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La renaissance du liège corse, une richesse peu exploitée des forêts insulaires


Livia Santana le Mercredi 29 Juin 2022 à 17:38

Depuis 2016, la filière du liège corse se structure avec à sa tête la coopérative Silvacoop qui regroupe 125 propriétaires forestiers. Les levées de liège en cours permettront d'ici 10 ans de créer de nouvelles ressources et de proposer une matière renouvelée de meilleure qualité.



La Corse pourrait bien avoir un avenir dans la production de liège ? En tout cas elle est sur la bonne voie. Avec 64% de forêt, soit 561 000 hectares, le territoire insulaire est le département le plus boisé de France par rapport à sa superficie, et même, l’île la plus boisée de Méditerranée. Celle-ci est composée à 80 % de feuillus parmi lesquelles on retrouve le chêne vert, le châtaignier, le hêtre et… le chêne-liège qui représente 60 000 hectares soit 10% de la forêt ! 

C’est à partir de ce constat que la coopérative Silvacoop a décidé en 2016, de reprendre en main la filière qui, jusqu’en 1960, prospérait sur l’île. Depuis 6 ans, la coopérative aussi implantée dans d’autres régions du continent, œuvre pour la promotion et la préservation de cette écorce connue pour être l’élément essentiel de la composition des bouchons de bouteilles de vin,mais aussi utilisé pour la fabrication de petite maroquinerie. 
Il faut savoir qu’en Corse, 86% des forêts sont privés soit 480 000 hectares et 14% appartiennent donc à la Collectivité de Corse et aux communes. Ainsi, tout l’enjeu de Silvacoop a été de réunir au fil des années, les propriétaires privés qui détenaient des parcelles où poussait du chêne-liège. « Nous effectuons un gros dans les cadastres des mairies pour retrouver les propriétaires des terrains, mais les données ne sont pas souvent à jour. Souvent, les gens que nous contactons ne savent pas qu’ils ont un véritable patrimoine à valoriser entre leurs mains », explique Julien Rogé, animateur de la filière liège en Corse. Une fois les propriétaires contactés, ils peuvent choisir d’adhérer à l’unique coopérative forestière de l’île, ce qui leur permettra de bénéficier d’un accompagnement total dans la gestion et la valorisation de leurs arbres du prélèvement de l’écorce à sa vente. Désormais, 125 propriétaires privés sur l’île ont fait ce choix.

De nouveaux débouchés pour le liège mâle

La renaissance du liège corse, une richesse peu exploitée des forêts insulaires
 
Le chêne-liège produit deux qualités d'écorce : le mâle et le femelle. Quelle différence ? L’écorce mâle est celle issue de l’arbre âgé d’au moins 20 ans, qui n’a jamais subi de démasclage (Ndlr ; action de retirer la première écorce). Souvent de couleur sombre, d’une structure irrégulière et difficile à travailler à cause de sa dureté, cette qualité de liège est souvent utilisée dans la fabrication d’isolants issus de granulés de liège. La Sardaigne est d’ailleurs une grande spécialiste de cette transformation. 
Après le démasclage, il faut une dizaine d’années pour qu’un nouveau liège se constitue : la femelle qui est moins dure, plus régulière et plus claire. Celui-ci est de bien meilleure qualité et est utilisé notamment pour les bouchons et objets en liège. 

Actuellement eCorse, comme ce travail de démasclage n’a pas été fait puisque plus de 70% de la ressource sur pied mobilisable est de qualité « liège mâle » soit environ 70 000 tonnes, tandis que moins de 10% sont de qualité de « liège bouchonnable » (femelle) soit 9 000 tonnes. Même si la coopérative essaie de valoriser ce liège mâle, il faut dire qu’en termes de retombées économiques, il est moins rentable. En effet, le liège bouchonnable est acheté 35 centimes d’euros le kilo quand un liège mâle vaut seulement 5 centimes. « Avec du liège de mauvaise qualité, on ne gagne rien, on arrive à rémunérer le propriétaire de façon que cela paie leur cotisation à la coopérative et que par la suite, cela produise du liège femelle, plus intéressant »détail Julien Rogé. 

Pour le moment, le liège mâle corse est revendu pour au Portugal, à l’Espagne ainsi qu’à la Sardaigne, de grands fabricants de panneaux isolants. Mais dans le futur, l’animateur de la filière en Corse l’assure : « si nous stabilisons notre récolte à 300 tonnes annuelles fixes, nous avons de quoi monter une petite usine de broyage. »