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La Collectivité de Corse prête à investir 400 000 euros aux enchères pour rapatrier la Madone de Brando


Thibaud KEREBEL le Dimanche 26 Février 2023 à 10:10

Superbe retable daté du 16e siècle, et commandé à l’époque par un couvent franciscain de l’île, la Madone de Brando va prochainement être mise en vente aux enchères. Depuis trois mois, la Collectivité de Corse est sur le pont, et travaille pour rapatrier cette oeuvre importante du patrimoine artistique insulaire.



« Ce tableau doit rester en Corse », « c’est dommage de vendre le patrimoine », « que ce tableau retourne dans une église de chez nous ! »… Depuis l’annonce, en milieu de semaine, de la prochaine vente aux enchères de la Madone de Brando, superbe peinture sur bois commandée par un couvent de l’île au 16e siècle, les réactions se sont multipliées sur les réseaux sociaux. De nombreux internautes, inquiets de la dispersion de l’héritage artistique corse, ont ainsi demandé, ou espéré, que des acheteurs locaux se positionnent sur l’affaire. Ils seront surement heureux d’apprendre que depuis plusieurs mois, la Collectivité de Corse (CDC) planche là-dessus.

« Nous avons été informés de cette vente en décembre dernier », explique Antonia Luciani, conseillère exécutive en charge de la culture et du patrimoine. « Et depuis, nous travaillons avec la Direction du patrimoine pour monter un dossier. Pour nous, il est primordial de faire rentrer cette œuvre dans les collections corses. » Cette démarche est loin d’être isolée. Les services de la CDC effectuent des veilles permanentes pour se tenir informés des différentes mises en ventes. « Quand on a une alerte sur un tableau, que l’intérêt patrimonial est considéré comme indispensable et que nous avons les moyens, nous nous positionnons systématiquement ! »

À titre d’exemple, la collectivité a acquis le Scudo d’Henri Matisse en 2019 -peint lors du séjour de l’artiste en Corse-, ou plus récemment le Prunelli di Fiumorbo de Maurice Utrillo. Des lettres, dessins, et même une porcelaine ont, entre autres, également été rapatriés par le biais de ces actions.

« Ça peut atteindre un prix assez conséquent, et c’est très dur à prévoir »

Dans le cas de la Madone de Brando, la tâche s’annonce corsée, au regard du prix annoncé par la maison de vente. Estimé entre 200 000 et 300 000 euros, le montant de ce retable pourrait s’envoler, en fonction de l’intérêt porté par des acheteurs extérieurs. « Ça peut monter bien au-dessus de la mise à prix », anticipe Sylvain Gregori, conservateur du musée de Bastia. « La Madone de Brando fait partie des peintures de la Renaissance italienne, ça ne court pas les rues. Il y a des musées américains qui collectionnent ce type d’oeuvres, il y a aussi des collectionneurs privés… Donc ça peut atteindre un prix assez conséquent, et c’est très dur à prévoir. »

À l’issue d’une concertation interne, la Collectivité de Corse a débloqué un budget de 300 000 à 400 000 euros pour se positionner lors de la vente aux enchères, qui se tiendra à l’Hôtel Drouot, à Paris, le 31 mars prochain. Consciente que l’affaire peut lui échapper, en cas d’investisseur concurrent, la CDC songe également à mettre en place un mécénat populaire, pour compléter l’enveloppe. « Cette politique, elle existe depuis des années », justifie Antonia Luciani. « Cela permettrait de répondre à l’engouement populaire autour de cette œuvre, et d'être certains que la Madone revienne chez nous. »