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Covid-19 : « Le confinement va dépendre de l’effort vaccinal »


Julia Sereni le Jeudi 5 Août 2021 à 16:58

L'épidémie de Covid-19 poursuit sa progression en Corse, entrainant l'île dans une quatrième vague. Vaccination, variants, mesures de freinage, mais aussi perspectives pour la rentrée, Mylène Ogliastro, virologue et membre du conseil scientifique de Corse, livre, pour CNI, son analyse de la situation sanitaire.



Mylène Ogliastro, virologue et membre du conseil scientifique de Corse - Photo archives CNI
Mylène Ogliastro, virologue et membre du conseil scientifique de Corse - Photo archives CNI

Au 4 août, 61,8% des Corses ont reçu une première dose et 50,3% d'entre eux ont un schéma complet de vaccination. Malgré une couverture vaccinale de la moitié de la population, pourquoi y a t-il autant de contaminations ?

La vaccination n’est pas homogène dans la population. Il y a une vaccination importante chez les plus de 60 ans, mais faible chez les plus jeunes. Or, c’est dans cette tranche d’âge que vont se faire les transmissions. Voilà pourquoi nous assistons à un pic. La couverture vaccinale suffisante avait été estimée aux alentours de 60% au début de l’épidémie, mais l’apparition des variants a bouleversé la donne. On va vers des sélections de plus en plus transmissibles, avec un variant delta trois fois supérieur à l’anglais, lui même plus contagieux que la première souche. Et au final, c’est le plus transmissible qui domine.

Face à cette situation, quelles sont les perspectives pour la rentrée, les prochains mois ?

C’est difficile à dire. En analysant les chiffres, on voit au niveau français une espèce d’accalmie, ce qui tendrait à montrer qu’il y a un frein avec les vaccins. En Corse, on n’est pas sur cette accalmie car il y a une forte augmentation de la population durant la saison estivale. Cela crée des densités importantes et favorise donc les contaminations. Je ne veux pas stigmatiser les touristes, mais, de fait, la transmission va augmenter entre les personnes. À la rentrée, la seule chose qui parait claire, c’est le frein vaccinal. Mais la situation est conditionnée à l’éventuelle émergence de nouveaux variants. C’est pourquoi il faut bloquer le virus pour éviter qu’il ne mute. On court toujours après le virus.

Les dernières mesures prises par les autorités en Corse ne paraissent-elles pas trop légères au vu de cette quatrième vague ?

D‘un point de vue virologique, la meilleure des protections, c’est d’éviter aux personnes de se rencontrer. Cela veut dire limiter les rassemblements, c’est cela qui est le plus à même de juguler l’épidémie. Il faut jouer sur la limitation du nombre de personnes infectées - plus on l’abaisse, comme le montrent les modèles Pasteur, plus cela fait barrière, et si on conjugue cela à l’effort vaccinal, ces deux leviers sont à même d’aplatir les courbes.

Reconfiner aurait pu être une bonne idée ?

Un reconfinement pose un certains nombre de questions, et le politique doit gérer un ensemble de paramètres. En jouant sur les deux leviers que j’indiquais, limiter les interactions et augmenter la vaccination, on peut aplatir les courbes. Mais il y a beaucoup de choses que l’on ne maitrise pas, comme par exemple concernant la contamination à l’extérieur : avec le variant delta, c’est variable selon les individus, on n’est pas tous égaux et certains vont être plus sensibles et plus transmetteurs que d’autres. Un excès de précaution à l’extérieur qui pourrait paraitre absurde se justifie en réalité, car avec ce variant, il vaut mieux redoubler de précaution. En tout état de cause, le confinement va dépendre de l’effort vaccinal.

Mais justement, la vaccination est-elle réellement efficace face aux variants ?

L’essentiel des personnes hospitalisées en Israël ou aux États-Unis ne sont pas vaccinées. C’est un argument assez fort. Comme l’a dit le président américain Joe Biden, on assiste à une « pandémie des non-vaccinés ». Après, en biologie, il y a toujours des exceptions, parce que là encore, on n’est pas tous égaux. 5 à 10 % de personnes sont résistantes aux vaccins, il faut donc redoubler de précaution, on n’est pas encore sortis de la crise. Il ne faut pas laisser de poches de résistance, notamment chez les jeunes.

Enfin, le président de la République Emmanuel Macron a indiqué qu’il faudrait une troisième dose pour les personnes les plus fragiles, qu’en pensez-vous ?

Une troisième dose, cela peut faire sens, bien sûr, mais déjà, donnons deux doses à tout le monde ! Il vaut mieux vacciner le plus de gens possible. On est dans une pandémie, il faut donc vacciner beaucoup !