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Lancement des travaux au barrage de l’Alisgiani : Une ouverture de vanne pour une cure de jouvence


Nicole Mari le Lundi 17 Août 2020 à 19:11

Comme annoncé dans le Plan Acqua Nostra 2050, l’Office d’équipement hydraulique de la Corse (ORHC) a lancé, lundi après-midi, la première phase des travaux de maintenance, de sécurisation et de modernisation du barrage de l’Alisgiani, le plus grand ouvrage du parc de la concession. Son Président, Saveriu Luciani, a symboliquement procédé à l’ouverture à faible débit de la vanne de vidange afin d’accélérer le processus d’abaissement du plan d’eau. Le but est d’atteindre au 1er septembre, le niveau adéquat pour isoler le barrage et le consigner pendant les travaux qui dureront 8 semaines. Vidéo de l’opération et explications, pour Corse Net Infos, de Saveriu Luciani, et de Maryline Casabianca, chef du service Ingénierie.



L'ouverture des vannes du barrage de l'Alisgiani en Haute-Corse.
L'ouverture des vannes du barrage de l'Alisgiani en Haute-Corse.
C’est sous une pluie battante et inattendue que l’OEHC a procédé symboliquement, lundi après-midi, à une opération spectaculaire : l’ouverture à faible débit de la vanne de vidange du barrage de l’Alisgiani afin de le délester de 3 à 4 millions de m3 d’eau. Si l’action paraît au premier abord surprenante à l’approche de la fin de la saison d’irrigation et au moment où le spectre de la sécheresse n’est pas totalement écarté, elle est totalement indispensable pour procéder au lancement de la première phase des travaux de maintenance, de sécurisation et de modernisation de la plus importante réserve d’eau de la Plaine Orientale qui contient près de 11,3 millions de m3, dédiés à la production d’électricité, l’irrigation et l’alimentation des communes environnantes. Le barrage de l’Alisgiani, dont la construction a débuté en 1964 et qui a été mis en service en 1970, est, en effet, un ouvrage vieillissant qui a besoin d’être réhabilité et rehaussé pour faire face aux enjeux du changement climatique. Mais les travaux nécessitent au préalable un abaissement conséquent du plan d’eau, qui a déjà commencé en privilégiant l’irrigation mais qui doit être accéléré pour atteindre le niveau voulu, 20 mètres de moins, au 1er septembre. A cette date, le barrage sera isolé et consigné pour 8 semaines, le temps de réaliser lesdits travaux.
 
L’ouverture de la vanne
Cette phase consiste à équiper trois vannes immergées existantes de la tour de prise vidange par des commandes oléo-hydrauliques déportées : vérins sur les vannes et commandes sur la berge. Il s’agit en fait d’automatiser l’ensemble du dispositif. « C’est une contrainte demandée par l’Etat de revoir l’ensemble de notre parc de barrages. La première étape a été le barrage d’Ortole, il y a deux ans. Chaque année, des barrages seront revus, modernisés, sécurisés pour affronter les défis climatiques et surtout augmenter leur capacité. En même temps, nous sommes dans la phase transitoire de la réalisation du plan Acqua Nostra », commente le président de l’OEHC, Saveriu Luciani. Entouré du directeur de l’OEHC, Ange De Cicco, d’une équipe d’ingénieurs et d’agents, et des acteurs concernés – le président de la Chambre d’agriculture de Haute-Corse,
 Joseph Colombani,
 et les élus des deux communes impactées, Pancrace Maurizi, maire de Chjatra Di Verde, et François-Xavier Ciccoli, maire de San Ghjulianu -, il a finalement attendu une éclaircie pour ouvrir la vanne située sous le pont du barrage et admiré le spectacle stupéfiant du jaillissement de l’eau. Comme le montre la vidéo avec, notamment, les explications de Maryline Casabianca, chef du service Ingénierie :

Une gestion responsable
Les 2/3 de l’activité de l’OEHC étant concentrés en Plaine Orientale, entre Furiani et Ventiseri, il a fallu anticiper pour ne pas hypothéquer l’irrigation des terres agricoles jusqu’au mois de novembre. « Alisgiani est le barrage maître de la Plaine Orientale, le vaisseau amiral, mais la mise en place du surpresseur de Tagliu-Isulacciu nous permet de compenser ce manque de ressource avec un appoint venant de la réserve de Peri », précise Saveriu Luciani. « De toute façon, tous les ans, au mois de septembre, le barrage est vide », rappelle Pancrace Maurizi. « L’inquiétude des agriculteurs porte sur le risque de perte de pression pendant la phase transitoire d’abaissement. Ceci étant, les travaux sont nécessaires, le tout est que ça se passe bien. Nous avons eu la chance d’avoir eu un printemps très pluvieux et de commencer l’été avec un barrage plein. Nous étions inquiets à cause des feux, mais force est de constater que la pluie d’aujourd’hui nous apporte un peu de répit », ajoute François-Xavier Ciccoli. Joseph Colombani se montre serein : « Cette opération de vidange est prévue et amenée depuis un certain temps. Une communication et un travail en amont ont été faits par l’OEHC avec la connexion du Golu et du surpresseur de Tagliu-Isulacciu. L’OEHC travaille avec un filet, il n’y a aucun souci. En plus, le temps s’y prête. On s’attend uniquement à une certaine saleté de l’eau brute proposée. Pour l’agriculteur, cela veut dire des contre-lavages, éventuellement se lever la nuit pour nettoyer les filtres… Mais c’est un mal pour un bien. Nous sommes convaincus que l’OEHC maîtrise l’outil et travaille ici, en ce moment, pour l’intérêt collectif des agriculteurs et de l’agriculture ».

Des régions en stress
Si les trombes d’eau, qui se déversaient en montagne et en plaine, ont été accueillies avec un soulagement unanime, la Corse n’est pas, pour autant, à l’abri de la sécheresse. Le président de l’OEHC se veut rassurant : « A l’heure où l’on parle, deux régions sont sous surveillance. La première est la Balagne où l’état de stress hydrique est avancé. La seconde est la région du Giussani, la vallée de Tartagine et de l’Ascu qui sont, aussi, en situation assez délicate. Tout le Nord-Ouest de la Corse est donc impacté, s’y ajoutent le Nebbiu et le Cap Corse. Même si les réserves au niveau des barrages sont similaires à celles de l’an dernier et qu’il y a des stocks disponibles, au niveau du terrain et de l’humidité des sols, ça ressemble étrangement à 2017, voire presque à celle de 2003 ». Tout en restant prudent : « Les réserves sont suffisantes, mais on note une surconsommation. Nous espérons qu’il y aura, cet hiver, une recharge de la ressource en eau suffisante pour garantir la saison prochaine. Imaginons la catastrophe que seraient deux années successives de sécheresse ! L’idée d’Acqua Nostra est de passer très rapidement de cette gestion inter-saisonnières et aléatoire à une gestion interannuelles pour assurer une sécurité en cas d’une année de sécheresse supplémentaire ».
 
Un effort citoyen
Mais sécuriser les stocks, martèle-t-il, ne suffit pas : « On le dit au monde agricole et aux collectivités : il y a besoin de réformer le rapport à l’eau et d’éviter la surconsommation. La baisse actuelle de la fréquentation touristique permet, cet été, heureusement, de pondérer la crise hydrique. Mais, on n’a pas encore acquis les pratiques et les éco-gestes nécessaires pour faire face à la surpopulation estivale. Ce manque de conscience fait que chaque été, certaines communes sont confrontées à des phénomènes récurrents de pénurie. Il faut corriger cela ! Il ne faut pas penser que cinq barrages supplémentaires permettront de répondre à cette problématique. Le barrage est une nécessité absolue, mais le geste citoyen est l’accompagnement nécessaire à la mise en place du plan d’aménagement Acqua Nostra. Il faudra un effort citoyen pour y arriver ».
 
N.M.

Le président de l’OEHC, Saveriu Luciani, entouré du directeur, des ingénieurs et des agents de l’OEHC, du président de la Chambre d’agriculture de Haute-Corse,
 Joseph Colombani,
 du maire de Chjatra Di Verde, Pancrace Maurizi, et du maire de San Ghjulianu, François-Xavier Ciccoli.
Le président de l’OEHC, Saveriu Luciani, entouré du directeur, des ingénieurs et des agents de l’OEHC, du président de la Chambre d’agriculture de Haute-Corse,
 Joseph Colombani,
 du maire de Chjatra Di Verde, Pancrace Maurizi, et du maire de San Ghjulianu, François-Xavier Ciccoli.