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DOSSIER. Plus de la moitié des communes de Haute-Corse concernées par l’amiante environnemental


le Dimanche 22 Janvier 2023 à 18:33

Depuis une vingtaine d’années, les travaux du Bureau des Recherches Géologiques et Minières ont mis en évidence la présence de roches amiantifères sur 139 communes du département, principalement situées dans le Cap Corse, le Nebbiu et la Castagniccia



Amas de fibres flexueuses d'amiante naturel en Haute Corse (Crédit photo : BRGM - Didier Lahondère)
Amas de fibres flexueuses d'amiante naturel en Haute Corse (Crédit photo : BRGM - Didier Lahondère)
Depuis les années 1970, les risques de maladies graves liés à une exposition à l’amiante n’ont cessé d’être démontrés. S’ils sont la plupart du temps corrélés à une activité professionnelle dans le bâtiment, ces risques peuvent aussi concerner les personnes vivant à proximité d’affleurements d’amiante environnemental, même si ceux-ci ne constituent pas une menace tant que les fibres ne sont pas libérées.
 
De par sa géologie, le département de la Haute-Corse est très concerné par la présence de massifs de roches contenant ou susceptibles de contenir de l’amiante. Une caractéristique qui a donc conduit l’Office de l’Environnement de la Corse à missionner le Bureau des Recherches Géologiques et Minières (BRGM) pour établir une cartographie recensant les principales zones amiantifères en Corse en 2009. 
 
« L’amiante correspond à une substance minérale qui fait référence à six variétés spécifiques. La première, qui est la plus connue et la plus répandue, s’appelle le chrysotile. Cela correspond à 90% de l’amiante qui a été exploité et avec lequel on a créé des matériaux industriels. Ensuite, on a cinq autres variétés d’amphiboles que l’on appelle actinolite-amiante, trémolite-amiante, anthophyllite-amiante, crocidolite et amosite », explique Charlène Coutin, géologue régionale au BRGM à Bastia, chargée des travaux géologiques sur l’amiante dans l’environnement naturel, en développant : « En Corse, on trouve beaucoup le chrysotile qui est présent dans les serpentinites, et ensuite on retrouve deux variétés d’amphiboles assez répandues qui sont l’actinolite et la trémolite amiante. Ces minéraux fibreux peuvent être localement présents dans des roches comme les métabalsates ou les métagabbros de Haute-Corse, le plus souvent le long de fissures ouvertes parcourant la roche ». 

139 communes de Haute-Corse possèdent des minéraux amiantifères sur leur territoire

« La Haute-Corse se démarque par l’importance de roches métamorphiques issues de la croûte océanique. Cela en fait une zone où les roches qui pourraient être concernées par ce risque amiante sont en proportion assez notable », reprend-elle. Ainsi, sur les 236 communes du département, 139 possèdent des zones où l’on retrouve des minéraux amiantifères, principalement situées dans le Cap Corse, mais aussi sur « une bordure qui part du Sud de Bastia et qui englobe l’Ouest de la Castagniccia et qui descend jusqu’à la Plaine Orientale ». « Ces communes n’ont pas toute un niveau de sensibilité très fort, mais il y en a quand même plus d’une centaine où l’on sait qu’il y a des roches de type serpentinites qui contiennent effectivement des fibres d’amiante », précise la géologue. « On peut voir ces roches affleurer au bord des routes ou sur des sentiers en montagne, cela dépend vraiment du contexte. Et on sait qu’il y a au moins une trentaine de communes où il y a des roches assez proches des habitations », relève-t-elle encore. 
 
Afin d’avoir des cartes les plus précises possibles sur la présence de ces roches, le BRGM n’a cessé d’enrichir ses données au fil des années. « Nous avons commencé un travail de cartographie pour acquérir des données sur les formations géologiques avec des communes assez emblématiques comme Murato, Bustanico, ou Corte », indique Charlène Coutin en ajoutant que ces travaux se sont aussi intéressés au grand Bastia, à quelques communes du Nebbiu, au Cap Corse, et au secteur de Ponte-Leccia. « Nous avons étudié en détail une cinquantaine de communes. Les données sont toutes publiées dans nos rapports disponibles en ligne », souligne-t-elle. « À partir du moment où il y a des enjeux de type habitations, voirie, réseau ferrée, et donc de potentiels travaux, c’est intéressant de pouvoir avoir ces cartes, puisqu’aujourd’hui il y a un cadre législatif lié à la loi El Khomri qui impose un repérage avant travaux sur les sols qui contiennent de l’amiante. Les données du BRGM permettent donc de cibler ces zones », expose-t-elle.

La Corse-du-Sud bien moins concernées par le risque d’amiante environnemental

Le BRGM a par ailleurs lancé un travail sur la Corse-du-Sud, territoire où la présence de roches amiantifères est bien moins notable. « Le contexte est différent. Ce sont principalement des roches plutoniques, plus anciennes. La minéralogie des roches n'est pas la même qu'en Haute-Corse et moins favorable à la présence de minéraux fibreux. Nous sommes en train de continuer nos travaux sur la Corse-du-Sud pour localiser ces éventuelles occurrences, mais le département est effectivement beaucoup moins concerné. On relève plutôt des zones filoniennes, donc de toutes petites surfaces, alors qu’en Haute-Corse on peut avoir des kilomètres carrés entiers concernés par la présence de roches comme la serpentinite », conclut la géologue du BRGM.




Savoir + : Toutes les données relatives à l’amiante environnemental relevées par le BRGM sont disponibles sur son site Internet
 

Carte de l'aléa de la présence d'amiante sur la Haute-Corse (Crédits : BRGM - Jéromine Duron, Didier Lahondère, Florence Cagnard)
Carte de l'aléa de la présence d'amiante sur la Haute-Corse (Crédits : BRGM - Jéromine Duron, Didier Lahondère, Florence Cagnard)