Agnès Simonpietri, militante écologiste, chef de file de la liste "Ecologia sulidaria" pour les élections territoriales de juin 2021 en Corse. Photo CNI.
- En tant que militante écologiste de longue date, qu’attendez-vous de cette COP 27 ?
- C’est une grande messe de plus ! On se rend bien compte qu’au fil des COP, il ne se passe pas grand-chose. En tout cas, ce qu’il se passe n’est pas du tout suffisant par rapport à l’enjeu, c’est ce que dit bien le secrétaire général de l’ONU. Cette COP doit être au moins une tribune pour que des paroles fortes et vraies s’expriment et aussi pour que les pays du Sud puissent s’exprimer. Ce n’est, donc, pas complètement négatif, mais étant donné que les pays sont libres de leur politique et qu’il n’y a pas vraiment d’instance internationale de régulation et de prise de décisions sur le climat, d’instance qui puisse imposer ces décisions, c’est un peu des coups d’épée dans l’eau, les uns après les autres. Ce qu’on peut en attendre pour la Corse, c’est qu’une fois de plus, mais peut-être encore plus cette fois, on pose les vrais problèmes. Tout le monde voit qu’aujourd’hui, notre île est confrontée, tous les jours, aux difficultés et aux conséquences climatiques, peut-être cela fera-t-il augmenter la prise de conscience, mais pour l’instant, les actions sont presque dérisoires par rapport aux enjeux.
- Pour vous, la prise de conscience n’est-elle pas suffisante, malgré les évènements de l'été dernier ?
- Je dirais que pratiquement tout le monde a pris conscience des enjeux parce que pratiquement tout le monde en Corse a été touché, directement ou indirectement, par le changement climatique. Que ce soit au niveau des restrictions d’eau, des tempêtes, des ponts qui s’effondrent, de la pollution de l’air avec des températures extrêmement élevées qui rendent les villes insupportables, et pas seulement les villes, les enfants ont du mal à respirer… Tout le monde est conscient, mais on est tous dans une forme de déni. On peut le comprendre parce que c’est tellement énorme ! On se sent tellement impuissant, donc on continue sur la lancée. C’est une faute politique ! On est confronté à un gouvernement pour qui la politique de transition écologique, c’est la politique du col roulé ! On est à la limite du grotesque ! La Convention Climat a fait des propositions remarquables, le gouvernement en a retenu 3 sur 150. Tous les jours, il fait exactement le contraire de ce qu’il faudrait faire sur les avions, les bassines… Et même sur des choses qui, concrètement, nous touchent en Corse : les commandes de Canadair. La France n’a pas commandé de Canadair, alors que toute l’Europe la fait. Cela aura un impact direct sur la lutte contre les incendies. Et tout est comme ça ! Il y a donc un décalage absolu entre l’alerte de la COP 27 et des COP précédentes et la politique des pays. Certains pays, comme l’Espagne ou l’Allemagne, ont des politiques plus avancées, mais, globalement, les décideurs, qui voient très bien la situation et qui ont la responsabilité de prendre les décisions, restent dans une inertie et un décalage ahurissant.
- Le mot « sobriété » est à la mode, pas seulement au niveau énergétique. Est-il urgent de changer nos habitudes de consommation ?
- C’est urgentissime ! On ne devrait plus continuer comme cela. Encore une fois, le déni est là, mais on ne peut pas reprocher à un quart de la population, qui déjà ne se chauffe pas, de ne pas vouloir appliquer des mesures supplémentaires. On ne peut pas reprocher à des gens, qui ont impérativement besoin de la voiture, de l’utiliser. Comment faire quand on est obligé de la prendre, comme c’est notre cas en Corse ! Par rapport à ces enjeux, on n’attend pas grand-chose de la COP 27 et du gouvernement, sauf à mettre une pression très forte, c’est pour cela que l’écologie doit désormais être territoriale. Il faut absolument qu’il y ait, à l’échelle territoriale, un changement radical. Et là encore, on est loin du compte !
- C’est une grande messe de plus ! On se rend bien compte qu’au fil des COP, il ne se passe pas grand-chose. En tout cas, ce qu’il se passe n’est pas du tout suffisant par rapport à l’enjeu, c’est ce que dit bien le secrétaire général de l’ONU. Cette COP doit être au moins une tribune pour que des paroles fortes et vraies s’expriment et aussi pour que les pays du Sud puissent s’exprimer. Ce n’est, donc, pas complètement négatif, mais étant donné que les pays sont libres de leur politique et qu’il n’y a pas vraiment d’instance internationale de régulation et de prise de décisions sur le climat, d’instance qui puisse imposer ces décisions, c’est un peu des coups d’épée dans l’eau, les uns après les autres. Ce qu’on peut en attendre pour la Corse, c’est qu’une fois de plus, mais peut-être encore plus cette fois, on pose les vrais problèmes. Tout le monde voit qu’aujourd’hui, notre île est confrontée, tous les jours, aux difficultés et aux conséquences climatiques, peut-être cela fera-t-il augmenter la prise de conscience, mais pour l’instant, les actions sont presque dérisoires par rapport aux enjeux.
- Pour vous, la prise de conscience n’est-elle pas suffisante, malgré les évènements de l'été dernier ?
- Je dirais que pratiquement tout le monde a pris conscience des enjeux parce que pratiquement tout le monde en Corse a été touché, directement ou indirectement, par le changement climatique. Que ce soit au niveau des restrictions d’eau, des tempêtes, des ponts qui s’effondrent, de la pollution de l’air avec des températures extrêmement élevées qui rendent les villes insupportables, et pas seulement les villes, les enfants ont du mal à respirer… Tout le monde est conscient, mais on est tous dans une forme de déni. On peut le comprendre parce que c’est tellement énorme ! On se sent tellement impuissant, donc on continue sur la lancée. C’est une faute politique ! On est confronté à un gouvernement pour qui la politique de transition écologique, c’est la politique du col roulé ! On est à la limite du grotesque ! La Convention Climat a fait des propositions remarquables, le gouvernement en a retenu 3 sur 150. Tous les jours, il fait exactement le contraire de ce qu’il faudrait faire sur les avions, les bassines… Et même sur des choses qui, concrètement, nous touchent en Corse : les commandes de Canadair. La France n’a pas commandé de Canadair, alors que toute l’Europe la fait. Cela aura un impact direct sur la lutte contre les incendies. Et tout est comme ça ! Il y a donc un décalage absolu entre l’alerte de la COP 27 et des COP précédentes et la politique des pays. Certains pays, comme l’Espagne ou l’Allemagne, ont des politiques plus avancées, mais, globalement, les décideurs, qui voient très bien la situation et qui ont la responsabilité de prendre les décisions, restent dans une inertie et un décalage ahurissant.
- Le mot « sobriété » est à la mode, pas seulement au niveau énergétique. Est-il urgent de changer nos habitudes de consommation ?
- C’est urgentissime ! On ne devrait plus continuer comme cela. Encore une fois, le déni est là, mais on ne peut pas reprocher à un quart de la population, qui déjà ne se chauffe pas, de ne pas vouloir appliquer des mesures supplémentaires. On ne peut pas reprocher à des gens, qui ont impérativement besoin de la voiture, de l’utiliser. Comment faire quand on est obligé de la prendre, comme c’est notre cas en Corse ! Par rapport à ces enjeux, on n’attend pas grand-chose de la COP 27 et du gouvernement, sauf à mettre une pression très forte, c’est pour cela que l’écologie doit désormais être territoriale. Il faut absolument qu’il y ait, à l’échelle territoriale, un changement radical. Et là encore, on est loin du compte !
- Que peut faire concrètement une collectivité territoriale, comme la Collectivité de Corse, quand le gouvernement ne fait pas grand-chose à l’échelle nationale ?
- Elle peut déjà essayer de ne pas faire le pire ! Les bateaux de croisières, ce sont les Chambres de commerce qui décident de leur arrivée. Les coffres de mouillage, ce sont encore l’Etat et les Chambres de commerce qui décident de leur pose. Chaque fois qu’il y a une décision à prendre, ce n’est pas le politique qui la prend, mais l’économique. L’intérêt des forces économiques n’est pas notre intérêt collectif. Pour l’instant, il n’y a pas de signes forts localement d’un changement de programme. Il faut aussi parler de ce qui est tabou : le nombre de touristes en Corse. On n’a pas d’eau, on n’a pas d’énergie, on ne sait pas gérer les déchets, et on continue vers le toujours plus : toujours plus de touristes, toujours plus de transport, toujours plus d’avions et de bateaux qui arrivent... On a certainement besoin du tourisme, mais, à un moment donné, il faudra prendre une décision et dire qu’on s’arrête là, que l’on gère correctement un nombre fixé de touristes et que l’on refuse certaines formes de tourisme. Autre exemple : les transports. Pourquoi ne met-on pas en œuvre le train de la Plaine ? C’est quand même incroyable ! Il y a une ligne presque entière, un outil accessible à tous, que l’on peut rendre gratuit, et qui marche sur les lignes existantes, et on est toujours en attente d’une décision ! On ne sait même pas ce qui se passe ! Par contre, pour construire des routes, on va massacrer la fontaine de Caldaniccia ! Il y a quelque chose qui ne va pas ! On a impression d’une espèce d’inertie qu’on ne peut pas arrêter mais, mais oui, on peut l’arrêter ! Il ne s’agit pas de prévoir l’avenir de la Corse à 2050, mais à 10 ans. Il y a des décisions urgentes à prendre, il faut que nos politiques locaux les prennent. C’est ce que nous attendons d’eux.
- L’action locale est-elle réellement efficace face aux grands enjeux du climat ?
- On connaît les grands enjeux du climat : l’eau, l’énergie, la sécheresse, mais il y a également la nourriture, la pollution... L’enjeu, c’est aussi de manger, de respirer et de bouger. Sans oublier l’enjeu par rapport au reste de la Méditerranée. On a tous appris à l’école « le croissant fertile », maintenant on va apprendre « le croissant stérile ». Entre le Maghreb, l’Iran et la Syrie, 550 millions de personnes risquent, dans les 20 ans, de ne plus avoir d’agriculture à cause du réchauffement climatique et du manque d’eau. La Corse peut faire partie de ces 550 millions de personnes. Si on n’a plus d’eau, comment va-t-on nourrir notre population ? Quelle culture sera possible ? Face à ces vrais enjeux qui vont nous tomber dessus, on ne peut pas dire qu’on ne peut rien faire. On peut faire à notre petite échelle, pas seulement à l’échelle du réglage de chauffage, mais à l’échelle de notre politique locale. Pour l’instant, on ne voit pas de signes forts. Très franchement, je pense que l’écologie territoriale est fondamentale et qu’il faut s’y mettre. Il faut vraiment la prendre en compte dans les politiques locales. Beaucoup de communes en ont pris conscience et font des plans territoriaux alimentaires, des plans de transport… Il manque le pilotage de la Collectivité de Corse pour mettre tout cela en forme, en cohérence.
- Pour vous, le niveau local aurait, donc, de nombreuses marges de manœuvre ?
- Oui ! A notre échelle, il y a des marges énormes d’efficacité à réaliser partout. Il faut, par exemple, travailler avec les communes, les communautés de communes et d’agglomération pour mettre en place des transports en commun gratuits ou avec un abonnement valable, à la fois, sur le bus et le train. Concernant les économies d’énergie, on nous demande de baisser le chauffage alors que les enseignes des magasins en sortie des villes sont encore éclairées toute la nuit. Ce n’est tout simplement pas possible ! On ne peut pas faire payer les petits et ne pas demander, comme le dit la loi, que l’effort soit collectif et qu’il soit aussi celui de la sphère économique.
- Elle peut déjà essayer de ne pas faire le pire ! Les bateaux de croisières, ce sont les Chambres de commerce qui décident de leur arrivée. Les coffres de mouillage, ce sont encore l’Etat et les Chambres de commerce qui décident de leur pose. Chaque fois qu’il y a une décision à prendre, ce n’est pas le politique qui la prend, mais l’économique. L’intérêt des forces économiques n’est pas notre intérêt collectif. Pour l’instant, il n’y a pas de signes forts localement d’un changement de programme. Il faut aussi parler de ce qui est tabou : le nombre de touristes en Corse. On n’a pas d’eau, on n’a pas d’énergie, on ne sait pas gérer les déchets, et on continue vers le toujours plus : toujours plus de touristes, toujours plus de transport, toujours plus d’avions et de bateaux qui arrivent... On a certainement besoin du tourisme, mais, à un moment donné, il faudra prendre une décision et dire qu’on s’arrête là, que l’on gère correctement un nombre fixé de touristes et que l’on refuse certaines formes de tourisme. Autre exemple : les transports. Pourquoi ne met-on pas en œuvre le train de la Plaine ? C’est quand même incroyable ! Il y a une ligne presque entière, un outil accessible à tous, que l’on peut rendre gratuit, et qui marche sur les lignes existantes, et on est toujours en attente d’une décision ! On ne sait même pas ce qui se passe ! Par contre, pour construire des routes, on va massacrer la fontaine de Caldaniccia ! Il y a quelque chose qui ne va pas ! On a impression d’une espèce d’inertie qu’on ne peut pas arrêter mais, mais oui, on peut l’arrêter ! Il ne s’agit pas de prévoir l’avenir de la Corse à 2050, mais à 10 ans. Il y a des décisions urgentes à prendre, il faut que nos politiques locaux les prennent. C’est ce que nous attendons d’eux.
- L’action locale est-elle réellement efficace face aux grands enjeux du climat ?
- On connaît les grands enjeux du climat : l’eau, l’énergie, la sécheresse, mais il y a également la nourriture, la pollution... L’enjeu, c’est aussi de manger, de respirer et de bouger. Sans oublier l’enjeu par rapport au reste de la Méditerranée. On a tous appris à l’école « le croissant fertile », maintenant on va apprendre « le croissant stérile ». Entre le Maghreb, l’Iran et la Syrie, 550 millions de personnes risquent, dans les 20 ans, de ne plus avoir d’agriculture à cause du réchauffement climatique et du manque d’eau. La Corse peut faire partie de ces 550 millions de personnes. Si on n’a plus d’eau, comment va-t-on nourrir notre population ? Quelle culture sera possible ? Face à ces vrais enjeux qui vont nous tomber dessus, on ne peut pas dire qu’on ne peut rien faire. On peut faire à notre petite échelle, pas seulement à l’échelle du réglage de chauffage, mais à l’échelle de notre politique locale. Pour l’instant, on ne voit pas de signes forts. Très franchement, je pense que l’écologie territoriale est fondamentale et qu’il faut s’y mettre. Il faut vraiment la prendre en compte dans les politiques locales. Beaucoup de communes en ont pris conscience et font des plans territoriaux alimentaires, des plans de transport… Il manque le pilotage de la Collectivité de Corse pour mettre tout cela en forme, en cohérence.
- Pour vous, le niveau local aurait, donc, de nombreuses marges de manœuvre ?
- Oui ! A notre échelle, il y a des marges énormes d’efficacité à réaliser partout. Il faut, par exemple, travailler avec les communes, les communautés de communes et d’agglomération pour mettre en place des transports en commun gratuits ou avec un abonnement valable, à la fois, sur le bus et le train. Concernant les économies d’énergie, on nous demande de baisser le chauffage alors que les enseignes des magasins en sortie des villes sont encore éclairées toute la nuit. Ce n’est tout simplement pas possible ! On ne peut pas faire payer les petits et ne pas demander, comme le dit la loi, que l’effort soit collectif et qu’il soit aussi celui de la sphère économique.
- Pour pallier le manque d’eau, certains agriculteurs voudraient importer en Corse la pratique controversée des bassines. Pour vous, ce n’est pas la bonne solution ?
- Non ! Les bassines pompent dans les nappes phréatiques. Si on parle de retenues collinaires ou de récupérer l’eau quand il y a des surplus, qu’il pleut trop, pour remplir des réserves, c’est une chose. Mais aller pomper l’eau dans les nappes phréatiques qui sont déjà dans un état catastrophique, non ! C’est une privatisation d’une nappe phréatique qui n’est pas acceptable ! L’eau est un bien commun qu’il faut gérer de façon commune. Les bassines, telles qu’elles sont faites sur le continent, ne sont pas une solution, elles sont même techniquement totalement impossibles à mettre en œuvre ici. L’évaporation est énorme, et la Corse est confrontée au problème de la salinisation des sols avec de plus en plus de remontées de sel. Et puis, que va-t-on irriguer avec les bassines ? Du maïs, comme c’est le cas sur le continent ? On irriguerait des cultures qui devraient être abandonnées parce qu’elles ne sont plus adaptées au dérèglement climatique. On ne va pas, nous, en Corse, copier ce modèle qui est totalement stérile et qui privatise des ressources qui appartiennent à tous. Par contre, on a énormément de marges d’actions. On a parlé de la réhausse des barrages, de multiplier les retenues collinaires. Et puis, les bassines ont des limites, il suffit de regarder ce qui se passe dans le Cap Corse : s’il ne pleut pas, on ne peut pas les remplir. Ce qu’il faut, c’est apprendre à gérer le manque d'eau et à s’adapter au changement climatique.
- Comment s’adapter ?
- Il faut adapter les espèces végétales, faire de l’Agroforesterie, repenser l’agriculture, repenser ce que l’on plante et quels agriculteurs on installe. On a besoin de maraîchers. A-t-on vraiment besoin de plus de viticulture, en plus de celle qui existe déjà ? Le jour où on aura faim, que va-t-on manger ? Du raisin ? On va manger des pommes de terre. Sur un domaine comme celui de Casabianca, si on installait des maraîchers ? Nous militons pour que la Collectivité de Corse se constitue un patrimoine de terres agricoles, qu’elle le mette, suivant le système de « terre de liens », à disposition des agriculteurs, en location et de façon transmissible, mais en priorisant les cultures. Il faut qu’elle installe des productions qui vont nous donner à manger au quotidien, plutôt que des productions qui vont s’exporter et dont on n’en aura pas forcément besoin. Toutes ces politiques sont à mettre en place à l’échelle territoriale, elles ne dépendent pas que de la COP 27 et du gouvernement. Concernant la transition énergétique, le problème de la centrale du Vazzio est une chose, mais la Collectivité peut mettre en œuvre une politique de couverture de tous les hangars des zones industrielles avec des panneaux solaires. Il faut aller vers ce type de projets d’énergie renouvelable.
- Il y a quand même toute une polémique sur les éoliennes en mer et sur terre. Quelle est votre position sur ce sujet ?
- C’est un mix ! Le terme "mix-énergétique" dit tout. Plus la politique sera décentralisée, plus on aura des panneaux solaires de balcon et des hangars couverts de panneaux solaires, moins on aura besoin de systèmes impactants. Il ne faut se priver de rien, si les impacts sont supportables. Et puis, si on les met en balance avec la pollution du Vazzio, cela fait réfléchir. Ceci dit, il y a sûrement beaucoup à faire pour améliorer les éoliennes, ce sont des recherches internationales sur lesquelles la Corse pourrait aussi se positionner.
- Pour vous, il est donc impératif que l'île change de logiciel mental et politique ?
- Oui ! Il faut tout examiner à la lumière du dérèglement climatique parce qu’il va commander tout le reste. Pour ne pas se trouver uniquement en réaction, il faut le prévoir et parvenir à changer, comme vous dites, le logiciel. Il faut avoir une réflexion de fond sur la limite du tourisme, sur la manière dont on vit, dont on se transporte, sur ce qu’on va manger demain, sur la manière dont on gère les terres agricoles... C’est vraiment un projet de fond mais il faut faire vite, on ne peut pas attendre 2030. C’est maintenant qu’il faut agir et cela devrait donner lieu à une réflexion collective de grande ampleur. Peut-être faut-il qu’on fasse une COP 27 ici en Corse !
Propos recueillis par Nicole MARI.
- Non ! Les bassines pompent dans les nappes phréatiques. Si on parle de retenues collinaires ou de récupérer l’eau quand il y a des surplus, qu’il pleut trop, pour remplir des réserves, c’est une chose. Mais aller pomper l’eau dans les nappes phréatiques qui sont déjà dans un état catastrophique, non ! C’est une privatisation d’une nappe phréatique qui n’est pas acceptable ! L’eau est un bien commun qu’il faut gérer de façon commune. Les bassines, telles qu’elles sont faites sur le continent, ne sont pas une solution, elles sont même techniquement totalement impossibles à mettre en œuvre ici. L’évaporation est énorme, et la Corse est confrontée au problème de la salinisation des sols avec de plus en plus de remontées de sel. Et puis, que va-t-on irriguer avec les bassines ? Du maïs, comme c’est le cas sur le continent ? On irriguerait des cultures qui devraient être abandonnées parce qu’elles ne sont plus adaptées au dérèglement climatique. On ne va pas, nous, en Corse, copier ce modèle qui est totalement stérile et qui privatise des ressources qui appartiennent à tous. Par contre, on a énormément de marges d’actions. On a parlé de la réhausse des barrages, de multiplier les retenues collinaires. Et puis, les bassines ont des limites, il suffit de regarder ce qui se passe dans le Cap Corse : s’il ne pleut pas, on ne peut pas les remplir. Ce qu’il faut, c’est apprendre à gérer le manque d'eau et à s’adapter au changement climatique.
- Comment s’adapter ?
- Il faut adapter les espèces végétales, faire de l’Agroforesterie, repenser l’agriculture, repenser ce que l’on plante et quels agriculteurs on installe. On a besoin de maraîchers. A-t-on vraiment besoin de plus de viticulture, en plus de celle qui existe déjà ? Le jour où on aura faim, que va-t-on manger ? Du raisin ? On va manger des pommes de terre. Sur un domaine comme celui de Casabianca, si on installait des maraîchers ? Nous militons pour que la Collectivité de Corse se constitue un patrimoine de terres agricoles, qu’elle le mette, suivant le système de « terre de liens », à disposition des agriculteurs, en location et de façon transmissible, mais en priorisant les cultures. Il faut qu’elle installe des productions qui vont nous donner à manger au quotidien, plutôt que des productions qui vont s’exporter et dont on n’en aura pas forcément besoin. Toutes ces politiques sont à mettre en place à l’échelle territoriale, elles ne dépendent pas que de la COP 27 et du gouvernement. Concernant la transition énergétique, le problème de la centrale du Vazzio est une chose, mais la Collectivité peut mettre en œuvre une politique de couverture de tous les hangars des zones industrielles avec des panneaux solaires. Il faut aller vers ce type de projets d’énergie renouvelable.
- Il y a quand même toute une polémique sur les éoliennes en mer et sur terre. Quelle est votre position sur ce sujet ?
- C’est un mix ! Le terme "mix-énergétique" dit tout. Plus la politique sera décentralisée, plus on aura des panneaux solaires de balcon et des hangars couverts de panneaux solaires, moins on aura besoin de systèmes impactants. Il ne faut se priver de rien, si les impacts sont supportables. Et puis, si on les met en balance avec la pollution du Vazzio, cela fait réfléchir. Ceci dit, il y a sûrement beaucoup à faire pour améliorer les éoliennes, ce sont des recherches internationales sur lesquelles la Corse pourrait aussi se positionner.
- Pour vous, il est donc impératif que l'île change de logiciel mental et politique ?
- Oui ! Il faut tout examiner à la lumière du dérèglement climatique parce qu’il va commander tout le reste. Pour ne pas se trouver uniquement en réaction, il faut le prévoir et parvenir à changer, comme vous dites, le logiciel. Il faut avoir une réflexion de fond sur la limite du tourisme, sur la manière dont on vit, dont on se transporte, sur ce qu’on va manger demain, sur la manière dont on gère les terres agricoles... C’est vraiment un projet de fond mais il faut faire vite, on ne peut pas attendre 2030. C’est maintenant qu’il faut agir et cela devrait donner lieu à une réflexion collective de grande ampleur. Peut-être faut-il qu’on fasse une COP 27 ici en Corse !
Propos recueillis par Nicole MARI.