Cette première séance estivale du Conseil municipal de Bastia débute en ronronnant par une longue, monotone et ennuyeuse explication du 1er adjoint délégué aux finances, Ange Rovere, sur le nouveau règlement intérieur des trois cimetières communaux d’Ondina, de Montesoro et de Cardo et sur les nouvelles durées et tarifs des concessions. Exit, ensuite, quelques dossiers mineurs dans une ambiance peu studieuse. L’examen de plusieurs avenants à divers marchés publics majorant le prix des travaux est la première occasion pour Gilles Simeoni, élu d’Inseme per Bastia, de s’inquiéter de la pratique, un peu trop fréquente à son goût, « de dépassements systématiques de coûts par rapport aux coûts initialement prévus ». Le maire, Emile Zuccarelli, répond en indiquant que les motifs d’avenants proviennent de coûts supplémentaires imprévus surgissant en cours de chantier. « Nos ressources sont suffisantes pour faire face aux avenants », précise-t-il.
Une majoration des coûts
L’inflation des coûts est justement la pierre d’achoppement entre majorité et opposition sur la création de la voie douce. Ce projet de réseau de pistes cyclables et piétonnes, qui s’étend sur un axe Nord-Sud de bord de mer de Toga à l’Arinella, est un sujet récurrent de polémique. Déjà, en février 2012, lors de l’adoption du plan de financement des études de faisabilité, Gilles Simeoni s’était insurgé contre la méthode de l’équipe en place qui demandait aux élus municipaux de voter des coûts provisionnels sans compte rendu technique, sans savoir de quoi il en retournait vraiment. A l’époque déjà, François Tatti, qui était toujours adjoint délégué aux travaux, avait fini par concéder la justesse de cette critique, tout en appelant à se mobiliser autour de ce projet ambitieux qu’il a initié et porté.
Bis Repetita
Près de 16 mois plus tard, toujours sur le même dossier, mais, cette fois, sur le plan de financement de l’ensemble de l’opération, Gilles Simeoni remonte au créneau pour réitérer la même critique sur l’absence d’informations techniques et fustiger « un dérapage des coûts ». En effet, le plan proposé présente une facture d’un montant total de 11,5 millions €. Plus de 3,4 millions sur le 1er secteur qui reliera Toga au Rond-point Nogues, puis au Quai des Martyrs. Près de 549 000 € sur le 2nd secteur, qui contournera le Vieux Port. Plus de 3,76 millions € sur le 3ème secteur avec la construction d’un tunnel sous la citadelle et plus de 3 millions € sur le 4ème secteur jusqu’à l’Arinella. La Mairie, qui sollicite des subventions auprès de l’Europe ou de l’Assemblée de Corse à hauteur de 80% de ces coûts, les a déjà obtenues sur le 1er secteur dont les travaux devraient débuter prochainement.
Un inquiétant dérapage
C’est, d’abord, Michel Castellani, également élu d’Inseme, qui soulève ce problème de coût. « Le projet nous a été présenté à 8 millions €, puis est monté à 10 millions et atteint aujourd’hui 11,5 millions €. Les dérapages sont dangereux en matière budgétaire ». Il s’alarme aussi de la viabilité du projet et des travaux à effectuer sous la Citadelle. La réponse de l’Exécutif municipal, que le mot « dérapage » indispose, ne satisfaisant pas l’opposition, Gilles Simeoni enfonce plus durement le clou et dénonce, encore une fois, la méthode : « On passe d’un coût initial de 8 millions € en 2011 à un plan de financement de 11,5 millions €, aujourd’hui. C’est une augmentation de 3,5 millions €, c’est-à-dire de 50% du coût. Que vous le vouliez ou non, il y a un dérapage par rapport à votre analyse et à votre estimation initiales. Je ne comprends pas qu’on demande au Conseil municipal de se prononcer sur un projet et un plan de financement sans nous fournir aucun document ou étude technique, ni aucune esquisse du projet. Les approximations continuent ! Nous ne savons pas combien va réellement coûter le projet. Nous n’avons rien qui permet d’estimer la validité du plan de financement et vous nous demandez de le voter ! Vous nous demandez d’entériner sur parole ! Le Conseil municipal n’est pas là pour entériner sans avoir les documents objectifs qui permettent de corroborer les plans présentés ».
Le coup de pied de l’âne
A la surprise générale, François Tatti, à qui le maire a retiré, pour cause de fronde électorale, sa délégation aux travaux, intervient pour donner le coup de pied de l’âne. « Il ne faut pas mégoter. On n’est pas en train de parler d’une route ordinaire, ni d'un équipement que l’on fait tous les jours. Un tunnel pour vélo, il n’y en a pas beaucoup dans le monde ! Il ne faut pas transiger sur le prix car c’est une question de sécurité. Sur la partie enrochement, il y a des tas d’impondérables que nous n’avions pas prévus. Il est vrai que ce plan demande une présentation plus exhaustive », concède-t-il, encore une fois. S’il justifie la hausse des coûts, il sous-entend qu’elle sera exponentielle : « Le Front de mer est l’épine dorsale de la voie douce. Il faudra faire des ramifications sur l’ensemble des quartiers. Ce qui coûtera encore plus d’argent. C’est le prix à payer pour la ville durable que nous appelons de nos vœux ».
Un étrange doute
A sa suite, Emile Zuccarelli argumente que les prix initiaux ont été calculés rapidement pour obtenir des subventions à hauteur de 80% et rassure : « Nous assumons ces surenchérissements car nos finances sont très saines ». Ange Rovere conteste les dérapages. Pour lui, ce sont les études de faisabilité qui ont affiné les chiffrages, d’abord effectués « au doigt mouillé » et donc fait flamber les coûts. Puis, étrangement, il émet un doute sur une partie du projet : la faisabilité du tunnel de 4 mètres de diamètre qui devrait être percé sous la citadelle. « Si on veut faire la voie douce, il faut envisager une autre hypothèse de travail : élargir le trottoir côté Est en déportant la route existante. Je ne crois plus à l’enrochement que je défendais il y a un an et demi car la CTC a remis, à une date ultérieure, le financement du travail à effectuer au préalable ».
De surprenants aveux
Réaction immédiate de Gilles Simeoni qui s’offusque : « Nous avons voté pour ce projet, ici et à la CTC. Mais, en l’état actuel du dossier, nous ne pouvons que nous abstenir de le voter ! Il y a des problèmes techniques qui se posent, vous réfléchissez à des options dont nous ne savons rien ! On a l’impression que vous avancez sans savoir où tout cela va conduire, y compris en termes de coût ! ». Surprenante réplique d’Ange Rovere : « Sur ce point, vous avez raison ! ».
Le maire tente de mégoter, mais son 1er adjoint balaye l’atermoiement d’un revers de main. Pris au dépourvu, Emile Zuccarelli finit, royal, par concéder : « L’Exécutif municipal accepte la critique car l’intérêt de la ville est d’obtenir des subventions ! ».
D’étonnants aveux qui ne font que renforcer les inquiétudes d’une opposition médusée. Puis, le 1er édile conclut avec le sourire : « Ce sera au prochain Exécutif de s’occuper de ce dossier ». Un Exécutif dont ni lui, ni son 1er adjoint ne feront plus partie… Ceci expliquant peut-être une certaine désinvolture peu habituelle en ce lieu !
La plage de Ficaghjola
La séance s'achève par une question orale d’Inseme per Bastia relayant l’inquiétude des habitants de Saint Joseph sur « l’état de dégradation avancée dans lequel se trouvent les abords de la plage de Ficaghjola et la fontaine dite l’ochju di Ficaghjola ». L'équipe municipale explique que les terrains concernés ne sont pas communaux, mais appartiennent en grande partie à l’Etat qui veut les céder à la CTC, le reste étant privé. La CTC ayant effectué, au printemps, des études géotechniques sur tout le secteur, la Mairie attend les résultats avant d’agir. D’ores et déjà, les coûts des travaux sont estimés à 300 000 €. Le maire, qui concède, encore bonhomme, la pertinence de l’intervention d’Inseme, conclut « En attendant, nous prenons des mesures conservatoires, compte tenu de la dangerosité du site ».
N.M.
Une majoration des coûts
L’inflation des coûts est justement la pierre d’achoppement entre majorité et opposition sur la création de la voie douce. Ce projet de réseau de pistes cyclables et piétonnes, qui s’étend sur un axe Nord-Sud de bord de mer de Toga à l’Arinella, est un sujet récurrent de polémique. Déjà, en février 2012, lors de l’adoption du plan de financement des études de faisabilité, Gilles Simeoni s’était insurgé contre la méthode de l’équipe en place qui demandait aux élus municipaux de voter des coûts provisionnels sans compte rendu technique, sans savoir de quoi il en retournait vraiment. A l’époque déjà, François Tatti, qui était toujours adjoint délégué aux travaux, avait fini par concéder la justesse de cette critique, tout en appelant à se mobiliser autour de ce projet ambitieux qu’il a initié et porté.
Bis Repetita
Près de 16 mois plus tard, toujours sur le même dossier, mais, cette fois, sur le plan de financement de l’ensemble de l’opération, Gilles Simeoni remonte au créneau pour réitérer la même critique sur l’absence d’informations techniques et fustiger « un dérapage des coûts ». En effet, le plan proposé présente une facture d’un montant total de 11,5 millions €. Plus de 3,4 millions sur le 1er secteur qui reliera Toga au Rond-point Nogues, puis au Quai des Martyrs. Près de 549 000 € sur le 2nd secteur, qui contournera le Vieux Port. Plus de 3,76 millions € sur le 3ème secteur avec la construction d’un tunnel sous la citadelle et plus de 3 millions € sur le 4ème secteur jusqu’à l’Arinella. La Mairie, qui sollicite des subventions auprès de l’Europe ou de l’Assemblée de Corse à hauteur de 80% de ces coûts, les a déjà obtenues sur le 1er secteur dont les travaux devraient débuter prochainement.
Un inquiétant dérapage
C’est, d’abord, Michel Castellani, également élu d’Inseme, qui soulève ce problème de coût. « Le projet nous a été présenté à 8 millions €, puis est monté à 10 millions et atteint aujourd’hui 11,5 millions €. Les dérapages sont dangereux en matière budgétaire ». Il s’alarme aussi de la viabilité du projet et des travaux à effectuer sous la Citadelle. La réponse de l’Exécutif municipal, que le mot « dérapage » indispose, ne satisfaisant pas l’opposition, Gilles Simeoni enfonce plus durement le clou et dénonce, encore une fois, la méthode : « On passe d’un coût initial de 8 millions € en 2011 à un plan de financement de 11,5 millions €, aujourd’hui. C’est une augmentation de 3,5 millions €, c’est-à-dire de 50% du coût. Que vous le vouliez ou non, il y a un dérapage par rapport à votre analyse et à votre estimation initiales. Je ne comprends pas qu’on demande au Conseil municipal de se prononcer sur un projet et un plan de financement sans nous fournir aucun document ou étude technique, ni aucune esquisse du projet. Les approximations continuent ! Nous ne savons pas combien va réellement coûter le projet. Nous n’avons rien qui permet d’estimer la validité du plan de financement et vous nous demandez de le voter ! Vous nous demandez d’entériner sur parole ! Le Conseil municipal n’est pas là pour entériner sans avoir les documents objectifs qui permettent de corroborer les plans présentés ».
Le coup de pied de l’âne
A la surprise générale, François Tatti, à qui le maire a retiré, pour cause de fronde électorale, sa délégation aux travaux, intervient pour donner le coup de pied de l’âne. « Il ne faut pas mégoter. On n’est pas en train de parler d’une route ordinaire, ni d'un équipement que l’on fait tous les jours. Un tunnel pour vélo, il n’y en a pas beaucoup dans le monde ! Il ne faut pas transiger sur le prix car c’est une question de sécurité. Sur la partie enrochement, il y a des tas d’impondérables que nous n’avions pas prévus. Il est vrai que ce plan demande une présentation plus exhaustive », concède-t-il, encore une fois. S’il justifie la hausse des coûts, il sous-entend qu’elle sera exponentielle : « Le Front de mer est l’épine dorsale de la voie douce. Il faudra faire des ramifications sur l’ensemble des quartiers. Ce qui coûtera encore plus d’argent. C’est le prix à payer pour la ville durable que nous appelons de nos vœux ».
Un étrange doute
A sa suite, Emile Zuccarelli argumente que les prix initiaux ont été calculés rapidement pour obtenir des subventions à hauteur de 80% et rassure : « Nous assumons ces surenchérissements car nos finances sont très saines ». Ange Rovere conteste les dérapages. Pour lui, ce sont les études de faisabilité qui ont affiné les chiffrages, d’abord effectués « au doigt mouillé » et donc fait flamber les coûts. Puis, étrangement, il émet un doute sur une partie du projet : la faisabilité du tunnel de 4 mètres de diamètre qui devrait être percé sous la citadelle. « Si on veut faire la voie douce, il faut envisager une autre hypothèse de travail : élargir le trottoir côté Est en déportant la route existante. Je ne crois plus à l’enrochement que je défendais il y a un an et demi car la CTC a remis, à une date ultérieure, le financement du travail à effectuer au préalable ».
De surprenants aveux
Réaction immédiate de Gilles Simeoni qui s’offusque : « Nous avons voté pour ce projet, ici et à la CTC. Mais, en l’état actuel du dossier, nous ne pouvons que nous abstenir de le voter ! Il y a des problèmes techniques qui se posent, vous réfléchissez à des options dont nous ne savons rien ! On a l’impression que vous avancez sans savoir où tout cela va conduire, y compris en termes de coût ! ». Surprenante réplique d’Ange Rovere : « Sur ce point, vous avez raison ! ».
Le maire tente de mégoter, mais son 1er adjoint balaye l’atermoiement d’un revers de main. Pris au dépourvu, Emile Zuccarelli finit, royal, par concéder : « L’Exécutif municipal accepte la critique car l’intérêt de la ville est d’obtenir des subventions ! ».
D’étonnants aveux qui ne font que renforcer les inquiétudes d’une opposition médusée. Puis, le 1er édile conclut avec le sourire : « Ce sera au prochain Exécutif de s’occuper de ce dossier ». Un Exécutif dont ni lui, ni son 1er adjoint ne feront plus partie… Ceci expliquant peut-être une certaine désinvolture peu habituelle en ce lieu !
La plage de Ficaghjola
La séance s'achève par une question orale d’Inseme per Bastia relayant l’inquiétude des habitants de Saint Joseph sur « l’état de dégradation avancée dans lequel se trouvent les abords de la plage de Ficaghjola et la fontaine dite l’ochju di Ficaghjola ». L'équipe municipale explique que les terrains concernés ne sont pas communaux, mais appartiennent en grande partie à l’Etat qui veut les céder à la CTC, le reste étant privé. La CTC ayant effectué, au printemps, des études géotechniques sur tout le secteur, la Mairie attend les résultats avant d’agir. D’ores et déjà, les coûts des travaux sont estimés à 300 000 €. Le maire, qui concède, encore bonhomme, la pertinence de l’intervention d’Inseme, conclut « En attendant, nous prenons des mesures conservatoires, compte tenu de la dangerosité du site ».
N.M.