Corse Net Infos - Pure player corse

Tocc’à voi - "Ce que nous enseigne la mort de Simon Fazi"


L'Anziani pè l'avvene le Mardi 1 Novembre 2022 à 15:31

Aujourd’hui CNI veut aller encore plus loin pour répondre à la demande toujours plus croissante des ses lecteurs et invite les internautes à participer à l'élaboration du journal avec leurs "contributions". Les articles retenus seront mis en page d'accueil, tout comme les articles, rédigés par les journalistes. On les distingue de ces derniers par la mention «Tocc'à voi ». Comment devenir contributeur?
Dans cette première phase pour devenir contributeur il suffira juste de nous adresser un mail à corsenetinfos@gmail.com avec en objet Tocc'à Voi.
Aujourd'hui, au nom de l'association Anziani pè l'avvene, Antoine-Marie Casalta rend un hommage appuyé à Simon Fazi qui vient de décéder.



Simon Fazi (Dr)
Simon Fazi (Dr)
Nous ne sommes plus à l’heure des veillées et de l’agora sur la place de l’église où l’on y racontait l’histoire de son village voire l’histoire de la Corse et des acteurs d’un temps révolu.
Dans ce monde devenu muet, silencieux, sans continuum mémoriel, il est difficile de faire connaître ces acteurs souvent discrets de telle ou telle période. La période de Simon Fazi est d’abord celle du réveil d’une Corse des années 60, comateuse, exsangue, peu peuplée suite à des exodes massifs, manipulée dans une entente tacite état-clans, ouvrant les portes à toutes les spéculations: Somivac, Setco, colons, investisseurs aussi silencieux que pernicieux, barbouzes.


Cette période de réveil se fit grâce à des médecins lucides au chevet de l’agonisante. Nul besoin de les nommer, tout un chacun les a en mémoire.L’équipe s’est vite renforcée de volontaires, une poignée d’hommes prêts à tout sacrifier pour sauver ce corps social cachexique, ce qu’il restait du peuple corse sur sa terre de Corse, leur mère patrie.Simon était de ceux-là. Les plus généreux furent les premiers à se lever. Ceux dits de la première heure.
La lutte allait être âpre.
Ce corps social malade ne pouvait être bousculé.


Dans cette société culturellement et anthropologiquement clanique, cette société de l’après guerre attachée au drapeau tricolore flottant encore sur les tombes du champ d’honneur, drapeau ô combien objet de fierté, il ne pouvait être question de transformation radicale en un jour, avec une tête de bélier. La main de fer de la détermination avait besoin de l’épais gant de velours de l’empathie pour l’amener sur la tamanta strada.


S’il fallut s’engager frontalement, ce fut avec celui qui était détenteur non pas de la raison mais de la « violence légitime », l’état français, jacobin, droit dans ses bottes encore aujourd’hui.Il fallait de l’abnégation, des hommes courageux, volontaires, lucides, fiables, incorruptibles.La longue lutte connut des chausses-trappe, des provocations barbouzardes, des perquisitions matinales, des accusations infondées, des emprisonnements arbitraires et injustifiés.Simon en fut une victime. L’homme était d’une générosité peu commune.Il avait le courage tranquille des gens qui ont raison, inébranlable dans sa foi.


Dans notre association l’Anziani pè l’Avenne, nous avons pu mesurer combien la pondération du sage qu’il était participait, sans mots inutiles, à tempérer les passions pouvant quelquefois altérer la raison.Son regard bienveillant ne l’empêchait pas d’incarner les fondamentaux.Avec ces qualités il a pu surmonter toutes les épreuves.Il a dû s’incliner devant la maladie.Il restera pour nous un modèle, une référence.


Nous partageons la peine de sa famille à qui nous renouvelons nos condoléances.
Chi a tò terra tì sìa légéra. Riposa in pace.


Qu’il nous soit permis d’associer à cet hommage deux des nôtres également disparus récemment : Jean Paolini et Jean Franceschetti et qui n’ont pas démérité dans ce combat pour la dignité et le droit à la vie.