C’est donc sans surprise que Jean-Jacques Panunzi, 58 ans, va siéger au Palais du Luxembourg. Une victoire dans un fauteuil pour celui qui préside le Conseil Général de la Corse du Sud depuis 2006, mission qu’il va d’ailleurs poursuivre jusqu’en 2017. En revanche, Jean-Jacques Panunzi démissionnera de son poste d’élu territorial et devrait être remplacé par Jean-Louis Milani.
Dimanche matin, dans les bureaux de la préfecture de Corse-du-Sud, ils étaient 417 grands électeurs (361 en 2008) invités à désigner leur sénateur pour les six prochaines années en remplacement de Nicolas Alfonsi.
Les votants ? Les députés, les élus de l’Assemblée de Corse, les conseillers généraux, les conseillers municipaux et les délégués des conseils municipaux. On ne s’attendait pas à de grosses surprises pour cette élection de Corse-du-Sud et c’est le plus naturellement du monde que la droite libérale a retrouvé son fauteuil.
Les résultats officiels
Inscrits : 417
Abstentions : 6
Votants : 411
Nuls : 8
Blancs : 6
Suffrages exprimés : 397
Nicolas Alaris : 25 (6,30%)
Jean-Jacques Panunzi : 343 (86,4%)
Michel Leca : 5 (1,26%)
Julia Sanguinetti : 24 (6,05%)
Les réactions
Dans un hall de la préfecture noir de monde où il fallait jouer des coudes, Jean-Jacques Panunzi et Simone Guerrini ont grimpé quelques marches du grand escalier pour saluer leurs supporters qui leur ont réservé un véritable triomphe. Le nouveau sénateur de la Corse-du-Sud s’est adressé aussitôt à la foule :
« Je veux remercier très sincèrement les 343 électeurs qui m’ont accordé leur confiance. Ces suffrages, exprimés à plus de 86%, constituent une première dans notre département et m’honorent. Je veux voir dans l’ampleur de ce résultat, une formidable marque de soutien à l’égard de l’engagement qui est le mien depuis des années en faveur di i nostri paesi, di i nostri pieve, di un nostru dipartimentu et plus largement en faveur di a nostra Corsica. Je veux y voir un encouragement à poursuivre, cette fois au niveau national, le combat qui est le mien pour la défense des intérêts de nos collectivités et de nos territoires, en particulier les plus fragiles. J’ai entendu et compris les messages que les élus m’ont adressés tout au long de cette campagne. J’ai entendu et compris leurs inquiétudes et leurs préoccupations quant à l’avenir de leur commune, de leur département, du monde rural qui est l’âme de la Corse. Il est vrai que jamais, les incertitudes et les menaces qui pèsent sur nos territoires n’ont été aussi grandes qu’aujourd’hui. Jamais les risques de fractures économiques, sociaux ou culturels n’ont été aussi forts.
Je pense bien entendu au projet de réforme territoriale, avec, en corollaire, la réorganisation des services publics, mais aussi à la baisse drastique des dotations ou au poids des normes et des règlements auxquels les élus sont confrontés. A celles et ceux qui m’ont permis Trop souvent inerte ou complaisant, le Sénat doit redevenir la chambre des représentants des collectivités qu’il a cessé d’être depuis deux ans. Il doit redevenir un centre de gravité capable de résister à l’Exécutif à chaque fois qu’il s’éloigne de l’essentiel mais aussi capable de préparer les réformes d’avenir… »
Julia Sanguinetti : « On ne s’attendait pas à gagner l’élection bien entendu, mais on attendait avec impatience de pouvoir donner une analyse du scrutin avec des résultats complets. La question qui se pose aujourd’hui est simple : il y a une cinquantaine de voix qui se sont reportées sur la gauche puisque nous étions deux candidats sur une totalité de grands électeurs susceptibles de voter à gauche. On ne retrouve clairement pas le compte. Soit il y a des militants de gauche qui ont choisi aujourd’hui, et c’est leur droit, d’appartenir à la famille de droite et peut-être de soutenir l’UPM, mais alors, qu’ils le fassent publiquement, de manière à clarifier les choses y compris pour leurs propres électeurs. . Autre lecture qui peut être portée, celle de la perversité du système. Est-ce qu’à un moment donné, notamment par rapport aux élus du rural, le poids du pouvoir d’un président de Conseil Général continue à peser sur des choix qui doivent être des choix de position et des choix politiques ?
Les grandes questions aujourd’hui c’est pour nous tous ces discours qu’on entend au niveau de la Corse et depuis longtemps y compris d’une nouvelle génération de gauche, y compris de la part des nationalistes qui réclament dénoncent à la fois des systèmes et réclament des évolutions, ce que nous réclamons aussi pour aujourd’hui finalement mettre en place, dans une instance qui vote ces fameuses lois, choisir un représentant qui est contre toutes ces évolutions. Donc, la question se pose aujourd’hui, de savoir quels sont réellement les motivations politiques de certains discours et est-ce que tous ces grands discours révolutionnaires et évolutionnistes peuvent, à un moment donné, se transformer démocratiquement et donner des résultats concrets d’engagement. »
Michel Leca, du Front national : « Je félicite M. Panunzi pour son excellent score ainsi que les électeurs qui m’ont donné leurs voix. Je pense qu’elles ont bien compris les attentes de la population. Je regrette cependant que tant d’électeurs se soient laissé aller plutôt à un sentiment clientéliste plutôt que de représenter toutes les aspirations de la population insulaire. 5 voix ce n’est pas grand-chose mais c’est un bon début dans la mesure où l’on m’a souvent dit que je n’aurais aucune voix. Le Front National est là et il continuera à être présent. Ce score ne peut que s’améliorer dans le temps… »
J. F.
Un aboutissement plus qu’une consécration
- On n’est jamais sûr de rien ! Je ne pouvais pas dire à l’avance que je pouvais faire plus de 86% des voix, mais n’oubliez pas que je préside aux destinées du Conseil Général depuis près de dix ans et qu’à ce titre, j’ai lié quand même beaucoup de relations avec tous les maires et chacun pourra vous dire que j’ai toujours mené une politique sans tenir compte d’aucune idéologie. Je me suis avant tout intéressé à œuvrer pour l’intérêt général. C’est vrai que j’ai beaucoup travaillé sur la ruralité pour essayer de réduire cette fracture qui existe actuellement entre le rural et l’urbain. Aujourd’hui j’étais quand même sûr de faire une belle élection mais je ne m’attendais pas à un score aussi large. Cela veut sans doute dire que les grands électeurs n’ont pas tenu compte de mes idées politiques et ont voté avant tout l’homme que j’ai à leurs côtés au cours de ces dix dernières années.
- Considérez-vous cette élection comme une consécration politique ?
- En ce qui me concerne, je considère cela comme un aboutissement de mon parcours politique. Consécration c’est pour les empereurs. C’est effectivement l’aboutissement d’un chemin politique ; les choses ont été faites naturellement. J’ai beaucoup travaillé mais j’ai également bénéficié d’un peu de chance. Aujourd’hui, la voie était dégagée pour que je puisse poser ma candidature à cette élection sénatoriale.
- Vous avez un parcours politique assez important ?
- Je n’ai jamais imaginé qu’un jour je serai président du Conseil Général et que je finirai sur les bancs du Palais du Luxembourg. Le parcours politique a été tout d’abord un investissement au quotidien, auprès de la population, des maires, en essayant toujours de satisfaire les exigences des uns et des autres. Aujourd’hui c’est un peu plus difficile mais avant, en travaillant un petit peu cela était possible. C’est d’ailleurs ce que j’ai tenté de faire pour le mieux. Après, les choses se sont déroulées normalement mais je rappelle que ce n’est jamais vous qui faite le choix de vous présenter à une élection. Vous le faite parce que vous sentez que derrière, il y a des gens qui vous demandent, qui vous soutiennent, qui vous poussent à le faire et moi, c’est un peu ce que j’ai ressenti au cours de ces dix dernières années. J’avais auprès de moi des gens, des amis, des élus toutes tendances confondues, qui insistaient pour qu’à un moment donné, je devienne président du Conseil Général et, avec un peu plus de temps et d’expérience, ces mêmes élus ont souhaité que je sois candidat aux sénatoriales.
- Vos premiers pas au Sénat ?
- je vais me positionner, mais je pourrai vous répondre à partir de mardi et m’atteler à ma tâche de sénateur.
- La réforme territoriale sera l’un de vos grands dossiers ?
- La réforme tombe effectivement très bien car vous connaissez mes idées sur ce sujet et sur les lois qui ont été votée ainsi que mes idées sur la réforme. Si je peux faire entendre la voie des élus, des ruraux, si je peux apporter ma voix pour que cela puisse générer un peu plus d’écho et faire en sorte qu’on arrive à faire passer certaines de nos idées, je le ferais volontiers. Une chose est certaine, je vais à Paris pour me battre pour mes territoires. Je dis « mes » parce que je les aime trop. Cela fait vingt ans que je les parcoure et n’hésite jamais à me rendre sur le terrain. Je connais les difficultés des élus et je connais aussi leurs préoccupations. Raison pour laquelle je ferai mon possible pour les faire partager à ceux qui voudrons bien nous entendre.
Propos recueillis par J. F.