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Bastia a rendu hommage au groupe Manouchian fusillé par les nazis au Mont Valérien


Philippe Jammes le Lundi 21 Février 2022 à 12:19

A l’occasion du 78ème anniversaire de l’exécution du groupe Manouchian au Mont Valérien, le Comité de Jumelage Corse-Arménie a rendu hommage ce lundi matin, devant le monument aux morts, place Saint-Nicolas, à ces hommes et ces femmes qui ont lutté contre la barbarie nazie.





« Le 21 février 1944, les 23 membres du Groupe Manouchian étaient exécutés » rappelle Alexandre Santerian, le président du Comité de jumelage Corse Arménie. « Notre comité rend également hommage à ces hommes et ces femmes, juifs, arméniens, corses, espagnols, italiens qui ont eu le courage de se lever contre la barbarie. Nous rendons aussi hommage à Jean Ottavi, résistant corse, membre du groupe FTP-MOI carmagnole liberté ainsi qu’à Armenag Santerian, résistant à Marseille et enterré à Ville di Pietrabugno ».
Pour cette cérémonie le Comité avait reçu le soutien d’Ange Ragno, président de l'amicale Corse Belgique, de Corsica Libera et de la section régionale du Parti Communiste.


« 78 ans nous séparent de l’exécution de ces résistants au Mont-Valérien, à l’exception d’Olga Bancic, seule femme du groupe Manouchian qui sera décapitée en Allemagne » déclare Michel Stefani, secrétaire régional du PC en Corse. « Antifascistes de tous les pays ils se donnèrent la main face au franquisme en Espagne avec les Brigades internationales puis face au fascisme et au nazisme dans toute l’Europe en structurant la Résistance. C’est dans le creuset du Parti Communiste Français qu’ils puisèrent leurs forces, leur organisation, et entamèrent avec peu d’armes ce combat libérateur. La MOI, la Main-d’œuvre immigrée, était un secteur d’activité du PCF ; elle devint le fer de lance des FTP. Dans la nuit de l’occupation, leurs combats et leurs sacrifices ont fait renaitre l’espérance populaire en même temps que l’angoisse parmi les troupes allemandes et les collaborateurs. La dette à leur égard est immense. La Libération de la France leur doit tant.  C’est pourquoi aujourd’hui nous sommes fiers de leur rendre cet hommage et nous remercions le comité de jumelage Corse Arménie de l’avoir organisé ».
Lors de cet hommage, le Comité a diffusé la chanson « Quellu affissu zifrattu » interprétée par Jacky Micaelli , traduction en Corse de Jacques Fusina de « L'affiche Rouge » d’Aragon, chanson écrite par le poète en hommage à ces victimes. Un membre du Comité a également lu la dernière lettre de Missak Manouchian à sa femme Mélinée. (voir ci-dessous)

Bastia a rendu hommage au groupe Manouchian fusillé par les nazis au Mont Valérien
 Ma Chère Mélinée, ma petite orpheline bien-aimée,
Dans quelques heures, je ne serai plus de ce monde. Nous allons être fusillés cet après-midi à 15 heures. Cela m'arrive comme un accident dans ma vie, je n'y crois pas mais pourtant je sais que je ne te verrai plus jamais.
Que puis-je t'écrire ? Tout est confus en moi et bien clair en même temps.

Je m'étais engagé dans l'Armée de Libération en soldat volontaire et je meurs à deux doigts de la Victoire et du but. Bonheur à ceux qui vont nous survivre et goûter la douceur de la Liberté et de la Paix de demain. Je suis sûr que le peuple français et tous les combattants de la Liberté sauront honorer notre mémoire dignement. Au moment de mourir, je proclame que je n'ai aucune haine contre le peuple allemand et contre qui que ce soit, chacun aura ce qu'il méritera comme châtiment et comme récompense.

Le peuple allemand et tous les autres peuples vivront en paix et en fraternité après la guerre qui ne durera plus longtemps. Bonheur à tous... J'ai un regret profond de ne t'avoir pas rendue heureuse, j'aurais bien voulu avoir un enfant de toi, comme tu le voulais toujours. Je te prie donc de te marier après la guerre, sans faute, et d'avoir un enfant pour mon bonheur, et pour accomplir ma dernière volonté, marie-toi avec quelqu'un qui puisse te rendre heureuse. Tous mes biens et toutes mes affaires je les lègue à toi à ta sœur et à mes neveux. Après la guerre tu pourras faire valoir ton droit de pension de guerre en tant que ma femme, car je meurs en soldat régulier de l'armée française de la libération.

Avec l'aide des amis qui voudront bien m'honorer, tu feras éditer mes poèmes et mes écrits qui valent d'être lus. Tu apporteras mes souvenirs si possible à mes parents en Arménie. Je mourrai avec mes 23 camarades tout à l'heure avec le courage et la sérénité d'un homme qui a la conscience bien tranquille, car personnellement, je n'ai fait de mal à personne et si je l'ai fait, je l'ai fait sans haine. Aujourd'hui, il y a du soleil. C'est en regardant le soleil et la belle nature que j'ai tant aimée que je dirai adieu à la vie et à vous tous, ma bien chère femme et mes bien chers amis. Je pardonne à tous ceux qui m'ont fait du mal ou qui ont voulu me faire du mal sauf à celui qui nous a trahis pour racheter sa peau et ceux qui nous ont vendus. Je t'embrasse bien fort ainsi que ta sœur et tous les amis qui me connaissent de loin ou de près, je vous serre tous sur mon cœur. Adieu. Ton ami, ton camarade, ton mari ».