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Bastia : les agriculteurs se mobilisent devant la Direction Départementale des Territoires et de la Mer


Rose Casado le Vendredi 31 Mai 2024 à 17:38

Vendredi 31 mai, une quarantaine d’agriculteurs se sont réunis devant la Direction Départementale des Territoires et de la Mer, à Bastia pour protester contre les conditions d’attribution de l’Aide Bovine Corse, et l’absence de reconnaissance de la sécheresse en Plaine Orientale pour l’année 2023.



Plusieurs dizaines d’agriculteurs se sont réunis devant la Direction Départementale des Territoires et de la Mer, à Bastia, vendredi 31 mai 2024.
Plusieurs dizaines d’agriculteurs se sont réunis devant la Direction Départementale des Territoires et de la Mer, à Bastia, vendredi 31 mai 2024.
Vendredi 31 mai, à 10 heures, une quarantaine d’agriculteurs ont répondu présents à l’appel de la Fédération départementale des Syndicats d’Exploitants agricoles de Haute-Corse, de la Coordination rurale et des représentants des Jeunes Agriculteurs, devant les grilles de la Direction départementale des Territoires et de la Mer. Les agriculteurs ont souhaité porter à la connaissance des pouvoirs publics, leur mécontentement mettent notamment en exergue la sécheresse de l’année 2023 en Plaine Orientale, qui n’a pas été reconnue par le gouvernement. Ayant par conséquent empêché toute subvention.

Dans le même temps, et malgré une première négociation avec les autorités, les éleveurs demandent une revalorisation de l’Aide Bovine Corse (ABC). Un dispositif – couplé à la production émanant de la Politique Agricole Commune (PAC) - visant à soutenir les agriculteurs, en leur versant des subventions par animal, en fonction de divers critères. « Comment voulez-vous tenir le coup ? Quand on fait le compte, on travaille à perte », déplore Jean-Jacques Ferrari, éleveur en plaine orientale, qui a perdu la majorité de l’ABC en raison de ses conditions d'élevage. Les représentants syndicaux ont été conviés à entrer au sein des locaux de la Direction départementale des Territoires et de la Mer, et ont fait savoir qu’ils occuperaient les lieux jusqu’à l’obtention d’une discussion avec les pouvoirs ministériels.

"Un manque à gagner estimé autour d’un million d’euros"

Les représentants syndicaux réunis à la Direction Départementale des Territoires et de la Mer, vendredi 31 mai 2024.
Les représentants syndicaux réunis à la Direction Départementale des Territoires et de la Mer, vendredi 31 mai 2024.
Au total, « 1 100 agriculteurs » seraient touchés par la baisse de l’Aide Bovine Corse en 2024, assure Joseph Colombani, président de la Fédération départementale des Syndicats d’Exploitants agricoles de Haute-Corse. La raison première ? Les conditions d’élevage dites « expansives », propres au territoire insulaire, qui ne correspondraient pas aux conditions d’attribution de la totalité des subventions. Le bétail, libre, a la possibilité de se reproduire à sa guise, engendre des croisements de races, et sont par conséquent « classées en code 39 » (code attribué aux vaches croisées, NDLR). Par ce croisement, l’ABC, par bête, ne serait versée qu’au minimum. Soit une somme de 55 euros par vache, sur une fourchette allant jusqu’à 99 euros (contre 120 sur le continent). « C’est un manque à gagner qu’on a estimé autour d’un million d’euros », fustige Joseph Colombani.

Cependant, après une première salve de négociations, l’État aurait reconnu « qu’ils n’avaient pas évalué les connaissances des 70 % de bêtes sous le code 39 », concède-t-il. Mais si les autorités sont « prêtes à revenir sur les calculs », leurs contre-propositions ne semblent pas suffisantes pour les éleveurs. « Soit ils nous proposent un délai à 6 mois, soit ils proposent une sorte de forfait sordide ou chacun des agriculteurs touche 50 % de plus que ce qu’il avait obtenu jusqu’à présent », s’indigne le président de la Fédération départementale des Syndicats d’Exploitants agricoles de Haute-Corse, pointant une « inégalité ». « Mais quid du rattrapage de ceux qui n’ont eu que 55 euros au lieu des 99 euros ? Que se passe-t-il lorsque vous avez eu 99 euros [soit la prime maximale en Corse, NDLR] et qu’on vous rajoute 50 % ? C’est injuste. » L’agriculteur voit dans les pouvoirs dirigeants, une « méconnaissance de la culture et de l’agriculture corse », et entend bien, en plein processus de Beauvau, « lancer un signal fort ». Collectivement, les agriculteurs souhaitent « la reconnaissance des parcours de bovins », davantage de structures d'abattage, mais aussi une organisation du marché avec des signes officiels de qualité. « Il y en a marre d’être traité comme les parias de la République. (…) Ici, ce n’est pas la mer Méditerranée qui nous sépare, c’est l’océan Pacifique ! », image-t-il.
 

« Il n’y a pas, aux yeux de l’administration centrale, eu de sécheresse automnale en 2023 »

Des agriculteurs manifestent devant la Direction Départementale des Territoires et de la Mer, à Bastia, vendredi 31 mai 2024.
Des agriculteurs manifestent devant la Direction Départementale des Territoires et de la Mer, à Bastia, vendredi 31 mai 2024.
Par leur présence, les agriculteurs font une nouvelle fois part de leur souhait. À savoir, la sécheresse automnale qui se serait abattue en plaine orientale en 2023. « Il y avait un espoir que cette sécheresse soit reconnue », explique Joseph Colombani. Et pour cause, l’agriculteur assure que les cartes de Météo France démontrent « qu’il y a bien eu une sécheresse » sur la période. « On pensait qu’on aurait gain de cause, nous avions fourni tous les documents de Météo France qui attestent qu’il y avait une sécheresse », s’étonne de son côté Cyril Caria président de coordination rurale, alors qu’un système de photo-satellite Airbus ayant sillonné la zone d’avril à octobre serait « complètement passé à côté ». 

« Finalement, une décision est tombée il y a quelques jours. Il n’y a pas, aux yeux de l’administration centrale, eu de sécheresse automnale en 2023 », note Joseph Colombani, en évoquant « un mépris » des autorités. « Dans ma commune, il n’est pas tombé une seule goutte d’eau », témoigne Jean-Jacques Ferrari. « On ne va rien toucher malgré la sécheresse. On n’a droit à rien », peste-t-il alors devant le bâtiment institutionnel.

Alors qu’en ce moment même, le Comité de Ressources en Eau (CRE), « qui va provoquer des restrictions à cause de cette sécheresse s'est réuni », les syndicats s’inquiètent des ressources en eau « notamment sur la plaine orientale et le barrage de l’Alisgiani ». Les retenues d’eau, remplies à « 60 % », ne permettront pas aux agriculteurs « de finir la saison ». « Du jamais-vu », poursuit Joseph Colombani. « Si les pouvoirs en place veulent qu’on disparaisse, ils n’ont cas le dire clairement », s’inquiète finalement Cyril Caria.