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Conseil municipal de Bastia : Nouvelle polémique sur le 5 mai


Nicole Mari le Mardi 7 Mai 2013 à 00:45

Les matchs du 5 mai, le Puntettu, le relogement de la communauté manouche… Trois sujets de polémique qui ont, finalement, fait long feu à la session mensuelle d’un Conseil municipal très suivi, lundi soir à Bastia. Au final, rien de nouveau sur les deux premiers points, des postures figées sur un fond sonore attendu, répétitif et stérile. Le revirement de la municipalité sur le 3ème point a donné lieu au plus vif incident de séance.



Le 1er adjoint, Ange Rovere, et le maire, Emile Zuccarelli lors de la séance du Conseil municipal de Bastia
Le 1er adjoint, Ange Rovere, et le maire, Emile Zuccarelli lors de la séance du Conseil municipal de Bastia
On aurait pu penser le sujet consensuel au lendemain d’une commémoration qui a rassemblé toutes les étiquettes politiques autour d’un dramatique souvenir, mais, comme chacun sait, le consensus ne siège guère au conseil municipal de Bastia entre majorité et opposition. Le 5 mai n’a pas dérogé à la règle et est venu émailler de joutes verbales, le début et la fin de cette séance post-5 mai.
 
Pas d’urgence
Dès l’ouverture des travaux, arguant « d’une situation exceptionnelle », Gilles Simeoni demande à Emile Zuccarelli de prendre en compte la lettre ouverte d’Inseme per Bastia sur le 5 mai proposant, notamment, 1 minute de silence préliminaire. Refus tout net du maire qui assène : « J’ai bien reçu votre lettre, j’y ferai droit au moment venu. L’ordre du jour a été donné. Le 5 mai, c’était hier. Aujourd’hui, c’est le 6. Il n’y a plus d’urgence ». Devant les protestations du leader nationaliste, il réplique : « Ce sont des arguties. Vous troublez la séance. Respectez la dignité de ce conseil ». Le public venu en nombre proteste, ainsi que les deux porte-paroles du Collectif du 5 mai, Lauda Guidicelli et Didier Grassi, assis au premier rang. En vain. Le maire ouvre, d’autorité, la séance sur l’ordre du jour prévu.
 
Des positions figées
L’initiative d’Inseme per Bastia tournant court, on aurait pu croire le sujet clos. Mais, difficile à quelques mois des prochaines élections municipales, devant un public fourni, d’en rester là. Emile Zuccarelli a, donc, tenté de reprendre la main en rebondissant sur la lettre avant la clôture de séance. Comme à son habitude, il n’est pas question pour le patron de la majorité municipale de laisser l’avantage à son adversaire. Et comme d’habitude sur le chapitre du Sporting et de Furiani en particulier, du football corse en général, les deux positions se sont révélées figées et inconciliables. Néanmoins, l’opposition nationaliste a pu finalement s’exprimer.
 
Deux gestes forts
Rappelant la catastrophe du 5 mai 1992, l’émotion, les blessures toujours vives et les « promesses violées » des responsables politiques et sportifs, Gilles Simeoni s’indigne devant le mépris affiché. « Hier encore, alors que nous nous recueillons devant la stèle, 3 matchs de Ligue 1 ont été programmés. Le PSG s’apprêtait, dans l’indécence, à festoyer alors que nous pleurions ». Le leader d’Inseme prône, une nouvelle fois, « une réaction forte et publique de la ville de Bastia » avec deux « gestes forts ». Considérant que Frederic Thiriez, à la fois président de la ligue et avocat de la CAB (Communauté d’agglomération de Bastia) se retrouve pris « dans un conflit d’intérêt », il demande à la CAB de le récuser. Il propose, ensuite, d’adopter une délibération réclamant au gouvernement et à la LFP qu’aucun match officiel ne soit joué un 5 mai et « que ce jour soit consacré au recueillement et à la réflexion sur les valeurs et l’éthique du sport ».
 
Une fin de non-recevoir
La réponse d’Emile Zuccarelli est une fin de non-recevoir nette qu’il habille du couplet habituel de « l’effort colossal que la Ville de Bastia, avec le soutien de la CAB, a fait, et que rien ne nous obligeait à faire, pour que le stade soit reconstruit dans des conditions très coûteuses ». Le maire de Bastia est clair : « Ce que vous me demandez aujourd’hui, je ne le ferai pas dans l’intérêt du club, du football corse, des jeunes et des victimes. Je n’ouvrirai pas une guerre avec la Ligue ». Pour lui, pas question de contraindre « la France entière du football et même l’Europe entière du football » qui sont libres de leurs décisions. Il estime que la voix de l’île « a été en partie entendue puisque il n’y a pas de match en Corse ce jour-là et qu’il y a des moments de recueillement sur le continent ». Le premier édile a, au final, concédé 1 minute de silence mais « pas quand vous le demandez », dira-t-il à l’opposition. Elus et citoyens se lèvent, alors, pour se recueillir.
 
La peur manouche
L’autre point de friction, qui a viré à une joute verbale assez vive, concerne le relogement définitif de la communauté manouche installée depuis 30 ans dans une cité de transit sur la zone d’Erbajolo. Le lieu initialement prévu ayant déclenché une forte opposition, la municipalité a été obligée de faire marche arrière et d’acquérir un autre terrain de 6700 m2, comme le demandaient les riverains relayés par Inseme per Bastia. Voulant justifier le revirement de la mairie, Ange Rovere a mis le feu aux poudres en accusant l’opposition nationaliste d’avoir instrumentalisé la polémique lors de l’enquête publique. « Le commissaire enquêteur a été choqué et s’est refusé à transcrire des propos qui font penser à une littérature qui ressemblerait à Mein Kampf. La communauté manouche a eu peur que cette violence verbale ne dégénère en violence physique. C’est la raison profonde qui a motivé notre décision ».
 
Vrai ou faux
Riposte immédiate et indignée de Gilles Simeoni : « Soit ce que vous dites est vrai et c’est très grave. Il fallait, alors, l’écrire dans le rapport et organiser une réunion pour en discuter sur la place publique. Soit c’est faux, comme nous le pensons, et votre argumentation est scandaleuse. Ce que vous dites est écrit nulle part. Je n’ai vu qu’un rapport qui a émis un avis favorable mais assorti de telles réserves qu’elles empêchaient le dossier d’aboutir ». Il enfonce le clou : « Vous acceptez d’entériner des choix dictés par la menace ? ».
Réplique d’Ange Rovere : Nous faisons un choix dicté par l’intégrité ». Le ton monte.
Emile Zuccarelli, qui s’était absenté, revient à temps pour jeter de l’huile sur le feu en accusant Inseme d’avoir, à travers notamment la pétition, « surfer sur cette peur ».
Gilles Simeoni bondit, furieux : « Qui a laissé la communauté manouche vivre dans des conditions lamentables pendant 40 ans ? C’est moi ou c’est vous ? Qui est maire depuis un demi-siècle ? C’est moi ou c’est vous ? ». Ce sera le dernier mot. La délibération est votée à l’unanimité.
 
Le Puntettu, rien de nouveau
Dernier point d’achoppement, l’épineux dossier du Puntettu, dont le Comité de défense emplissait les tribunes du public, tourne, très vite, court, faute d’élément nouveau. Ange Rovere demande aux élus de valider certaines précisions concernant le nombre de m2 à reconstruire en distinguant le schon du parking (3525m2) de celui du logement (2665m2). Le schéma d’aménagement prévoit la construction de 37 logements sociaux et 8 logements privés. L’investissement privé et public devrait atteindre, chacun, près de 10 millions €.
 
Dialogue de sourds
Gilles Simeoni en profite pour regretter, encore une fois, mais sans illusion, que le projet alternatif du Comité de quartier axé sur la réhabilitation du bâti ancien, et « non sur la destruction du patrimoine historique bastiais », ne soit pas pris en compte, malgré « le large soutien des historiens, des guides touristiques et de la population qui le montre à travers la pétition ». Cette dernière a, déjà, recueilli plus de 2 400 signatures. « Nous avons renoncé à vous convaincre. Nous regrettons qu’il n’y ait pas de place pour seulement la possibilité d’essayer de vous convaincre ».
 
Un sujet de campagne
Mêmes regrets en contrepoint rétorqués par Ange Rovere. Emile Zuccarelli conclut en se félicitant de la politique active de la ville « On ne peut pas nous accuser d’immobilisme. Si, à chaque fois on s’était arrêté par crainte de détruire quelque chose, Bastia n’aurait pas changé ». Inseme affirme, cependant, que l’affaire n’en restera pas là. Le Comité de quartier, qui refuse de baisser les bras, appelle, d’ailleurs, à renforcer la mobilisation. Il y a fort à parier que le Puntettu sera l’un des sujets brulants de la campagne électorale qui s’annonce, d’ores et déjà, rude.
N.M.