Corse Net Infos - Pure player corse

Conseil des prud’hommes : Nouvelles règles et nouveaux visages à Ajaccio


Sylvain Amiotte le Mercredi 24 Janvier 2018 à 19:39

Rentrée solennelle particulière pour le Conseil des prud’hommes d’Ajaccio, ce mercredi après-midi. Alors que les textes régissant l’institution ont été remaniés, sur fond de réforme profonde du droit du travail, un nouveau binôme s’est installé à la tête du conseil ajaccien : Véronique Cesari-Acker (collège des salariés) et José Santoni (collège des employeurs) remplacent Jean-Toussaint Poli et Gilles Trovato, duo d’expérience qui assurait la présidence à tour de rôle depuis près de quinze ans. Aussi, près des deux tiers des 42 conseillers sont nouveaux.



Issue du STC et représentant le collège des salariés, Véronique Cesari-Acker est la nouvelle présidente du Conseil des prud'hommes d'Ajaccio.
Issue du STC et représentant le collège des salariés, Véronique Cesari-Acker est la nouvelle présidente du Conseil des prud'hommes d'Ajaccio.
La nouvelle présidente, Véronique Cesari-Acker, conseillère prud’homale depuis 2008 issue du Syndicat des travailleurs corses (STC), l’assure : avec José Santoni à ses côtés, elle s’attachera à prolonger « l’état d’esprit » de leurs prédécesseurs, Jean-Toussaint Poli et Gilles Trovato.

Ceux-ci ont siégé au conseil ajaccien durant près de vingt-cinq ans, dont quinze à se passer le relais de sa présidence. « Il ne sera pas facile de faire sans vous, et il sera très difficile de faire mieux que vous », a résumé Véronique Cesari-Acker, soucieuse des valeurs de « respect » et « d’honnêteté intellectuelle » d’une institution chargée d’arbitrer les litiges entre les salariés et les employeurs, "dans la juste application du droit".

« Nous sommes des arbitres, nous ne jouons dans aucun des deux camps », a lancé la nouvelle présidente à l’attention des 42 conseillers, répartis à parts égales entre syndicats et patronat, et dont plus des deux tiers siègeront cette année pour la première fois.
 
- Comment évolue l’activité du Conseil des prud’hommes d’Ajaccio ?
 Véronique Cesari-Acker : L’activité est stable. On peut simplement noter une réduction du stock de dossiers en cours. En effet, un certain nombre de dossiers en souffrance, dont les procédures étaient un peu longues, ont été soldés et ont permis de diminuer notre délai de traitement.
 
- Vous avez évoqué avec crainte dans votre discours une « standardisation » de la justice prud’homale…
 - Oui, le principe jusqu’ici était celui de l’oralité, avec un formalisme restreint, laissant aux conseillers des deux collèges le soin d’apprécier, en tant que magistrats non professionnels mais professionnels des activités concernées, la nature des contentieux et des suites qu’il convient de leur donner.

Aujourd’hui, on se dirige de plus en plus vers un formalisme écrit de la procédure prud’homale. Ce qui risque d’éloigner un certain nombre de justiciables de la juridiction, puisque les procédures deviennent de plus en plus sophistiquées, les formulaires de saisine sont maintenant très importants…

Les formalités préalables à accomplir le sont également. Elles nécessitent pour un certain nombre d’entre nous, qui ne maîtrisent pas le langage juridique ni le fonctionnement des juridictions, de s’adjoindre l’aide d’un avocat ou d’un conseil. Ce qui risque de décourager un certain nombre de justiciables.
 
- Il ne s’agit donc pas une simplification, mais d'une complexification ?
- L’avenir nous dira comment cette réforme opérera sur le monde du travail. Mais de fait, l’ensemble des conseils de prud’hommes constatent cette année une baisse de l’activité. Et s’interrogent sur la capacité de cette réforme à répondre aux objectifs d’offrir une justice de qualité au plus grand nombre, compte tenu de la complexification des procédures.
 
- La composition du conseil ajaccien a été modifiée, les règles de désignation également. Qu’en est-il ?
- Jusqu’à présent, les conseillers prud’hommes étaient élus via un scrutin de liste par organisation syndicale. Le mode de désignation a été profondément remanié : c’est désormais une représentation indirecte, avec une désignation par les organisations représentatives, puis une nomination par les ministères de tutelle (Travail et Justice). Ce qui conduit cette année, après quatre ans de mandat et quatre ans de prolongation de ce mandat, à un renouvellement en profondeur des effectifs du Conseil : 70% des conseillers sont nouveaux. Ils prennent la suite de conseillers très expérimentés, en raison d’une durée de mandat anormalement longue.
 

- Les ordonnances Macron réforment en profondeur le droit du travail, avec l’introduction de davantage de flexibilité. Craignez-vous une multiplication des contentieux ?
- Syndicalement, nous le redoutons. Dans l’exercice de notre activité prud’homale, il est encore trop tôt pour le dire. Les ordonnances datent du mois de septembre et les décrets d’application ont été publiés en janvier. Nous allons étrenner cette nouvelle réglementation et nous allons pouvoir apprécier à partir des cas qui vont nous être soumis comment elle peut s’appliquer et quel sera son impact sur le marché du travail et sur les relations dans l’entreprise.

Audience de rentrée du Conseil des prud'hommes d'Ajaccio, ce mercredi après-midi.
Audience de rentrée du Conseil des prud'hommes d'Ajaccio, ce mercredi après-midi.