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Femu a Corsica demande trois signes forts au gouvernement et lance un appel à la mobilisation


Nicole Mari le Vendredi 6 Août 2021 à 20:18

C’est un appel à la mobilisation du peuple corse que lance Femu a Corsica afin de faire aboutir les revendications politiques des Nationalistes. Revenant sur la victoire aux territoriales, le parti majoritaire dénonce le blocage « inquiétant » de l’Etat et la « stratégie guerrière » du Préfet. Il demande au gouvernement de changer de méthode et de donner des signes forts en matière de rapprochement des prisonniers politiques et d’avancées législatives. Il annonce plusieurs rendez-vous, dont la commémoration d’Aleria le 22 août, une université politique avec la démarche Fà Populu Inseme en septembre, et un congrès en fin d’année.



Elus et militants de Femu a Corsica à Bastia.
Elus et militants de Femu a Corsica à Bastia.
« Les Corses ont parlé clairement lors des élections territoriales de juin, l’Etat doit le prendre en compte et donné des signes forts sur des points clés ». C’est le message qu’a tenu mercredi, à Bastia, juste avant la trêve estivale, Femu a Corsica, clôturant ainsi une année politique intense et victorieuse tout en avançant ses pions pour la rentrée prochaine. Le parti nationaliste modéré a gagné haut la main le scrutin de juin assurant au président de l’Exécutif corse, Gilles Simeoni, la majorité absolue à l’Assemblée de Corse. C’est la première fois depuis 40 ans qu’une liste, en l’occurrence Fà Populu Inseme, obtient la majorité absolue sans faire d’alliance. « Les élections ont confirmé le large ancrage, au sein de la société corse, des idées portées historiquement par les nationalistes, avec 68% des suffrages exprimées au 2nd tour. Avec un taux de participation avoisinant les 60%, le plus élevé, et de loin, de toutes les élections régionales en France, ce score ne peut souffrir d’aucune ambiguïté, d’aucune contestation, d’aucune critique en légitimité démocratique quant au sens du vote exprimé par le peuple corse durant ce scrutin majeur », rappelle le député de la 2ème circonscription de Haute-Corse, Jean-Félix Acquaviva. « Ce score sans précédent est aussi un message clair : les Corses ont validé, d’une part la conduite des affaires de la Corse par le président de l’Exécutif sortant, et d’autre part une démarche équilibrée et dynamique ».

Le chemin de l’autonomie
La victoire de juin démontre surtout, déclare le Secretariu Naziunale de Femu, que « les victoires précédentes n’étaient pas un accident de l’Histoire, mais la manifestation résolue et déterminée d’une volonté des Corses d’aller vers un changement politique profond, une révolution démocratique et pacifique centrée sur des objectifs contractuels clairs ». Et d’énumérer : la reconnaissance de notre peuple et de ses droits fondamentaux, l’accession à une autonomie de plein droit et de plein exercice, le rapprochement et la libération des prisonniers conformément au Droit, la maîtrise d’un développement durable et équilibré, la justice sociale, la lutte contre la spéculation foncière et immobilière, la démocratie, la probité, la prééminence de l’intérêt général, le refus des pratiques clientélistes et des dérives mafieuses... « Femu a Corsica, en tant que parti politique ouvert sur la société corse, et Fà Populu Inseme à travers le Président du Conseil exécutif et son équipe, le groupe à l’Assemblée de Corse s’engagent à être les garants de ce chemin contractuel… », mais aussi « d’accélérer le pas des concrétisations d’une autonomie de fait… » pour « aboutir à une solution politique globale ».

Un comportement inquiétant
Cette solution ne peut s’amorcer qu’avec un changement de méthode de Paris envers le pouvoir nationaliste. Et c’est loin d’être gagné ! Pour le Chef de l’Etat, comme pour son Premier ministre, « La Corse n’est pas un sujet ! », selon le mot de Jean Castex. « Aucun signe tangible de changement de méthode et de braquet n’est intervenu pour l’heure de la part du gouvernement quant à l’initiation d’un dialogue politique à la hauteur des enjeux. Pire encore, depuis notre victoire, l’attitude de l’État et le comportement de son représentant dans l’île sont des plus inquiétantes ! D’un côté, on laisse entendre que l’on prend en compte le résultat clair des élections. De l’autre, au mieux, faute de méthode et de réactivité, au pire du fait de l’agissement de certains faucons à Paris qui ont libre cours par manque de cap clair concernant la Corse, on laisse des actes et agissements belliqueux et incendiaires se développer », commente Jean-Félix Acquaviva. Dans le viseur des Modérés, la décision du Parquet antiterroriste de faire, une fois de plus, appel du jugement autorisant la libération conditionnelle de Petru Alessandri. « C’est l’application d’une scandaleuse vengeance d’Etat qui ne se cache même plus ! Vengeance d’Etat dénoncée jusque dans les rangs de l’actuelle majorité présidentielle par le député de l’Eure, Bruno Questel ».

Une stratégie guerrière
Femu dénonce également la « stratégie guerrière » du Préfet de Corse qui « outrepasse ses prérogatives, notamment quand il bloque le versement de 30 millions € de Dotation de Continuité Territoriale sous le motif qu’il veut avoir un droit de regard sur la nature des investissements. Quand il continue de faire le tour des communes et intercommunalités avec des propositions de contrats PTIC sans associer la Collectivité de Corse, ni débattre des choix des projets et infrastructures, cela en contradiction totale avec les propos de Mme Gourault lors de sa dernière visite en Corse au printemps dernier. En changeant de règle de financement pour ramener, de fait, la participation de l’Etat à 30% » contre 70% prévus initialement. « Quand enfin, de manière assez étrange et nauséabonde, rappelant la manière manipulatoire utilisée à l’époque par le Préfet Bonnet pour créer les conditions d’un affrontement entre Corse, l’actuel Préfet refuse des AOT dans la région de Carghjese à des militants nationalistes connus, alors que ces AOT sont attribués, de manière régulière, depuis 31 ans par les services du Domaine public maritime et qu’ils ne contreviennent absolument pas au PADDUC ». Une décision que Femu qualifie « de large partialité, au premier motif ubuesque de « trouble à l’ordre public », alors même qu’une des structures a été victime d’un incendie volontaire en avril. Ces agissements préfectoraux à la tête du client ont sans conteste une dimension politique. Ils sont aussi dangereux ! ». Un Préfet dont les Nationalistes, toutes tendances confondues, espèrent le départ avant que la situation, déjà très tendue, ne dégénère.

De la pédagogie
Autre point négatif : le traitement de la crise sanitaire par le gouvernement et la stigmatisation dont sont victimes les personnels soignants qui « sont de nouveau obligés de mettre en place un Plan blanc, faute de moyens alloués aux hôpitaux ». Femu a Corsica prône une gestion de proximité, conjointe avec la Collectivité de Corse et décentralisée, misant sur la pédagogie active. « Le préfet a fait de nouvelles annonces sans véritable coordination. Il faut s’appuyer sur les réseaux de proximité, les médecins libéraux, les pharmaciens, les unités hospitalières et cliniques. Les menaces de suspension de salaires, voire de licenciement, sont indécentes, ainsi que toutes les atteintes peu proportionnées aux libertés fondamentales. Il faut convaincre et non contraindre. Il faut rassembler et non cliver, et surtout répondre en termes de moyens de politiques de santé, ce qui n’a pas été le cas ! ». Autre point de tension : la décision d’obliger les étudiants corses en Sciences de l’éducation de faire leur stage de Master 2 sur le continent, et d’envoyer, à leur place, des étudiants du continent faire leur stage sur l’île. « Nous sommes solidaires des étudiants qui refusent cela, ils font leur master en Corse et ont vocation à revenir en Corse. C’est donc une mobilité contrainte. Cela peut paraître un détail, mais n’est qu’une manifestation de plus de la volonté jacobine du gouvernement en Corse », précise Jean-Félix Acquaviva.

Trois signes forts
Ces faits « inquiétants » actés, le parti majoritaire prévient solennellement le gouvernement « de changer clairement et rapidement de méthode ». Il demande trois signes politiques forts immédiats. En premier lieu, le rapprochement et la libération conditionnelle des prisonniers politiques, conformément au droit, et ce, avant la fin de l’année : « On ne peut plus continuer comme ça ! », assène le député de Haute-Corse. Deuxième signe : un transfert de compétences dans le cadre de la Loi 4D, examinée en septembre au Palais Bourbon : « On peut avancer par paliers, notamment au niveau des moyens de lutte contre la spéculation foncière et immobilière. Le gouvernement a la possibilité d’ouvrir avec nous des discussions pour trouver des solutions et les traduire d’un point de vue législatif dès octobre dans la Loi 4D ». Le troisième signe fort pourrait être donné dans la prochaine Loi des finances par des solutions fiscales « prémices d’un statut fiscal et social adapté à l’insularité pour les entreprises. Même si elles sont imparfaites, ce seraient déjà des avancées pour sortir de la crise économique liée à la crise COVID ».

Un appel à la mobilisation
Deux rendez-vous législatifs qui augurent d’une mobilisation accrue à la rentrée. Dès le 22 août, Femu a Corsica appelle les Corses à « s’associer aux commémorations des événements d’Aleria aux côtés de l’association Aleria 75 et de tous ceux qui ont participé à la prise de la cave Depeille, et au-delà, à l’éveil des consciences dans les années 60 et 70. Ces commémorations revêtent une dimension symbolique et politique particulière au regard du rapport actuel à l’Etat et au lendemain de la troisième élection territoriale consacrant de manière démocratique les demandes claires du peuple corse vis-à-vis de Paris ». En septembre, le parti organisera avec la démarche Fà Populu Inseme une université politique « dans le but de déployer une action d’investissement du terrain politique et sociétal complémentaire de l’action institutionnelle ». En décembre se tiendra le Congrès du parti avec au programme le renouvellement des instances et l’actualisation de sa feuille de route stratégique. « En attendant ces rendez-vous majeurs, notre plus grand souhait est de voir, enfin, bouger les lignes pour un dialogue clair, respectueux et fructueux, permettant de réinscrire la question corse dans sa dimension symbolique et historique, au service d’une solution politique globale pour notre île ».

N.M.