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LDH : "Poser comme fondation du débat à venir, la reconnaissance constitutionnelle de la différence corse"


le Dimanche 2 Février 2014 à 17:46

A la veille de la venue en Corse, de Marilyse Lebranchu, ministre de la réforme de l’Etat, de la décentralisation et de la fonction publique, en Corse, Jean-Pierre Dubois, président d’honneur, et André Paccou, membre du Comité central de la Ligue des Droits de l’Homme communiquent :



"En Corse comme ailleurs, en France comme ailleurs, en Europe comme ailleurs, les transformations du monde recomposent les territoires, travaillent les identités historiques et multiplient les appartenances. Notre époque est celle d’un New Deal territorial, d’une diversification des « communautés imaginées » : l’Etat-Nation ne peut plus imposer aux citoyens une conception exclusive et absolue de la souveraineté.

Nous, militants des droits de l’Homme, ne voulons ni de l’uniformité qui détruit les identités, ni de l’enfermement dans la concurrence des replis identitaires. Nous voulons une articulation territoriale de citoyennetés non exclusives, par la construction de « communautés de destin » à chaque échelon de démocratie vivante, du local au planétaire. Nous ne voulons pas la concurrence des territoires mais leur solidarité ; nous ne voulons pas le repli mais la mutualisation. Mais nous savons que ni la solidarité ni la mutualisation ne sont possibles sans la reconnaissance pleine et entière des réalités humaines, politiques et culturelles.

Cette reconnaissance, si longtemps différée, a été tentée il y a 23 ans mais entravée à l’époque par le poids du passé dans les esprits et dans les jurisprudences. Aujourd’hui, il est temps pour la République d’en tirer les enseignements, de regarder le présent et l’avenir en face. C’est pourquoi nous soutenons l’inscription de la Corse dans la Constitution. Non par aventurisme mais pour faire vivre la République dans une meilleure reconnaissance de sa diversité, et pour donner toutes ses chances au laboratoire démocratique passionnant qu’est la Corse d’aujourd’hui.

Face à ces défis, faire le choix d’une politique des petits pas, le réglementaire, puis le législatif, enfin le constitutionnel, serait donner le sentiment de  vouloir gagner du temps et noyer le poisson. Ce serait entretenir la confusion sur l’objectif visé, et donc les malentendus,  là où il est essentiel de dire précisément l’enjeu politique du débat qui s’engage.

Il faut poser les questions de fond. Le cadre constitutionnel posé sans ambiguïté, rappelle le caractère d’unicité de la République. Mais l’unicité ne se confond pas avec l’uniformité. L’égalité n’est pas le traitement à l’identique de toutes les situations ; elle signifie un même traitement quant la situation est la même, et un traitement différent quand celle-ci est différente. La Corse est différente.

Partir du cadre actuel, de la vieille confusion entre unicité et uniformité, espérer lui donner un autre sens par petites touches, pour aborder en fin de parcours, si nécessaire, la question constitutionnelle, ce serait ignorer la nécessité d’une rupture avec la logique mortifère de l’uniformité. L’échec serait alors, à l’évidence, au bout de la route.

Poser comme fondation du débat à venir, la reconnaissance constitutionnelle de la différence corse, poser un socle qui permettra de débattre des conditions de l’égalité » réelle, ce sera au contraire affirmer une nouvelle ambition démocratique pour la Corse et la République. Ce sera faire le choix de l’avenir partagé."