Corse Net Infos - Pure player corse

Corte - Pierre Ghionga : « les raisons de ma démission du groupe Un Soffiu Novu"


Mario Grazi le Jeudi 6 Juillet 2023 à 16:45

Ancien conseiller général de Corte de 2002 à 2017, conseiller exécutif de 2010 à 2015, en charge de la langue corse et président de l’OEC (Office de l'environnement de la Corse), élu sur la liste Un Soffiu Novu de Jean-Martin Mondoloni en 2017, le docteur Pierre Ghionga, à l’inverse de son groupe, a voté, mercredi lors de la session extraordinaire de l'assemblée de Corse, la motion sur l’autonomie de la majorité territoriale. Il a également démissionné du groupe de droite. Explications...



Pierre Ghionga (Photo Mario Grazi)
Pierre Ghionga (Photo Mario Grazi)
- Vous avez participé durant 48 heures à la rédaction de la motion sur le statut d’autonomie de la Corse, à l'inverse de votre groupe. Pourquoi ?
- Dans le cadre de l’accord municipal entre la droite et la gauche, je me suis retrouvé sur la liste de Jan-Martin Mondoloni aux dernières élections territoriales, sans pour autant être de droite. Et c’est bien là le problème, je pense. J’ai toujours dit que j’étais autonomiste, mais pas nationaliste. Je m’explique. Je conçois l’avenir de la Corse autonome uniquement dans la République française et dans l’Europe. Je n’ai jamais varié. Et au moment de la rédaction de la motion commune, la notion d'autodétermination souhaitée par certains n’y figure pas, en revanche, la notion que je défends y figure. Quitte à revoir notre copie dans quelques années. Et quelque part, la motion adoptée est un peu la mienne.


- Quels sont les points spécifiques que vous avez défendus ?
- Nous affirmons en préambule la reconnaissance du Peuple Corse, la cooficialité de la langue et le statut de résident, en gros. Et surtout le titre 12-bis de la Constitution disant : la Corse est une région autonome de la République française. Ensuite, nous avons mis en avant la loi organique qui va décliner toutes les compétences. Et là, nous transférons pratiquement tout à la CdC sauf tout ce qui est régalien comme l’armée, la police, la justice, etc. Dans ces compétences, la Corse aura le droit de légiférer sans pour autant aller à l’encontre de la Constitution française. Nous avons également demandé à ce qu’il y ait un fonds de rattrapage du handicap, ce que certains nationalistes ont appelé le rattrapage historique par le passé. J’ai trouvé que c’était un beau texte, charpenté, sur lequel tout le monde a fait des efforts.


- Vous avez eu un coup de gueule contre le chef de file de votre groupe au moment du vote. Pensez-vous qu’Un Soffiu Novu a été trop frileux ? Que Jean-Martin Mondoloni n’a pas été clair avec ses colistiers ?
- Je pense qu’il n’est pas favorable à l’autonomie de la Corse en réclamant simplement le pouvoir d’adaptation législatif. C’est en fait ce que nous avons aujourd’hui et qui ne sert à rien. Je n’en dirai pas davantage. Et j’ai donc annoncé en séance que je quittais le groupe.


- Pourtant, vous avez voté la motion de la majorité, mais également celle de votre groupe. Pourquoi ?
- Effectivement. J’ai eu un double vote. Le premier totalement politique, en faveur de l’autonomie de la Corse, et le second vote était celui de la fidélité. Mais pour ne plus avoir à faire ce grand écart, car cela me gêne intellectuellement, j’ai annoncé en séance que je quittais sereinement le groupe en gardant toute mon amitié à mon groupe. Mais attention, je n’attends rien et ne veux rien de la majorité. Je ne me suis pas vendu à Gilles Simeoni. Je vais siéger seul sur les bancs de l’Assemblée de Corse. Je serai un membre de l’opposition et ferai mon travail d’élu, libre, en fonction de mes convictions. Dans mon discours je me suis réclamé de Paul Giacobbi, de François Orlandi, de Pierre Chaubon, de Claude Olivesi et de Maria Guidicelli. J’aimerais retrouver ces courants de pensée à la CdC. Je suis aujourd’hui dans l’opposition à la gestion de la CdC, mais je suis dans la majorité qui demande l’autonomie de la Corse.


- Comment a été perçue votre démission par votre groupe ?
-  J’ai fait les choses proprement. J’ai expliqué ma décision aussi à Laurent Marcangeli et Valérie Bozzi. J’ai beaucoup de peine pour elle car au moment où je n’avais plus aucun mandat, c’est elle qui est venue me chercher.


- Vous avez souvent évoqué l’autonomie lors de vos campagnes électorales et prenant l’exemple du statut des landers allemands. Ce serait selon vous l’exemple à suivre et à appliquer pour la Corse ?
- J’ai effectivement travaillé sur le sujet. J’ai même demandé, lors de nos discussions ces dernières 48 heures, le transfert de la compétence santé en totalité et de l’assurance maladie en copiant le modèle rhénan, comme en bénéficient l’Alsace et la Moselle. La Sécurité sociale est autonome et elle est financée par une part salariale, payée par l’employeur, et la collectivité rajoute une part salariale qu’il n’y a pas sur le reste du territoire. Un patient qui va chez un médecin est remboursé à hauteur de 17,50 euros, sur les 25 euros de la consultation. En Alsace et en Moselle le même patient sera remboursé 22,50 euros, cela fait que la mutuelle est beaucoup moins chère . C’est un exemple à étudier.


- Sur le plan local, cortenais donc, cette union de la droite et de la gauche ne risque-t-elle pas de voler en éclat ?
- Non. Je n’ai plus d’ambition locale. D’ailleurs dès 6 heures ce jeudi matin j’ai téléphoné au maire de Corte, le Dr Xavier Poli pour lui expliquer ma décision. Nous avons discuté longuement. J’ai été clair avec lui et il n’y a aucun problème entre nous.