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Le centre ancien de Bastia en pleine métamorphose


Philippe Jammes le Vendredi 5 Février 2021 à 08:59

Après Gaudin, la ville de Bastiaopère aujourd’hui des travaux dans le quartier Puntettu- Letteron. Des travaux de longue haleine qui vont progressivement changer les habitudes des Bastiais.
Piétonisation, réhabilitation, constructions de logements sociaux, une gare au Palais de Justice.
CNI s’est entretenu avec Emmanuelle de Gentili, 1ère adjointe au maire Pierre Savelli, déléguée à la politique de la ville, au renouvellement urbain et à la vie de quartiers et aussi en charge des affaires européennes et internationales.



Les travaux vont bon train rue du Colle
Les travaux vont bon train rue du Colle
- Après Gaudin, les travaux se poursuivent au Puntettu …
- Faisons tout d’abord un petit historique. Les travaux avaient été votés en 2012, donc sous l’ancienne mandature, avec le lancement du PNRQAD, Programme National de  Requalification  des Quartiers Anciens Dégradés,  mais avaient été freinés par la campagne électorale de 2014. A l’arrivée de Gilles Simeoni à la mairie de Bastia, nous avons voulu changer de stratégie. L’idée était de préserver davantage les éléments patrimoniaux. La Casa Montesoro du Puntettu était considéré comme un élément du patrimoine de la ville. Au lieu de démolir comme c’était prévu, on a souhaité rénover mais aussi conserver les habitants à l’intérieur du quartier. Quand on parle de grosses rénovations ça fait parfois peur et partir les gens qui n’ont pas les moyens de restaurer. Certains se voyant exclus ont même vendu leurs biens. Notre stratégie a donc été de faire rester les gens chez eux, travailler sur tout ce qui est patrimonialisation, développement économique. L’idée était de se réapproprier les bas d’immeubles, travailler à la circulation, d’aller vers une piétonisation car c’est une stratégie globale de la ville à long terme et donc de commencer avec les quartiers sur lesquels on intervenait fortement. On a voulu faire un lien avec la Citadelle et le reste de la ville….

- Ce qui n’était pas vraiment prévu dans le PNRQAD
Effectivement. Par exemple, malgré la construction du parking Gaudin on a souhaité maintenir l’école Gaudin qui avait vocation à disparaitre. Notre choix en 2014 a été de vouloir la reconstruire en lui donnant une autre ambition. Il a donc fallu renégocier à Paris car quand on change l’objet d’un programme  de requalification, on prend le risque de perdre les financements. On les a certes perdus d’un coté mais on a réussi d’un autre coté à les remettre pour des projets qu’on avait ajoutés comme celui de l’école. Sans financement au départ, on a tout remélangé et on a pu garder notre enveloppe et même faire plus de choses, tout en maintenant plus d’immeubles. On a démoli a minima et on est en train de reconstruire. Pour  la Casa Montesoro, la difficulté est venue du fait que ça ne rentrait pas dans les dispositifs connus. On dispose en fait de deux dispositifs : l’OPAH  (ndlr : Opération Programmée d'Amélioration de l'Habitat) pour les propriétés dégradées et l’OPAH Rénovation Urbaine. Or quand on faisait passer les dossiers dans ces deux dispositifs on s’apercevait que les gens ne recevaient que très peu d’aides. Il nous a donc fallu renégocier au niveau national et comme nous avions un bon bilan sur la consommation des crédits et sur l’aspect visuel de la ville qui se transforme, un 3ème dispositif a été accepté, intitulé Copropriétés en difficultés. Une sorte de mélange des deux OPAH. Grâce à ça, les personnes qui étaient dans cet immeuble ont pu bénéficier des crédits nécessaires pour rénover le bâtiment. C’est une réussite de notre première mandature d’avoir pu sauver le bâtiment et en même temps maintenir les personnes dans leur logement.

- Certains avaient pourtant déjà vendu leurs biens à la ville
Effectivement, avant notre arrivée en 2014, et alors que la démolition était prévue, la ville usant de son droit de préemption avait commencé à racheter les logements. Quand nous sommes arrivés aux affaires, et qu’on a décidé de ne plus démolir, on a proposé aux anciens propriétaires qui le souhaitaient, de racheter leur bien aux mêmes conditions. Certains ont accepté, d’autres non. Comme il y avait des logements vacants on les a proposés aux habitants du quartier en priorité puis à toute la population. L’idée étant de retrouver un maximum de propriétaires occupants pour développer la ville. Voilà pour un des éléments de ce PNRQAD.


- La suite, ce sont d’importants travaux 
- Par la suite, nous avons entamé dans ce quartier le traitement des sous-sols, le drainage du Guadellu, des eaux usées, la réfection de la place Vattalapesca. Il y avait en effet un fort taux d’humidité dans les caves des immeubles. Or on avait à cœur d’y créer des petits commerces ou des régies de quartier, que soit dans le collectif ou le privé. Ces travaux nous ont amenés à piétonniser la rue Letteron puis ceux-ci finis nous avons prolongé durablement cette piétonisation à la demande même des riverains qui avaient acquis de nouveaux usages. Cette piétonisation a apaisé le quartier qui était auparavant tendu, dangereux avec le passage de nombreuses voitures.  Donc finalement on s’aperçoit qu’on peut vivre autrement à Bastia.

- Les travaux en cours rue du Colle ?
- Nous avons depuis peu attaqué les travaux rue du Colle car c’est dans le projet initial. Ces travaux consistent à revoir le cheminement piéton, revoir l’utilisation des voitures. Pour cela il nous a fallu attendre l’ouverture du parking Gaudin et de ses 300 places. L’idée est de vider l’intérieur du cœur du Puntettu car il n’y a pas de raison qu’il y ait du stationnement en cœur d’îlot dans la mesure où les places sont rares et en deviennent presque privées. On souhaite donc ouvrir le quartier à plusieurs heures de la journée pour que les gens puissent circuler, livrer. Dans la rue du Colle nous allons mettre en place un peu plus que ce qui était prévu de stationnement arrêt minute pour que les gens puissent se garer entre 45 mn et une heure. Aujourd’hui la vie de quartier et le bien-être doivent prévaloir.


- Vers une piétonisation du Vieux Port ?
- On est en train de piétonniser le Vieux Port. L’idée c’est de rejoindre le Mantinum, la Citadelle via le Puntettu en y installant progressivement de petites activités artisanales ou de proximité. Cela demande bien sûr beaucoup de pédagogie avec les habitants du quartier. Rendre piétonne la zone du Puntettu c’est l’apaiser, la sécuriser, y amener une qualité vie.


- Le Spassimare ou encore L’Aldilonda semblent vous donner raison
- Tous nos projets comme le spassimare ou l’Aldilonda concourent à habituer les Bastiais à un autre mode de vie. Le succès de l’Aldilonda est en ce sens très encourageant mais ça passe par une politique des transports et du stationnement.


C’est peut-être là que le bât blesse ?
- Nous devons revoir la fréquence des transports et aussi une meilleure information sur ceux-ci. Par exemple, informer les usagers sur les retards des bus. Notre fil conducteur est d’une part, vivre et travailler à Bastia, et d’autre part, apaisement et qualité de vie. C’est un travail de longue haleine mais on sait que chaque petit morceau concoure à cette grande ambition.


- Et si nous parlions budget ?
- C’est un budget global. Il s’élève à 45 millions d’euros plus les financements Action Ville. Un projet global qui comprend aussi la construction de 70 logements sociaux dans la fameuse dent creuse causée par l’explosion due au gaz en 2005. Il a fallu tout d’abord procéder à la résorption de l’habitat insalubre, la réappropriation par la ville des lots sur lesquels il fallait intervenir. Sur ces 70 logements la plupart seront des logements sociaux, des PLAI, mais aussi des logements intermédiaires, des PLS, des accessions à la propriété et quelques logements libres. On reconstruit mais en conservant les éléments patrimoniaux.  Nous travaillons avec Action Logement qui nous aide à boucler l’opération qui au départ était une opération très déséquilibrée. Le permis de construire est en cours d’instruction et la livraison prévue avant la fin de notre mandat.

- On disait que Bastia se vidait
- Le fait de travailler sur tout ce tissu vivant nous a fait découvrir de nombreux logements vacants, un peu partout en centre-ville d’ailleurs. Plus on rénove, plus on améliore le quartier, plus on réduit la vacance dans ces rues car il y a une nouvelle attractivité. Aujourd’hui le centre ancien est une zone attractive et on la surveille pour éviter une forte spéculation. Nous travaillons par ailleurs à une toute nouvelle stratégie pour pouvoir remettre sur le marché un certain nombre de logements vacants en centre-ville. Je pourrai vous parler ainsi du POPAC, le Programme Opérationnel de Prévention et d’Accompagnement des Copropriétés.  C’est un programme qui en fait permet de travailler en amont, un travail de prévention aux dégradations et qui donc peut permettre d’éviter les lourdes opérations de restructuration. Le POPAC, ce n’est pas forcement des moyens financiers importants mais de l’accompagnement auprès des syndics, des habitants pour que les choses s’arrangent avant dégradations. On a du gérer des cas délicats, des litiges entre copropriétés qui avaient des locaux en commun par exemple. On doit faire preuve de diplomatie et on arrive parfois à rétablir des liens sociaux.  De toutes les façons on a vocation à faire des travaux partout afin que la ville soit équilibrée.

- Vous parliez à l’instant de l’opération Action Cœur de ville, une opération qui vous aide bien aussi
- A la différence du PNRQAD qui est très encadré, Cœur de ville est tres réactif et spontané. Si on a un projet sur la table et qu’on peut le rendre immédiatement opérationnel, l’argent est mobilisé. C’est ainsi qu’on a pu financer le projet du rond point du palais de justice. Un lieu stratégique, souvent engorgé. Aujourd’hui le rond point dessert mieux car on a ôté les emplacements bus pour les mettre ailleurs. Aujourd’hui on respire beaucoup plus malgré le parking et le vieux lycée.


- Et ce projet d’une station de gare au palais de justice ? 
C’est l’étape suprême, ça changerait complètement  la physionomie de la ville car cela permettrait de faire disparaitre les bus de cette zone. La voie ferrée passe en fait en dessous le garage qui se trouve derrière le bureau de tabac. La gare desservirait ainsi les établissements scolaires du quartier.  La place y est pour faire gare et accès. L’étude a été lancée au moins de novembre à la CdC.




Pour les piétons, création d’un accès confortable et d’un espace de 170 m² permettant d’entrer dans le quartier du Puntettu depuis le quai A. Gillio. Un espace de transition et de  halte, éclairé, aménagé et planté.
Pour les piétons, création d’un accès confortable et d’un espace de 170 m² permettant d’entrer dans le quartier du Puntettu depuis le quai A. Gillio. Un espace de transition et de halte, éclairé, aménagé et planté.