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Coronavirus. Les détenus corses ont entamé une grève des plateaux-repas


Livia Santana le Jeudi 23 Avril 2020 à 16:54

Depuis le 20 avril, les détenus des prisons corses ont débuté une grève des plateaux repas pour protester contre une ordonnance de la ministre de la Justice qui prolonge, entre autres, les détentions provisoires à cause de la situation de crise sanitaire.



Les détenus de Corse entament une grève des plateaux-repas.
Les détenus de Corse entament une grève des plateaux-repas.
Au vu de la crise sanitaire actuelle, la ministre de la Justice, Nicole Belloubet a décrété des mesures exceptionnelles pour les détenus de France le 15 mars dernier. La mesure la plus contestée est le prolongement systématique de la détention provisoire, sans examen de la situation par un juge.

Les détenus du centre pénitentiaire de Borgo ont fait connaitre leur mécontentement le 20 avril dernier en refusant systématiquement leurs plateaux-repas. "90% d'entre eux soutiennent le mouvement", indique Stéphane Canuti, représentant FO pénitentiaire de Haute-Corse. Le lundi 21 avril, se sont ceux de la maison d'arrêt d'Ajaccio qui rejoignaient le mouvement de contestation.

Dans un courrier adressé à la direction des centres pénitenciers de Haute-Corse et de Corse-du-Sud les détenus expriment les raisons de leur mécontentement :  "Prolongement des détentions provisoires de façon abusive et illégale, refus de libération des mandats de dépôt arrivant à terme, refus systématique des demandes de mise en liberté provisoire, suspension des permissions, suspension des aménagement de peine, refus de libération des détenus à risque pathologique Covid-19. Nous refusons que, sous prétexte d'un décret non conforme aux lois européennes (qui doivent toujours prévaloir), et par respect à la présomption d'innocence, cela nous soit imposé."

Ainsi sur les 225 plateaux-repas servis à Borgo le mercredi 22 avril seulement 21 ont été récupérés. A Ajaccio, la lettre envoyée à la direction de la maison d'arrêt a été signée par 33 détenus sur 41. Selon Stéphane Canuti : "La protestation est plutôt symbolique et le mouvement pacifique puisque les détenus ont de quoi se faire à manger, ce n'est pas une grève de la faim."  José Caria syndicaliste FO Pénitentiaire à Ajaccio l'assure : "La situation est calme."  

Le prolongement de la détention provisoire, "une pratique choquante" pour le bâtonnier du barreau de Bastia 

Si les détenus se soulèvent contre ces mesures exceptionnelles, c'est aussi le cas des avocats. "Je ne suis pas certain que l’urgence sanitaire nécessitait que des mandats de dépôt valables un an puissent en un claquement de de doigt être allongé à 18 mois.", déclare Me Jean-Paul Eon, bâtonnier au barreau de Bastia.

Les avocats déplorent que l’institution judiciaire "ne contrôle plus le bienfondé de la détention provisoire".  De ce fait, pour aider leurs clients, ils devront multiplier les demandes de remises en liberté. Le bâtonnier reprend : "La réaction des détenus est logique, on ne met pas quelqu'un en prison et on jette la clé. Il y aura probablement des débats après le confinement, car nous assistons à des problèmes de droits.

Depuis le texte du 15 mars, la détention correctionnelle en matière de délit est passée de 4 mois à 6-7 mois suivant les cas. En matière criminelle cela passe de 12 mois à 18. Des pratiques "tout à fait choquantes" pour Jean-Pau Eon. 
 En ce qui concerne les mises en liberté provisoires, le délai imparti à la chambre de l'instruction pour statuer sur les affaires de détention en appel, est rallongé de 15 jours à 45 jours. Pour le bâtonnier de Bastia, ce délai est un peu "excessif". Il assure qu'à Bastia la chambre de l'instruction veillera à ne pas mettre autant de temps.