Le système majoritaire corse affirme le lien étroit entre oral et écrit. L'orthographe "tire ses lois d'une étude attentive de la prononciation en usage" (Marchetti&Geronimi, 5001); c'est donc l'oral qui doit déterminer l'écrit et non l'inverse. "Destinée à l'usage de tous les Corses, cette orthographe doit permettre, de rendre des sons identiques par des signes identiques" (ibidem).
Or force est de constater que subsistent des variantes graphiques qui ne correspondent à aucune différence de prononciation. Pire, la généralisation abusive de certaines graphies "modernes" et aberrantes a des répercussions néfastes sur la prononciation.
Le corse, comme toutes les langues, a connu et connait de nombreux changements, qui l'entrainent dans une direction qui n'a pas fait l'objet d'études approfondies. La plupart des changements sont imputés au contact avec le français, qui n'est cependant pas la seule cause (directe ou indirecte) des innovations qui se multiplient notamment depuis les années 1970, période dite du "riacquistu", de la "réappropriation" de leur culture par les Corses". Des variantes « nouvelles » apparaissent et (malgré la profession de foi de l’intertolérance polynomiste) d'autres sont injustement sanctionnées. Décrire l'évolution récente de l'usage corse consiste aussi expliquer l'origine ou la cause des changements, nombreux, à tous les niveaux.
Cela revient à soumettre le « riacquistu » à un « droit d’inventaire », à donner un aperçu de la diversité de l'usage et à le mettre en rapport avec les normes telles qu’elles sont formulées ici ou là. Car les « agents glottopolitiques » n’ont sans doute jamais été aussi prodigues de prescriptions et surtout de proscriptions plus ou moins justifiées. "Dites ... mais ne dites pas..."
Les Corses ont été formés à l'école de la République. Dans le but de résister à la langue dominante, ils ont en réalité intégré et appliqué à leur langue propre les principes et mécanismes caractéristiques qui ont présidé à l'élaboration du français. Nous en donnerons des exemples concrets.
Parmi les nouvelles tâches récemment proposées dans le cadre du conseil de la langue corse, on
évoque un "OBSERVATOIRE LINGUISTIQUE" (pratiques, attitudes et représentations). C'est dans cette perspective que nous nous situons ici, à commencer par l'observation de la graphie, qui dépend d'ailleurs étroitement des autres niveaux, grammaire en général et notamment morphosyntaxe.
Jean CHIORBOLI, 11-7-2014
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Notre prochaine chronique: "Comme" et "comment" en langue corse.
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