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Assemblée de Corse : Le comité d’évaluation des politiques publiques rend son rapport sur la crise sanitaire


Nicole Mari le Vendredi 4 Août 2023 à 19:24

Lors de la dernière session de l’Assemblée de Corse, le Comité d’évaluation des politiques publiques (CEPP), instance consultative installée en 2021 et composée en majeure partie de citoyens bénévoles, a rendu son premier rapport. Le thème : « L’action de la Collectivité de Corse dans le domaine de la crise sanitaire de mars 2020 à septembre 2021 ».



L'hémicycle de l'Assemblée de Corse. Photo Michel Luccioni.
L'hémicycle de l'Assemblée de Corse. Photo Michel Luccioni.
« C’est un moment important dans l’histoire de notre institution ». C’est avec satisfaction que la présidente de l’Assemblée de Corse, Nanette Maupertuis, a, lors de la session du 27 juillet de l’Assemblée de Corse, présenté le premier rapport du Comité d’évaluation des politiques publiques (CEPP). Cette instance consultative, créée en 2021 à Corti, a pour but d’associer le citoyen aux décisions sur des sujets prégnants, comme le logement, la spéculation foncière et immobilière, les transports ou les déchets, et de donner leurs avis sur la valeur de l’action publique mise en place. Présidée par Marie-France Bereni-Canazzi, personnalité issue de la société civile, cet outil est constitué de 51 membres, représentants d’associations, de syndicats, des Chambres de commerce, de métiers, d’agriculture, et de citoyens tirés au sort, pour une durée de cinq ans. « Un outil récent autant que moderne, Le CEPP réconcilie, à sa façon, société civile et société politique », affirme Marie-France Bereni-Canazzi. « Ni cour des comptes, ni audit, ni contrôle de gestion, l’évaluation reste un domaine à part qui consiste à construire pas à pas les éléments d’un projet commun ». Pour sa première évaluation, le CEPP a choisi de tirer les enseignements de la gestion de la crise sanitaire de la Covid-19 sur l’île de mars 2020 à septembre 2021 et de favoriser le retour d’expériences en croisant différents points de vue, notamment celui de la population corse.
 
Des recommandations
L’évaluation, qualifiée par Nanette Maupertuis, de « photographie à l’instant T », se penche sur l’action de la Collectivité de Corse (CDC), tout en prenant soin d’établir son périmètre d’action et de distinguer, s’agissant de la politique de la santé, ce qui relève du régalien et du territorial. « Nous avons innové en croisant, à la fois, l’approche quantitative et l’approche qualitative. Une longue liste de questions a été envoyée à une pluralité d’acteurs à auditer. De cette façon, nous avons pu croiser différents points de vue, au premier rang desquels celui des usagers. Au final, décideurs, operateurs, bénéficiaires et bien sûr, population insulaire, ont tous livré leur sentiment. Sans exclusive », explique Marie-France Bereni-Canazzi. Ce travail « dense » de 186 pages acte que « les dirigeants de la CDC ont su prendre des décisions difficiles pour gérer au mieux » tout en mettant l’accent sur l’urgence à agir. S’en suit une série de recommandations dans trois domaines : médical, socio-économique et institutionnel. Au niveau du premier, « Nous proposons, par exemple, un Plan de crise, des pistes pour mieux former les soignants et intensifier leur recrutement. Autre demande pertinente : celle concernant la création d’un Centre Hospitalier Universitaire (CHU) qui, s’il n’est pas trop ambitieux et si ses missions sont ciblées, permettrait de mieux gérer les crises », poursuit la présidente du CEPP. Egalement de constituer un stock de médicaments et de matériels : séquenceurs, respirateurs…
 
Plus d’autonomie
Concernant le second, le CEPP propose de doter la CDC de ses propres outils de suivi économique. « En cas de survenance d’une nouvelle crise, le tourisme étant parmi les secteurs les plus touchés lors des épidémies, il serait opportun de réduire les rotations. Celles-ci seraient réservées uniquement aux transports utiles à la subsistance des habitants et à leur suivi médical hors de l’île ». Des mesures de rapatriement aérien et maritime coordonnées sont préconisées et pourraient aller jusqu’à la fermeture des ports et des aéroports. Autres priorités : la mise en place de mesures d’urgence et de solidarité et de mesures de protection des travailleurs sociaux. Côté institutionnel, le CEPP « soutient une dévolution de compétences nouvelles dans la perspective d’une évolution institutionnelle conférant plus d’autonomie de décision à la Collectivité de Corse ». La présidente de l’Assemblée de Corse, qui s’est prêtée au jeu des auditions en tant qu’ancienne présidente de l’Agence du tourisme de la Corse (ATC), s’est félicitée « du sérieux et de la pertinence » des demandes. « J’ai pu juger de la qualité de l’engagement citoyen dans une logique transpartisane. La démocratie participative et la transparence s’en trouvent valorisées. Il est important qu’il y ait un regard citoyen sur ce que nous faisons ».
 
Des outils spécifiques
Le rapport a été unanimement salué sur tous les bancs de l’Assemblée de Corse. Core In Fronte, par la voix de son président Paul-Felix Benedetti, a « salué l’action bénévole de ce comité. Le rapport est pertinent. Cela est nouveau. Il s’agit de faire une introspection, de donner des pistes. Je félicite la méthode et le système d’évaluation qui associe la base citoyenne. Vos conclusions sont très politiques et il convient de doter la Corse d’outils spécifiques ». Un avis partagé par Saveriu Luciani pour PNC-Avanzemu : « Vous êtes venus proposer une construction. C’est une respiration démocratique. Il y a une liberté de propos, vous êtes utile. L’évènement est à signaler. Il y a un pays à construire, vous avez votre place ». Même son de cloche pour Jean-Martin Mondoloni, président d’U Soffiu novu : « J’avais des doutes sur le CEPP. Mais on se rallie. Le sujet est multifactoriel. C’est une respiration démocratique ». Pour la majorité territoriale, ce rapport illustre, indique Murielle Fagni, « l’existence d’un poumon démocratique », autant que la « sortie de la seule perspective technicienne ». Elle insisté sur l’intérêt d’un suivi de préconisations. Son colistier, Paul-Jo Caitucoli, propose même « d’appliquer cette méthode de l’évaluation au niveau local, à l’échelle des territoires. Le choix de la neutralité est un gage de démocratie. C’est un moment historique que nous vivons ».
 
Cap sur les transports
Un outil et une évaluation également plébiscités par le Conseil exécutif. Bianca Fazi, conseillère exécutive en charge du social et de la santé, également auditionnée au cours de cette évaluation, a plaidé pour que « la santé, compétence régalienne de l’Etat, doit être une compétence nouvelle dévolue à la Corse ». Le président de l’Exécutif, Gilles Simeoni, a affirmé l’utilité de cet outil et annoncé des moyens supplémentaires : « Le CEPP a gagné ses galons. L’instance fonctionne sans ressources budgétaires. Il faut lui donner les moyens de fonctionner. Comment intéresser les citoyens à la chose publique ? Le CEPP est une forme innovante et un outil de transparence ».
La prochaine évaluation portera sur la politique des transports. Ses déclinaisons sont si nombreuses qu’il faudra circonscrire le périmètre d’étude. Le CEPP va s’y atteler dès la rentrée.
 
N.M.