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L'appel à l'union sacrée de Corsica Libera


Nicole Mari le Vendredi 13 Septembre 2013 à 22:05

Pour sa rentrée politique, le mouvement indépendantiste Corsica Libera met les élus territoriaux au pied du mur. A 12 jours du vote sur la réforme constitutionnelle et à un mois du débat sur le statut de résident, qui se tiendra fin octobre à l’Assemblée de Corse (CTC), il enjoint les membres de la majorité régionale à assumer leurs responsabilités en fonction de la position affichée par leur chef, Paul Giacobbi. Il appelle l’ensemble des forces du mouvement national à faire cause commune et union sacrée autour du statut de résident. Explications, pour Corse Net Infos, de Josepha Giacometti, conseillère territoriale du groupe Corsica Libera.



Les membres de l'Exécutif de Corsica Libera.
Les membres de l'Exécutif de Corsica Libera.
C’est l’heure des rentrées politiques sous fond d’échéance électorale. Mais, pour le mouvement indépendantiste Corsica Libera, les scrutins municipaux restent un enjeu mineur face aux grands débats politiques qui rythmeront un automne qui s’annonce, de ce point de vue-là, d’ores et déjà, chargé. Réformes institutionnelle et constitutionnelle, statut de résident, Arrêtés Miot, transfert de la fiscalité, PADDUC (Plan d'aménagement et de développement durable de la Corse)… Des enjeux majeurs pour l’avenir de la Corse. « Sans vouloir dramatiser, force est de constater qu’il y va de la pérennité de la communauté nationale corse sur la terre de Corse », affirme Jean-Guy Talamoni, leader du mouvement et président du groupe à la CTC.
 
Du temps perdu
Pour le mouvement national « qui a porté seul, durant des années, un certain nombre de propositions », il y a d’autant plus urgence qu’il a longtemps prêché dans le désert. « Beaucoup de temps a été perdu. Si on nous avait écouté plus tôt, la Corse ne serait certainement pas dans la situation dramatique qu’elle connaît aujourd’hui », estime le leader indépendantiste. Refusant de manquer le « rendez-vous essentiel » qui se présente, il fustige « les comportements négatifs et marginaux qui sont la marque d’un défaut de hauteur de vue et d’un manque de sens de l’intérêt collectif corse ». La diatribe vise les élus des partis traditionnels, notamment de gauche, qui n’ont pas apprécié le débat des Ghjurnate di Corti, auquel participaient deux conseillers exécutifs, et l’ont fait savoir. « Libre à ces politiciens de continuer à gérer leur fonds de commerce politique, et parfois économique et financier, au moment où la Corse est face à des choix décisifs ».
 
L’arbitrage du patron
Corsica Libera avait, alors, interpelé le président de l’Exécutif, Paul Giacobbi, en lui demandant de clarifier sa position sur le statut de résident qui divise la majorité territoriale. A peine deux jours plus tard, le patron incontesté de la gauche insulaire rendait un arbitrage net en « s’engageant clairement en faveur de la résidence ». Cette prise de parole inattendue déchaina polémiques et crispations jacobines jusqu’au-delà de la Méditerranée. « Il reste maintenant à tous les membres de cette majorité, notamment ceux qui détiennent une responsabilité, de tirer les conséquences de cet arbitrage ». En clair, Corsica Libera demande aux conseillers exécutifs de prendre leurs responsabilités. Jean-Guy Talamoni assène : « On ne peut pas contester le pouvoir d’arbitrage du président du Conseil Exécutif. C’est clair au niveau des principes. C’est au président Giacobbi de faire respecter ses principes ».
 
Une responsabilité historique
Paraphrasant, Jean-Pierre Chevènement, un jacobin célèbre, il ajoute : « Un conseiller exécutif, ça ferme sa gueule, si ça veut l’ouvrir, ça démissionne ! ». Dans la ligne de mire indépendantiste, Jean Zuccarelli, président de l’ADEC, qui exprimait, récemment, son désaccord sur le sujet avec Paul Giacobbi. Mais pas seulement ! Pour Corsica Libera, il n’y a que deux positions logiques, deux seuls choix possibles : celui de l’éditorialiste parisien Christophe Barbier qui incite les Corses, qui ne peuvent plus se loger, à s’exiler. Celui du mouvement national et du statut de résident. « Toutes les autres positions sont intellectuellement malhonnêtes. Certains groupes politiques sont censés défendre la veuve et l’orphelin, mais en fait défendent la spéculation immobilière. Ils prennent une responsabilité historique déterminante pour nos enfants », fustige l’avocat bastiais à l’intention du Front de gauche et des Communistes.
 
L’union sacrée
Néanmoins, la stratégie efficace pour le parti indépendantiste, « la seule force de changement » reste l’union sacrée des forces nationalistes autour des fondamentaux historiques, dont la majorité régionale s’est emparée. « Nous le disons clairement : le seul garant d’une bonne mise en œuvre de la réforme est le mouvement national, lequel doit se mettre en situation de peser de tout son poids sur la situation politique ». L’idée est « une mise en cohérence de nos revendications » pour exprimer, ensemble, avec plus de force, un même point de vue qui, aujourd’hui, s’exprime en ordre dispersé. « Cette cohérence sera nécessaire si nous voulons tirer la réforme vers le haut. La seule garantie que la réforme ait une hauteur suffisante, c’est que les Nationalistes restent au centre du jeu », martèle Jean-Guy Talamoni. Avant de prévenir : « On ne fera pas de nationalisme sans les Nationalistes ».
 
Des listes communes ?
Malgré les réticences affichées par les modérés, Corsica Libera ne désarme pas et lance un nouvel appel en ce sens à Femu a Corsica « pour servir pleinement notre peuple au moment où celui-ci est face à des enjeux cruciaux pour son avenir ».  Les négociations en cours à Ajaccio entre les différentes forces nationalistes, pour s’engager ensemble dans la bataille des municipales sur une liste commune, semblent de bon augure. Mais, si les Indépendantistes avancent même des pions sur un possible soutien à Gilles Simeoni à Bastia au 2nd tour, pas question pour eux de n’accepter qu’un rapprochement électoral de circonstance. « Le rapprochement sur Ajaccio ne pourra pas se faire sans qu’il y ait un rapprochement politique global », déclare fermement Jean-Guy Talamoni. « Nous sommes dans une stratégie d’adaptation avec les autres forces politiques et d’accord avec les tendances du mouvement national », résume François Sargentini, membre de l’Exécutif de Corsica Libera. La balle rebondit, donc, dans le camp des modérés. La saisiront-ils ou non ? Réponse probable, dès dimanche, à Corte, lors de la rentrée politique de Femu a Corsica.
 
N.M.

Josepha Giacometti, conseillère territoriale du groupe Corsica Libera.
Josepha Giacometti, conseillère territoriale du groupe Corsica Libera.
Josepha Giacometti : « Le mouvement national doit savoir parler d’une seule voix »

- Que répondez-vous aux critiques qui fusent sur le statut de résident depuis la prise de position de Paul Giacobbi ?
- Le statut de résident ou la citoyenneté est un concept que nous défendons, pour notre part, depuis de nombreuses années. Nous travaillons sur cette question depuis 3 ans à la CTC, ce qui représente des heures et des heures de réunions en Commission avec l’ensemble des élus. Lors de ce travail préalable, tout le monde s’est bien rendu compte, même ceux qui y étaient opposés comme Paul Giacobbi au départ, que le statut de résident était la seule solution possible.
 
- Certains élus estiment qu’il y a d’autres options pour lutter contre la dépossession foncière. Qu’en pensez-vous ?
- Aujourd’hui, il ne nous reste plus beaucoup d’options. Soit, on choisit de sacrifier ce qu’est la Corse aujourd’hui, sa terre… et il faut le dire. Il faut être prêt à dire aux Corses que, dans très peu de temps, ils ne pourront très certainement plus se loger. Soit, on choisit la seule solution possible qui est le statut de résident.
 
- Pourquoi exhortez-vous les élus de l’Exécutif territorial à prendre leurs responsabilités.
- Les élus, qui ont fait des déclarations sur le sujet, appartiennent à une majorité régionale. Le Président de l’Exécutif, qui est le chef de cette majorité, s’est prononcé. Ces élus-là devront prendre leurs responsabilités et véritablement se déterminer. Il faudra voir leur position au moment du vote de la réforme constitutionnelle, les 26 et 27 septembre, et du statut de résident, fin octobre. Ils ne pourront pas avoir une position double ou différente de celle du président du Conseil Exécutif. Ils savent très bien, parce qu’ils ont participé aux travaux dans le cadre de leurs fonctions, que la résidence est la seule solution possible.
 
- Ne craignez-vous pas les postures idéologiques ?
- J’espère que ces élus ne tomberont pas dans la posture idéologique et ne seront pas tentés par un recul de position que nous avons, pourtant, depuis longtemps, dépassé dans les Commissions. J’espère qu’on reviendra à plus de raison et de mesure !
 
- Pourquoi appelez-vous, de nouveau, à l’union du mouvement national ?
- Aujourd’hui, nous sommes au point de bascule, nous nous acheminons vers la conclusion et vers des votes très importants sur des revendications que le mouvement national porte depuis des années. Les différentes tendances nationalistes disent à peu prés la même chose mais nous le disons chacun de notre côté. Nous avons très bien vu que, de cette manière, nous ne réussissons pas à concrétiser qualitativement le poids que nous représentons véritablement et que nous ont conféré les dernières élections territoriales. Le poids légitime des idées que le mouvement national porte depuis des années, qui ont été, pendant longtemps, rejetées et qui apparaissent, aujourd’hui, comme des solutions.
 
- Vous parlez de la nécessité de défendre un point d’équilibre. Qu’entendez-vous par là ?
- Dans chaque débat, il y a un seuil en dessous duquel nous ne descendrons pas sinon le projet n’aurait plus de sens. Ce seuil, c’est le point d’équilibre dont nous devons discuter au sein du mouvement national. Si nous n’arrivons pas à le concrétiser clairement, nos idées seront des coquilles vides, vidées de leur substance. Le mouvement national doit savoir parler d’une seule voix pour donner ce point d’équilibre, un point qu’on ne peut donner qu’ensemble !
Propos recueillis par Nicole MARI





Commentaires

1.Posté par Pollini Joseph le 14/09/2013 11:30
« On ne fera pas de nationalisme sans les Nationalistes » nous affirme avec conviction Jean Guy Talamoni , bien sûr , mais qui donc pourrait douter d'une telle lapalissade!
Il conviendrait cependant de préciser que seuls les "nationalistes" veulent du nationalisme, autre lapalissade!
Et chacun sait, même les plus optimistes parmi eux, qu'ils sont loin d'être une majorité en Corse.
Le terme "Nationalisme", qui désigne en général l'aspiration sincère d'un peuple, uni et solidaire, à être reconnu comme une nation indépendante, a bien souvent désigné aussi un patriotisme excessif, pouvant aller jusqu'à la xénophobie.
C'est pour cette raison qu'il convient à mon avis d'opposer au concept de "nationalisme", cette attitude qui aboutit souvent à la haine de l'autre, celui de "patriotisme", qui signifie en général amour quasi viscéral de la patrie.
De la patrie, c'est à dire de la terre de nos aïeux certes mais aussi de la terre qui nous a adoptés parce que nous y sommes profondément attachés, soit parce que nous y sommes nés, soit parce que nous avons choisi d'y vivre et dont nous avons souhaité partager le destin ( et ce quelles que soient nos origines ). La Corse c'est aussi cela, c'est ce qu'elle a été, une terre d'accueil, ne croyez vous pas?
Il me semble que chez nos amis nationalistes, plusieurs d'entre eux sont aussi mes amis , un peu plus d'humilité et de clairvoyance servirait mieux leur cause même si celle-ci semble se résumer trop souvent au rejet de l'autre, de l'étranger comme du "non résident" ou du résident intermittent et au maintien acharné de privilèges ou d'avantages qui sont devenus difficiles à justifier, d'autant qu'Il y a d'autres façons de combattre contre les injustices sociales...
De plus si un tel statut de "résident " devait être adopté pour la Corse, l'une des régions faisant partie de la République Française, il conviendrait que la réciproque soit vraie , et qu'elle puisse être appliquée partout ailleurs dans le pays!
Ce qui signifierait que tous les Corses résidents sur l'île devraient de être considérés comme des "non résidents" ailleurs, et auraient à accepter les mêmes contraintes c'est à dire celles d'un exil temporaire de 5 ans selon M.Giacobbi, de 10 ans selon M. Talamoni dans la région continentale de leur choix avant de pouvoir acheter une résidence ( même secondaire ) sur le continent, pour les mêmes raisons !
Les "nationalistes" souhaitent-ils cela?
Ceci pour dire que parler sans cesse de "nationalisme" et des injustices nées d'un "état français" affublé de tous les défauts, dont celui d'être un état colonial écrasant la Corse et les corses est à terme contre productif et est, surtout, facteur de divisions plus que d'unité du peuple corse.
Ce n'est qu'un point de vue, le mien, mais je crois qu'il est largement partagé.
Bien amicalement
Joseph Pollini