux et sociaux, une nouvelle démarche a été construite avec un outil d’évaluation de la qualité dans ces établissements, se réjouit Marie-Hélène Lecenne. Cela se traduit par de la formation, le recueil des réclamations des usagers ou des aidants, la participation des usagers à des instances internes pour évoquer les dysfonctionnements porteurs de maltraitances..." 
 
Forte aussi de l'implantation de l'association nationale Women Safe and Children dans l'extrême sud de l'île, la Corse veut poursuivre ses efforts. Ce premier colloque aura alimenté la réflexion collective et permis la création d'un répertoire de ressources insulaire.