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Crise des déchets : 2020, l’année cruciale pour la montée en puissance du tri à la source


Nicole Mari le Vendredi 20 Décembre 2019 à 20:42

La crise des déchets est une question récurrente à chaque session de l’Assemblée de Corse depuis quelques mois et la dernière session de l’année n’a pas échappé à cette règle. C’est, cette fois-ci, le groupe d’opposition Per L’Avvene qui a porté le fer contre l’Exécutif, l’accusant de refuser la valorisation énergétique, de « non-choix » sur le traitement des déchets résiduels et sur l’implantation généralisée de plateformes de déballage pour les grandes surfaces. La droite juge également irréalisable l’objectif 60% de tri en 2021 et demande à l’Exécutif de passer des conventions avec les intercommunalités. Des critiques que le conseiller exécutif en charge des déchets et président de l’Office de l’environnement, François Sargentini, balaie d’un revers de main. Il revient, pour Corse Net Infos, sur le plan Marshall révélé, en début de semaine, par le président de l’Exécutif.



François Sargentini, conseiller exécutif et président de l'Office de l'environnement de la Corse (OEC). Photo Michel Luccioni.
François Sargentini, conseiller exécutif et président de l'Office de l'environnement de la Corse (OEC). Photo Michel Luccioni.
- Que répondez-vous aux critiques de la droite ?
- Je signale, quand même, que la droite n’a pas voté le Plan Déchets que nous avons proposé. La droite est toujours dans la même logique, mais elle est en total décalage par rapport à la réalité, par rapport à notre vision générale et à notre stratégie de gestion des déchets, y compris sur la question des compétences où elle entretient un certain flou qui n’a plus lieu d’être. Ces questions, aujourd’hui, ont été largement abordées et les compétences des uns et des autres sont clairement établies, notamment celles qui incombent à l’Exécutif et à la Collectivité de Corse.
 
- L’opposition vous demande de passer à la vitesse supérieure. N’y-a-t-il pas urgence ?
- Oui ! Bien sûr qu’il faut passer à la vitesse supérieure puisque nous sommes dans une phase de crise, mais ces difficultés étaient prévisibles. Nous avons décidé avec le président de l’Exécutif de reprendre le positionnement que nous avions eu il y a quelques mois, c’est-à-dire de remettre autour de la table les principaux acteurs : le SYVADEC, l’Etat, la Collectivité (CdC) et l’Office de l’environnement (OEC). Nous avons aussi, bien sûr, rencontré le Collectif Valincu Lindu, présent sur le site d’enfouissement de Viggianellu, qui bloque l’accès à ce site et pose le réel problème de la situation immédiate. Nous avons échangé et largement débattu des propositions des uns et des autres. Nous commençons à décider d’un cadre stratégique dans lequel chacun pourra faire un pas pour mettre fin à ce marasme qui est en train de s’installer.
 
- Concrètement, que contient ce fameux Plan Marshall ?
- Nous avons mis en avant le projet que nous avons traduit dans le nouveau guide des aides où la question des déchets est prise en compte au niveau des différentes dotations communales et intercommunales. Nous avons prévu un coup de pouce pour les communes qui accepteraient des structures de traitement des déchets sur leur territoire, y compris les communes de Viggianellu et de Prunelli. C’est un fait aujourd’hui acté et inscrit au budget. Nous avons, aussi, développé des engagements financiers, tant de la part de la CdC que de l’Etat, pour pousser à une forte montée en puissance du tri à la source pendant l’année 2020. L’objectif est de diminuer le besoin de stockage et, donc, le niveau de stockage des déchets. C’est un point extrêmement important qui nous permettra de rentrer dans la phase d’application du Plan. Tout un puzzle est, donc, en train de s’organiser avec des engagements politiques et budgétaires fermes qui permettront aux intercos de mettre le Plan en route.
 
- La dernière fois, les intercos n’ont pas joué le jeu. Qu’est-ce qui vous fait penser qu’elles le feront aujourd’hui ?
- Il faut, bien sûr, que les intercos participent, mais il faut surtout que la Task force, annoncée par le président de l’Exécutif, concentre, à travers ses différentes composantes – Etat, SYVADEC, et collectivité -, tous ses efforts sur les aides et l’ingénierie à apporter aux intercommunalités. C’est le moyen de faire en sorte que la question du tri à la source soit réellement prise en charge partout et que le Plan Déchets soit vraiment appliqué sur le terrain. Nous allons préconiser cette mesure phare du Plan dans les premiers mois de l’année 2020 pour augmenter en puissance au fur et à mesure. Nous allons mettre en place une convention spéciale avec les deux grands communautés d’agglomération de Bastia (CAB) et d’Ajaccio (CAPA) pour que dans ces deux grandes villes de Corse, qui sont les principaux producteurs de déchets, le porte à porte soit effectif. Le but est d’obtenir un tri maximum, ce qui allégera d’autant plus les tonnages à l’enfouissement. Cet axe stratégique semble dessiner une issue à la crise.
 
- Quels sont les objectifs pour fin 2020 ?
- C’est déjà de faire en sorte que tout le monde rentre dans le bain, c’est-à-dire que toutes les intercommunalités prennent compte la première partie du plan, celle du tri à la source. Concomitamment, le SYVADEC s’est engagé à mettre en place les centres de compostage pour disposer d’un exutoire au tri des fermentescibles. Ce point-là doit être finalisé durant l’année 2020. C’est très important parce que c’est la première étape du Plan. Si nous réussissons à entrer dans cette première phase, cela nous donnera assez de souplesse pour rentrer dans une phase effective de construction des grandes structures : les deux centres de surtri ajaccien et bastiais, plus la recherche de nouveaux centres de stockage qui devient un impératif dans le cadre de la stratégie votée par l’Assemblée de Corse.
 
- Pensez-vous être entendus cette fois ?
- Sur ces bases-là, oui. Je crois que nous commençons à être entendus, y compris par les Collectifs qui comprennent que la situation ne peut plus rester en l’état et qu’il faut un peu plus de souplesse. Il faut faire un pas les uns vers les autres, que chacun apporte sa contribution de sorte qu’on arrive enfin à régler sur plusieurs décennies la question des déchets en Corse.
 
Propos recueillis par Nicole MARI.

Question du groupe Per L’Avvene

Le groupe Per L'Avvene. Photo Michel Luccioni.
Le groupe Per L'Avvene. Photo Michel Luccioni.
« La crise systémique des déchets nous oblige à vous interroger à nouveau sur les propositions qui sont les nôtres mais aussi, sur celles qui font consensus à savoir l’optimisation du tri.
1. Voilà plus de 18 mois que notre groupe avait déposé une motion proposant une série de pistes cumulatives, sur le tri comme sur le traitement, allant même jusqu’à proposer une étude sur la valorisation énergétique, qui permettrait de nous exposer les évolutions techniques et les dimensionnements nouveaux, en mesure de correspondre à nos besoins. Votre NON fut catégorique. S’il est pour nous évident de mettre un terme au « tout enfouissement » comme seul mode de gestion des déchets, cette affirmation n’a de sens que si elle est assortie d’un projet alternatif prenant aussi bien en compte la démarche vertueuse du tri à la source et de la responsabilisation des consommateurs, qu’un dispositif de traitement viable et pérenne. Vous opposez-vous toujours au lancement de cette étude ?
2. Le non-choix qui est le vôtre quant aux modalités de traitement, si ce n’est le virage sémantique visant à mettre en avant le stockage pour ne plus dire enfouissement, laisse la Corse dans une situation inédite et intenable. Eu égard aux compétences élargies qui ont été dévolues à la Collectivité par le législateur dans ce domaine, il est de votre responsabilité d’agir et de trancher. Puisque vous ne le faites pas, nous vous proposons de laisser les Corses le faire via un referendum local en leur soumettant 3 choix possibles : l’enfouissement, le transfert sur le continent ou la valorisation énergétique. Souscrivez-vous sur le principe à cette consultation populaire ?
3. Notre motion comprenait par ailleurs des points liés à l’optimisation de la collecte, notamment la perspective de faire respecter aux grandes surfaces insulaires l’article 199 de la loi 2010-788 du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l’environnement, dit Grenelle 2, par l’implantation généralisée de plateformes de déballage sur site, pour trier à la source au plus près, dès les supermarchés. Prévoyez-vous de mettre en œuvre cette disposition ?
4. Enfin, les perspectives de tri énoncées dans votre plan de 2016 ne seront pas atteintes, 60% en 2021. La seule façon d’y parvenir ou d’y tendre eut été de dégager des moyens financiers et humains d’envergure. Le porte à porte, tant mis en avant, a un coût très important. Pire, aujourd’hui, on vous voit rejeter la faute sur le SYVADEC qui ne fait qu’appliquer les orientations de la Collectivité, et surtout sur les intercommunalités chargées de la collecte et cadre de référence des informations sur le tri. Comptez-vous enfin accompagner, financièrement et techniquement, les intercommunalités dans l’optimisation de la collecte des déchets ? Notamment en procédant à la signature des fameuses conventions que vous n’avez pour l’heure pas voulu signer ? ».