La grogne des laboratoires d'analyse corses, en grève à partir de lundi

Le ton a commencé à monter ces dernières heures. Lorsque le gouvernement a fait part de son désir de rattraper le surplus financier attribué à la filière lors de la crise covid, les laboratoires d'analyse de tout le pays on fait le choix unanime d'une grève administrative. "On a fait quelques jours d'arrêt des transmissions des données SIDEP, détaille Jean Canarelli, médecin biologiste à la tête du laboratoire Canarelli-Colonna-Fernandez (CCF) d'Ajaccio. On a travaillé pour les patients et les médecins en donnant les résultats des examens de santé, mais ce sont juste les éléments statistiques que nous n'avons pas renvoyé au niveau de la plateforme."

Sans esquisse de réponse de la part du gouvernement, qui chiffre la contribution globale pour 2023 à 250 millions d'euros environ, les biologistes ont fait le choix de passer en grève à partir du lundi 14 novembre. "Il n'y a pas d'ouverture de discussions avec la Caisse Nationale d'Assurance Maladie (CNAM) et le ministère de la santé, rien n'avance, déplore Jean Canarelli. Je dois vous avouer qu'après s'être investis totalement et avoir mis toutes nos équipes, tous nos collaborateurs, tous les laboratoires de France à fond dans la crise, les gens ont vraiment la mémoire courte. Ils ont oublié que c'est eux qui nous ont demandé ce travail et très souvent, à l'encontre de ce qu'on préconisait en tant que professionnels. Ils voulaient du chiffre, les ont eu et maintenant nous reprochent d'avoir eu cette activité et veulent la retenir sur plus de quatre ans."

Ce qui dérangerait l'État serait a priori la pérennisation de cette contribution à un niveau plus important pour les années à venir. Mais les biologistes, qui ont appliqué la politique de dépistage massif souhaitée par l'État, estiment que les dettes qui en découlent ne sont pas de leur responsabilité. "Ceux qui nous applaudissaient il y a quelques mois nous jettent des cailloux aujourd'hui, regrette le président du conseil de l’Ordre des médecins de Corse-du-Sud. Certes, on a mieux gagné notre vie mais en travaillant 7j/7, 24h/24 à la demande de l'État. Il fallait peut-être ne pas le faire. On a été pendant des mois sous une pression qui mériterait quand même qu'on mette un peu plus d'attention dans la façon dont on nous traite."

D'autant plus que le comportement comptable des établissements est plutôt positif. "On est habitués à participer aux économies de santé : plus de 5 milliards en une dizaine d'années à l'assurance maladie, et quand toutes les dépenses de santé ont augmenté de 30%, nous seulement de 3 ou 4%, martèle le docteur Canarelli. C'est vraiment la non-anticipation des problèmes à venir : on a repris la calculette et on fait des soustraction mesquines."

Les laboratoires d'analyse ont d'ores et déjà annoncé que la grève serait reconductible jusqu'au mercredi 16 novembre inclus. Pour les huit sites des laboratoires CCF, le principe général est simple : "assurer les urgences, affirme Jean Canarelli. On va jusqu'au bout de notre sens des responsabilités et ne pas laisser sur le carreau les établissements de santé et des patients qui ont besoin de chimiothérapies, de bilans urgents..."

En Haute-Corse, les laboratoires Vialle de Toga, Annonciade, Bastio et Borgo ont opté pour une fermeture totale sur les trois jours, quand ceux de Saint-Florent, Ville Saint François, Cap et Casamozza seront ouverts uniquement le matin avec une liste limitative réservée à certains cas comme les urgences. La même liste sera appliquée au site de Lupino, le seul qui restera ouvert aux horaires habituels de 7h à 19h.