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Visite Eric Dupont Moretti en Corse : « Une énième provocation » pour Core in Fronte


Nicole Mari le Mercredi 21 Septembre 2022 à 20:23

Le Garde des Sceaux, Eric Dupond-Moretti sera en visite en Corse les 22 et 23 septembre. Une séquence en deux temps : jeudi après-midi, au tribunal d’Ajaccio où il rencontrera les acteurs judiciaires et le Girtec, vendredi au tribunal de Bastia pour l'audience d'installation d’Hélène Davo, la nouvelle et controversée Première présidente de la Cour d'appel de Bastia. A quelques heures de sa venue, le parti indépendantiste Core in Fronte publie une lettre ouverte sur les points d’achoppement entre l’Etat et la Corse et taxe cette visite de « provocation ».



Eric Dupont Moretti, Garde des Sceaux. Compte Twitter Eric Dupont Moretti.
Eric Dupont Moretti, Garde des Sceaux. Compte Twitter Eric Dupont Moretti.
Pour sa première visite officielle en Corse, le Garde des Sceaux, Eric Dupond-Moretti, cumule les attentes et les handicaps. Attentes du monde judiciaire avec des tribunaux qui manquent de magistrats et de moyens. Au tribunal d’Ajaccio, jeudi après-midi, le ministre rencontrera l’ensemble des acteurs et présentera son budget pour 2023 « qui augmentera de 8% pour la 3ème année consécutive », précise son ministère. Il assistera ensuite à une réunion au GIRTEC (Groupement d'intérêt public pour la reconstitution des titres de propriétés en Corse) en présence des élus. Handicap à Bastia où il assistera notamment vendredi après-midi à l'audience d'installation de la nouvelle Première présidente de la Cour d'appel de Bastia, Hélène Davo. Une nomination très controversée pour l’ancienne adjointe de l’ex-ministre de la justice, Nicole Belloubet, qui a rejoint l’Elysée en 2019 pour y suivre les dossiers sensibles avant d’être nommée inspectrice générale de la justice en 2020. Et surtout le spectre de deux dossiers brûlants où les Nationalistes l’attendent, mais où le ministre n’a visiblement pas la main : l’enquête sur l’assassinat d’Yvan Colonna, dont il a été l’avocat, les doutes et les zones d’ombres sur ce qui s’est passé, le matin du 2 mars dernier, à la centrale d’Arles. Les demandes de libération conditionnelles d’Alain Ferrandi et de Pierre Alessandri, emprisonnés depuis 24 ans pour le meurtre du préfet Claude Erignac, et libérables depuis 6 ans. Sans oublier les collectifs anti-mafia qui demandent à le rencontrer.

La lettre ouverte de Core in Fronte : « Pourquoi venir dans de telles conditions ? »

C’est dans ce contexte que Core in Fronte a publié, ce mercredi, une lettre ouverte à Éric Dupond-Moretti où, énumérant un certain nombre de considérants, il s’interroge sur le but d’une visite en Corse qu’il taxe de « énième provocation ». Le parti indépendantiste liste huit points noirs : « Considérant la responsabilité engagée de l’Etat français dans l’exécution du prisonnier politique Yvan Colonna ; Considérant la responsabilité de l'Etat français, à travers le Parquet, qui fait systématiquement appel des décisions judiciaires favorables envers Alain Ferrandi et Pierre Alessandri ; Considérant la responsabilité engagée de l’Etat français pour l’ensemble des assassinats de militants nationalistes corses ; Considérant la responsabilité engagée de l’Etat français pour les traitements d’exception infligés à l’encontre des patriotes corses incarcérés ; Considérant la responsabilité engagée de l’Etat français pour les poursuites et les harcèlements constants envers l’ensemble des anciens prisonniers politiques corses ; Considérant la responsabilité engagée de l’Etat français pour l’indécente politique d’amalgame entretenue entre résistance corse et terrorisme islamiste millénariste ; Considérant la responsabilité engagée de l’Etat français pour le rôle orienté et dévoyé de la police et de la justice en Corse, contre le Mouvement National et plus particulièrement contre le Mouvement de Libération Nationale : Considérant votre silence sur tous ces points énoncés ci-dessus ; Considérant l’état actuel des discussions initiées, entre la France et la Corse, non clarifié sur le principe d'une solution politique et d'une réparation historique ». Et pose la question au Garde des Sceaux : « Pourquoi venir dans de telles conditions si ce n’est pour entretenir ce flou méprisant qui n’a que trop duré à l’égard de la Corse ? ». Pour Core in Fronte, « Le temps est au courage politique et non à une énième visite ministérielle sans véritable lendemain, si ce n’est pour perpétuer ce que nous subissons, depuis des dizaines d’années, de la part de votre appareil judiciaire ». Dans ce contexte, il considère cette visite « comme une énième provocation, d’une politique gouvernementale, qui n’a pour la Corse que condescendance et déconsidération ». Et conclut : « Sur le terrain des luttes, nous saurons nous ériger à la hauteur de ces bravades inefficientes ».