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Jean-Pierre Simoni : « Autobiographie d'un spermatozoïde »


Philippe Jammes le Dimanche 23 Mai 2021 à 16:45

Original, voici le parcours d’un spermatozoïde de nos plus lointaines origines jusqu’à un avenir plus rassurant. Ce parcours, cette atypique autobiographie nous est relatée par le docteur Jean-Pierre Simoni*, auteur déjà de 7 autres ouvrages**. Un périple touristique à l’intérieur de cette cellule de cinq millièmes de millimètre sans laquelle personne n’existerait. CNI a plongé dans l’infiniment petit….




Dans ce livre, édité par Les Presses du Midi, illustré et documenté pour une compréhension facilitée, à chaque paragraphe, l’infiniment petit rayonne immensément.  Un ouvrage truffé de références scientifiques, de précisions, de mises en garde aussi de l’auteur qui a répondu à nos questions


Le style de ce livre peu commun ?
Je reconnais la difficulté, pour des profanes, de décrypter la langue «étrangère» scientifique. C'est pour cette raison que j'ai choisi de la traduire en «français courant». Le style du livre renoue donc avec le genre "roman scientifique" tombé en désuétude, puis ressuscité de ses cendres grâce au Covid 19. Depuis la pandémie, sur 70 millions d'habitants, la France compte 2/3 d' infectiologues à l'heure de l'apéro. Ce constat m'a conduit à utiliser un vocabulaire hybride alliant un imaginaire romanesque prenant appui sur des béquilles scientifiques indiscutables. 


- Pourquoi ce titre ?
- «La métamorphose» de Franz Kafka, s'identifiant à un cloporte, m'avait fortement impressionné lorsque j'étais pensionnaire au lycée Marbeuf de Bastia. J'ai osé encore plus microscopique en me réincarnant dans un spermatozoïde d'à peine 5 microns de diamètre et toujours prêt à féconder l'ovocyte aux dimensions comparables. Cette métempsychose nous ramène à l'infiniment petit de nos origines les plus lointaines : de 13 à 3 gigaannum, sachant qu’1 ga équivaut à 1 milliard d'années. J'ai choisi d'organiser ces chapitres à partir de l'époque où notre terre était percutée par des astéroïdes géants et des planètes chargées de glaces, de sels minéraux, d'acides aminés et de ribose 5 phosphates constituants essentiels de nos ADN. 


- Comment l'idée d'écrire ce livre vous est-elle venue ?
- Dans une vie antérieure j’étais médecin généraliste dans les collines de Pagnol. L’idée d’une «Autobiographie d'un spermatozoïde» naquit le jour où, dans les tiroirs sonnants et trébuchants d’une vieille commode, je découvris six revues de «L’ Ère Nouvelle » datées de 1983. Du numéro 27 au 31 dans lesquels j’avais rédigé cinq articles intitulés «Essai sur l'immortalité». C’est en me relisant que j’éprouvais comme une renaissance. Je fus surpris de retrouver l’esprit d’investigation qui n’a cessé de m’animer ma vie durant. Un tiers de siècle a passé ; l'adaptation de la forme aux canons de la révolution numérique s'est imposée d'elle-même.  Les changements climatiques, y compris l'intrusion de ce Covid-19 mesurant seulement 1/20.000ème de micron, m'ont poussé à reprendre la plume sans jamais éprouver l’angoisse de la feuille blanche.


- Quel message voulez-vous faire passer ?
- J’ai toujours eu la certitude qu’avant de naître je n’étais pas tout à fait mort ; plus précisément programmé depuis la nuit des temps soit 45 milliards d’années. Nous émergeons, donc, d’un mystère désormais élucidé ; nous y retournerons tant que nos descendants procréeront.  Ce livre s'inscrit dans la lignée des romans scientifiques. Le spermatozoïde unicellulaire généalogique de nos ADN, sur 150 millions de prétendants, s’agitant à vue dans un océan d’incertitudes liquidiennes, féconda par hasard un ovule qui déambulait dans le 1/3 inférieur d’une trompe utérine maternelle. Soudainement zygote, puis embryon barbotant dans des sérosités amniotiques, nous avons muté après quelques semaines en fœtus aux formes vaguement humanoïdes. Les gesticulations de nos quatre membres nous encouragèrent à tourner en rond, tel l’écureuil dans sa cage. Comme vous, je m’imaginais accoster sur une île au trésor, déserte, improbable, prometteuse d’une terre sphérique à la Galilée. Juste le temps de m’habituer à l’immersion d’un scaphandrier de mille et une lieues sous la mère que la paroi utérine entreprit de m’expulser. De vastes lames de ciseaux, actionnées par de gigantesques doigts gantés de latex, sectionnèrent net le cordon artérioveineux de mes autonomies abyssales pour faire de moi un SDF migrant d’une poitrine à l’autre. Indifférent au vacarme flagornant je m’appliquais à  téter un tendre mamelon tout en comprimant l’autre de crainte de perdre mes uniques bouées de sauvetage. Deux brefs changements supplémentaires de sauf-conduits, sur les trois premiers périmés, me promulguèrent bébé, puis enfant, en m’affublant d’un prénom administrativement dactylographié. Parmi tous les messages que je voudrais faire passer, j'ose cette citation de Gustave Flaubert : «Mon individu est le résultat de mes individualités disparues ... bien des choses s'expliqueraient si nous pouvions connaître notre généalogie véritable». Le message subliminal issu de ces 140 pages étant de ne pas oublier d’où l’on vient.

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* Jean-Pierre Simoni sera présent à la journée littéraire de Campile, le 29 mai.
**Bibliographie
Opuscule sur l’immortalité, essai 1983, revue « L’ère nouvelle ».
L’année des Chemises noires, roman historique, 2005 Albiana.
Le caïman noir, 2009, thriller, Durand Peyroles.
Le manchon noir, 2011, roman, Durand Peyroles.
L’asymptote du rajeunir, roman médical, 2013, Durand Peyroles.
Noir d’ivoire, thriller, 2016 Sudarènes.
Djihâd Chiche-Kebab Connexion, 2018 www.publilivre.fr
Autobiographie d'une spermatozoïde, 2021, Les Presses du Midi