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L’Association Adrien Lippini "Un vélo, une vie" s'engage dans un nouveau virage


Philippe Jammes le Samedi 28 Janvier 2023 à 16:29

Le 14 juillet 2009, un cycliste passionné perdait la vie à l’aube de ses seize ans, sur une route de Haute-Corse, près de Bastia . Quelques temps plus tard ses parents créaient l’association « Adrien Lippini – Une vélo une vie », militant pour un partage de la route. Depuis, cette association, reconnue par les services institutionnels régionaux et nationaux, adossée à la FUB, Fédération Française des Usagers de la Bicyclette, a bien grandi. Elle s’apprête à prendre un nouveau virage.




Françoise Lippini et une jeune bénévole de l'association.
Françoise Lippini et une jeune bénévole de l'association.
Lors de son Assemblée générale du 21 janvier dernier, les bénévoles de l’association  ont acté le départ de la présidence de Françoise Lippini, en poste depuis 2011. Militante de tous les instants du partage de la route avec son mari Gilbert, n’en abandonne pas pour autant son sacerdoce, bien au contraire. « De présidente, j’ai souhaité devenir Directrice de l’association à temps complet. J’abandonne ainsi ma profession que j’exerce depuis 28 ans, pour devenir salariée à plein temps de l’association qui sera dés lors présidée par ma fille Aurélie Siciliano Clemente. Une présidente plus jeune , sportive, formée à l'IMV (ndlr : Initiateur Mobilité à Vélo), et sensible à la citoyenneté , au partage de la route et à la solidarité , tout ce qui est au cœur de l'association. Elle sera dans la continuité».

Année 2023, année de changement pour Françoise qui va pouvoir travailler et concrétiser un des gros projets de l’association : la création en son sein d’un ACI, Atelier et Chantier d'Insertion. « En vue de ce projet j'ai réussi ma certification en tant que conseillère en insertion professionnelle et je vais pouvoir me consacrer entièrement au développement de l'association ». Point fort de l’association, elle dispose depuis février 2022 de locaux au rez de chaussée d’un immeuble de la Cité des Monts dans les quartiers sud de Bastia. « Notre histoire a bouleversé notre vie. Nous n'imaginions pas lorsque nous avons créé cette association en être là aujourd'hui.  Adrien nous montre le chemin et c'est avec lui, avec tous les bénévoles de l’association que nous continuons l'aventure du vélo au cœur de la solidarité, de la mobilité , du vivre ensemble et du partage de la route en Corse ».

Quelques questions à Françoise Lippini

L'atelier de réparation vélo.
L'atelier de réparation vélo.
- Pourquoi ce changement à la tête de l’association ?
-  J’ai pris la présidence de l’association en 2011, succédant à mon mari Gilbert qui aujourd’hui s’occupe de l’atelier vélo dans nos locaux. On a pu développer notre combat, notre association grâce à de belles rencontres, aux associations du territoire. Les débuts ont été difficiles. Nous avions un stand et nous parcourions toute la Corse pour faire découvrir notre combat pour le partage de la route. On a ensuite franchi un pas supplémentaire en créant une charte et en intervenant dans les écoles. On a reçu un bon accueil et l’aide de l’inspection académique. Les rencontres, les contacts, les interventions se sont multipliées avec des associations comme OPRA et Leia dans les quartiers sud de Bastia ou encore avec la PJJ, Protection Judiciaire de la Jeunesse et les étudiants de l’IRA. Au fil des années nos activités, avec de plus en plus de bénévoles, se sont accrues avec la création par exemple d’une Vélo école, un atelier de réparation des vélos, des stages, des journées de sensibilisation, notre Tour du partage de la route.
J’ai souhaité quitter la présidence pour mieux m’occuper, en tant que directrice, à notre projet d’ouverture de notre chantier d’insertion de mécanique vélo qui devrait s’ouvrir d’ici 6 à 9 mois. Le but d’un chantier d’insertion est d’accompagner des personnes éloignées de l’emploi vers l’emploi. Ces personnes sont des personnes percevant le RSA, des personnes inscrites à Pôle emploi ou encore sous-main de justice.

- Votre rôle ?
- Mon rôle de CIP, conseillère d’insertion professionnelle, à partir du 1er février, sera d’accompagner entre 3 et 5 personnes sur un projet professionnel à travers ce chantier. On travaille sur ce chantier depuis 2 ans et grâce à un cabinet de conseil on a pu monter le dossier. Celui-ci sera financé à 80% par l’Etat et la Collectivité de Corse et 20% par notre association. C’est la direction du travail qui après examen du dossier fixe le nombre de salariés du chantier.
 

- Aujourd’hui, le partage de la route est-il accepté ?
- C’est toujours très difficile. Et le COVID n’a pas arrangé les choses voire les a empirées. C’est surtout la période Après Covid qui s’est avérée très compliquée. Je dirai presque que tout est à recommencer. Les gens se sont refermés sur eux-mêmes. Le partage où qu’il soit est difficile. Les chiffres concernant les accidents de vélo ont explosé. Rien qu’en Haute-Corse on en a recensé 10 en 2022. On a des passerelles, des contacts avec les clubs cyclistes mais c’est difficile aussi car eux aussi ont des problèmes de structuration régionale.

- Ce local de Montesoro ?
- On en cherchait un depuis longtemps. On a eu l’opportunité d’en avoir un en location en février dernier. Ce qui est important c’est qu’il est au cœur des quartiers Sud de la ville, ces quartiers populaires. En l’espace de quelques mois, 6 bénévoles, habitant ces quartiers, sont venus nous rejoindre. Aujourd’hui les bénévoles sont au nombre de 20.

- De quoi l’association vit-elle ?
- Heureusement nous avons des aides : Politique de la ville, donc Etat, Ville, CAB, et aussi du ministère de la justice notamment. Aujourd’hui les finances du club sont saines. Nous n’avons aucune dette. Aujourd’hui on va franchir un cap avec ce chantier d’insertion. L’Association aura besoin de salariés avec pour idée d’amener de nouvelles choses dans ces quartiers sud de Bastia. Le vélo doit servir de lien. On travaille d’ailleurs avec des médiateurs de la ville qui circulent à vélo dans les quartiers. L’ADN de l’association c’est se servir du vélo comme lien.

- Parmi les projets, outre le chantier ?
- Développer encore plus la pratique du vélo. Grâce aux dons de certains, on récupère des vélos qu’on répare dans nos ateliers et qu’on vend à très bas prix. On a aussi notre Tour du partage. En cette année 2023, les jeunes, 9 jusqu’à présent, seront plus nombreux. Ce tour durera 4 jours, du 17 au 20 avril. Contrairement aux années précédentes, les étapes partiront chaque jour de Bastia. 4 étapes au programme : Bastia -Macinaggio, Bastia-Oletta, Bastia-Sorio et Bastia-Vescovato. La nouveauté cette année, outre des jeunes en difficultés, nous aurons des cadets de la gendarmerie qui se mêleront au peloton. L’objectif sera de créer des liens, pas évidents au départ, entre ces jeunes, autour du partage de la route. Le slogan est d’ailleurs : Partageons la route, protégeons la vie. Autre projet, le Challenge de la Sécurité routière inter-entreprises le 10 mai prochain. Pour cette 1ère édition nous avons d’ores et déjà comme participants La Poste, le groupe CODIM, Leroy Merlin, SOCOBO, les CFC, Groupama. Le 3 mai on aura aussi une action au Centre de détention de Casabianda qui va nous donner des vélos car renouvelant leur parc. Plus proche de nous, à la fin de ce mois de janvier, notre association va participer à Zone Libre, le Festival des Arts sonore à Bastia. Nous avons rencontré Tommy Lawson qui s’en occupe car il était à la recherche de bruits de quartier. Ce fut une belle rencontre humaine. Dans le cadre de son festival itinérant nous allons mettre 6 vélos à disposition des animateurs qui accompagnent le public. Nous ferons aussi 2 balades chaque après midi du 31 janvier au 4 février.

- Votre Ordre National du Mérite, reçue en 2016 ?
- Une belle récompense, un moment très émouvant. J’ai été en effet nommée Chevalier de l'Ordre du Mérite par décret du président de la République en date du 14 novembre 2016 au titre du Ministère de la ville, de la jeunesse et des sports. Emmanuel Batbe, délégué Interministériel à la Sécurité Routière me l’a remise au ministère de l'intérieur à Paris.