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Bastia : recueillement et questions troublantes après l'agression d'Yvan Colonna


Pierre-Manuel Pescetti le Mercredi 2 Mars 2022 à 23:42

Près de 200 personnes se sont rassemblées devant la préfecture à Bastia ce mercredi 2 mars. Un rassemblement spontané, en silence, pour se recueillir après l’annonce de l’agression subie par Yvan Colonna en début de journée à la prison d’Arles. Du recueillement et des questions quant au caractère troublant des faits.



Près de 200 personnes se sont recueillies en silence devant les grilles de la préfecture de Bastia ce mercredi 2 mars.  Crédits Photo : Pierre-Manuel Pescetti
Près de 200 personnes se sont recueillies en silence devant les grilles de la préfecture de Bastia ce mercredi 2 mars. Crédits Photo : Pierre-Manuel Pescetti
Le silence est perturbé par quelques chuchotements. « J’ai été choquée dès que j’ai appris la nouvelle. Je le suis encore », souffle Marie. Comme elle, ils sont près de 200 à s’être rassemblés spontanément devant les grilles de la préfecture de Bastia dès 18h30 ce mercredi 2 mars.

Quelques heures plus tôt, dans la matinée, Yvan Colonna, condamné à la prison à perpétuité pour le meurtre du préfet Claude Erignac en 1998, était la victime d’une agression de la part d’un codétenu dans la prison d’Arles. L’auteur présumé, Franck Elon Abé, un djihadiste vétéran de l’Afghanistan de 36 ans, aurait étranglé puis étouffé Yvan Colonna, le laissant pour mort, dans un état grave avant l’intervention des surveillants. Le détenu nationaliste de 61 ans, est encore en état de coma post-anoxique dans le service de réanimation d’un hôpital de Marseille où il a été transféré depuis celui d’Arles.  

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La mine grave, les personnes présentes à Bastia se tiennent dans la pénombre. En amont du rassemblement, quelques camions de policiers des Compagnies Républicaines de Sécurité (CRS) ont pénétré dans l’enceinte de la préfecture, gyrophares allumés. Plus par précaution, apparemment. Aucun membre des forces de l’ordre n’est visible et le rassemblement est pacifique. Quelques détonations se font entendre, proches de l’enceinte. Leurs flashs ravivent la pâle luminosité des lampadaires mais personne n’y fait vraiment attention. Le moment est au recueillement. Mais la colère monte. Beaucoup se posent la même question : « comment se fait-il qu’Yvan Colonna et son agresseur se soient retrouvés seuls dans une prison aussi sécurisée que celle d’Arles ? ».

Des questions troublantes demeurent

Après la sidération et l’émotion, la conseillère à l’Assemblée de Corse du groupe Avanzemu Vanina Le Bomin reste dubitative : « c’est une tragédie qui soulève beaucoup de questions dont la plupart restent en suspens ».

Pour Paul-Félix Benedetti, leader du mouvement indépendantiste Core in fronte, « le drame était annoncé et est le résultat d’une construction machiavélique qui vise à stigmatiser les détenus corses de l’affaire Erignac ». L’élu de l’Assemblée de Corse s’appuie sur la contradiction des statuts de Détenu Particulièrement Signalé (DPS) et du manque de surveillance durant les faits. « L’Etat nous dit qu’il faut garder les détenus corses dans des centrales hyper sécurisées comme Arles où il y a pratiquement un surveillant par détenu et il est possible que cette agression ait eu lieu ? ».

À quelques mètres de là, le député nationaliste Jean-Félix Acquaviva, défend la même ligne : « si le statut de DPS avait été levé et qu’Yvan Colonna avait été rapproché en Corse, cela ne serait pas arrivé ». Au-delà du fait, cela prend une tournure politique. Jean-Félix Acquaviva pointe du doigt « la lourde responsabilité de l’Etat » et affirme rester « extrêmement vigilant quant aux dites enquêtes administratives sur l’agression ». Comme les autres responsables politiques présents, s’il abandonne ce moment au recueillement, Jean-Félix Acquaviva prévient : « nous n’en resterons pas là et cela passera par une mobilisation politique et populaire ».