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Réforme des retraites : des conséquences "catastrophiques" pour les travailleurs corses


Thibaud KEREBEL le Lundi 17 Avril 2023 à 15:29

Avant l’allocution officielle d’Emmanuel Macron, ce lundi 17 avril à 20 heures, au sujet de la très contestée réforme des retraites, les syndicats insulaires ont fait le point sur les potentielles conséquences de ce nouveau texte de loi. Unanimes, ils s’inquiètent pour les travailleurs corses, qui pourraient être particulièrement pénalisés.



Photo archives CNI
Photo archives CNI
Promulguée vendredi 14 avril, après sa validation par le Conseil constitutionnel, la réforme des retraites occupe plus que jamais le centre de l’attention des Français. Et alors que le président de la République, Emmanuel Macron, s’apprête à prendre la parole ce lundi 17 avril pour apaiser les tensions, les syndicalistes insulaires, eux, n’entendent pas baisser les armes. Pour Marcel Santini, secrétaire départemental de Force ouvrière en Corse-du-Sud, « la réforme va être plus catastrophique ici qu’ailleurs ». Une crainte partagée par Jean Brignole, secrétaire général du Syndicat des travailleurs corses (STC). « On est déjà la région la plus pauvre de France, et la réforme va accentuer cette situation ! »

Les inquiétudes des syndicalistes reposent en partie sur les particularités économiques de l’île. « Dans le privé, en Corse, le tissu économique est fait de toutes petites entreprises. Et dans ces toutes petites entreprises, la base de salaire, c’est généralement le SMIC », expose Jean Brignole. « Pour toucher les 1 200 euros de retraite promis par le gouvernement après une carrière complète, il faudra maintenant travailler jusqu’à 64 ans. Mais très souvent, à partir de 58 ans, les gens ne sont plus en activité, et les chiffres le prouvent. Dans le privé, il n’y a qu’un tiers des +58 ans qui travaillent encore. »

Le recul de l’âge légal de départ à la retraite, auparavant fixé à 62 ans, risque donc de prolonger l’inactivité des Corses en fin de carrière. « Les personnes de 60 ans qui ont perdu leur emploi et qui doivent attendre deux ans pour partir à la retraite, là, ils vont attendre quatre ans. Donc ils seront soit en situation de chômage, soit en situation de RSA. Et le RSA, c’est la Collectivité de Corse qui le paie. En clair, vu le corps professionnel en Corse, on a des retraités qui attendront plus, et qui seront plus pauvres. »

« Le tissu social va encore plus se dégrader »

Pour Marcel Santini, sur l’île plus qu’ailleurs, il est difficile de trouver du travail dans les dernières années d’une carrière. D’où son opposition à la réforme. « Après 55 ans, on travaille moins en Corse que sur le continent. Comme il n’y a pas de secteur productif sur l’île, tous les salariés sont occupés au transport, au stockage, et à la distribution des marchandises. Le seul autre secteur porteur, c’est le BTP. Mais quoi qu’il en soit, ce sont des milieux où passé un certain âge, on n’a pas les moyens physiques de tenir le choc. »

« L’économie de la Corse n’est pas à même d’assurer un avenir digne à tous ces salariés », martèle Marcel Santini. « Le contenu de la réforme, c’est : augmenter le nombre de chômeurs, et diminuer le nombre de retraites. Le tissu social va encore plus se dégrader. Et quand on voit la situation actuelle, qui est très compliquée pour beaucoup de monde à cause de l’augmentation du coût de la vie, on ne peut s’empêcher d’être très inquiets. »

Mouvement d’ampleur le 1er mai ?

Avant l’allocution d’Emmanuel Macron, qui sera diffusée ce lundi à 20h tant à la radio qu’à la télévision, les syndicats se projettent déjà sur la réponse à apporter au gouvernement. « Il va dire qu’il a besoin des syndicats. Mais en ce qui nous concerne, il ne pourra pas compter sur nous », affirme le secrétaire départemental de Force ouvrière en Corse-du-Sud.

Alors, et comme depuis trois mois, la grève et la manifestation sont les deux armes privilégiées par les travailleurs corses. Pour le moment, les rassemblements sur l’île n’ont pas mobilisé beaucoup de monde, mais Marcel Santini espère que la journée du 1er mai, évoquée partout au niveau national, sera cette fois un peu plus suivie. « En ce qui nous concerne, on va tout mettre sur cette journée. C’est l’étape importante. Je ne sais pas si les Corses répondront présents, mais je l’espère. »