
Pendant cette nuit, les mazzeri livrent bataille, influençant l'avenir de leur communauté. Sur les crêtes et les cols, en pèlerinage, ces guerriers nocturnes s'affrontent armés d'asphodèles. Cet affrontement symbolise les rapports de force entre différentes communautés face à la mort. Le mazzeru ne se bat jamais seul mais pour le commun. "Ils procèdent à une sorte de procession profane, sans le côté dogmatique. Les mazzeri, lors de leurs rêves, quittent leur enveloppe charnelle et côtoient le monde des morts. Ce sont des psycopompes. On dit que chaque village a ses mazzeri, et souvent lors des combats, ils allumaient de grands feux dont la direction de la fumée, au matin, présageait le futur selon le village vers lequel elle se dirigeait." détaille la chercheuse.
Messagers du monde des esprits : les rêves des mazzeri
Le mazzeru rêve des vérités cachées. De ses rêves proviennent des révélations, des signes qu'il interprète à travers des symboles, des contextes et des personnes. "Lors de ses rêves, le mazzeru tue un animal qu'il transporte à un point d'eau. L'eau est considérée comme la voie qui relie les mondes visible et invisible. Le visage de la personne qu'il voit alors est un mauvais présage," précise Anghjulina. "Le mazzeru n'est pas un tueur, il accompagne les âmes. Son arme est l'asphodèle, une plante qui pousse à l'ombre et dans des sols pauvres, symbolisant la mort et l'immortalité. Elle pousse en champs, jamais seule."
Ces individus, capables de percevoir des vérités cachées à travers les rêves, sont respectés et craints. Bien que profondément ancrés dans la tradition corse, les mazzeri ont vu leur représentation évoluer dans la culture contemporaine. Aujourd'hui, ils attirent l'attention des chercheurs, artistes et écrivains intéressés par la spiritualité et les croyances populaires. L'exploration de ce phénomène contribue à la préservation de cette tradition unique.
Cependant, la modernité et la mondialisation posent un défi à ces croyances ancestrales. Les jeunes générations, tournées vers la technologie, risquent de se détourner de ce patrimoine culturel ancien. Néanmoins, pour les plus sceptiques, il est conseillé de passer une nuit sur un col ou une crête à la rencontre de l'extraordinaire.