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Le Salon de l’agriculture, un tremplin pour l’agneau de lait corse ?


Jeanne Leboulleux-Leonardi le Samedi 26 Février 2022 à 14:45

Ce samedi 26 février, après une année d’interruption, le Salon de l’Agriculture ouvre à nouveau ses portes à Paris. La Corse y a reconstruit son village : 70 producteurs, issus de toutes les filières de l’île, vont s’y relayer pendant un peu plus d’une semaine. Un exercice contraignant et un investissement important. Parmi eux, Sébastien Rossi et Steve Mattei, les représentants de la filière Agneau de lait corse qui nous en disent un peu plus sur ce qu’implique pour eux la participation à une telle manifestation



(Photos Steve Mattei)
(Photos Steve Mattei)


- Comment s’est passé l’organisation du Salon cette année ?
- Sébastien Rossi : Notre groupement, u Gruppamettu di Pastori Corsi, a en charge la promotion et la valorisation de l’agneau de lait corse. Il représente une partie du collège des apporteurs de lait de l’ILOCC – l’interprofession laitière ovine et caprine corse. Avec l’AREO qui en représente l’autre partie – l’Association régionale des éleveurs ovins corse, plutôt implantée au sud de notre île – nous nous sommes en effet réparti les missions.
C’est donc nous qui participons aux différentes manifestations : le marché de Noël à Bastia, le Salon Agricole Corse Agrisgiani… et donc le Salon de l’Agriculture à Paris.
Cette année, il a été décidé à la dernière minute. D’habitude, fin décembre, tout est arrêté… Là, c’était beaucoup plus tard. De ce fait, l’ODARC a repris les plans du Salon précédent.
 
- Cette participation au Salon, c’est important pour vous ?
- S.R. : Oui, et nous sommes très contents que ça reprenne ! Ça fait plaisir, même si cette année ça s’est fait un peu dans la hâte, avec les mesures sanitaires…
Pour nous, c’est l’occasion de faire la promotion de l’agneau de lait corse ; de le faire connaître, et aussi de se comparer aux autres. La concurrence des autres régions a de très bons produits ! Il est vrai que l’agneau corse présente beaucoup d’avantages : contrairement à ce qui est produit ailleurs, c’est vraiment un agneau de lait, il n’a jamais mangé d’herbe. Tout simplement parce que la race corse ne peut pas être engraissée. Aussi, on doit le sortir avant 40 jours et avec un poids inférieur à 10 kg. C’est ce qui lui donne la subtilité de son goût. Il n’est pas fort du tout : même les gens qui n’aiment pas trop l’agneau l’apprécient. C’est ce qui fait sa spécificité. D’ailleurs, on a reçu des textos et des mails de personnes qui en avaient goûté au dernier Salon et qui nous demandaient si nous participions encore cette année : ça fait plaisir !
 
- Ça représente un investissement conséquent ?
- S.R. : Financièrement, l’ODARC et la CdC prennent en charge les stands, la logistique de transport des marchandises et les chambres d’hôtel. Sans leur participation, on ne pourrait pas… Restent à notre charge les billets d’avions ainsi que les repas des éleveurs et des membres du groupement.
C’est aussi un investissement en temps. Ce n’est pas que la semaine qu’on va passer là-haut… Il y a tout le temps nécessaire à l’organisation. D’abord la préparation des produits : nous montons de l’agneau pour le faire déguster et le vendre en frais. Puis la logistique. Enfin, des réunions de travail pour former, en quelque sorte, ceux qui vont monter : pour que tout se passe bien. Nous tenons à ce que tout soit très bien fait. On veut faire honneur à la Corse, que les gens soient bien reçus et que les financeurs soient satisfaits. Nous avons à cœur de travailler pour la filière et les produits.

- Vous êtes nombreux à monter sur Paris ?
- S.R. : Une dizaine de personnes au total. Il y aura des professionnels ; des gens du groupement ; des éleveurs, avec leurs épouses pour donner un coup de main… Un technicien, mis à disposition par la laiterie et le groupement, viendra nous aider. L’ancien directeur de la Fromagère corse, également, Monsieur Rafalli, qui est à la retraite et qui a donc un peu plus de disponibilité que les éleveurs : il a toujours été à nos côtés pour ce genre de manifestation. C’est un ami. On est un groupe solidaire, on joue collectif.
 
- Sur place, vous vous organisez comment ?
- Steve Mattei : Pour ne pas que ce soit trop lourd, nous organisons des équipes qui se remplacent à mi-salon. Six personnes seront toujours sur place en permanence. En ce qui me concerne, je serai présent, avec un éleveur, Marcel Zucarelli, du début à la fin : je jouerai en quelque sorte le rôle de “chef d’équipe” pour répartir les rôles… et surtout m’occuper de la cuisine ! Nous ferons nos préparations le matin. J’ai une formation de cuisinier. J’ai géré des restaurants, y compris à mon compte, et j’ai eu une ferme auberge jusqu’en 2021 !
On a prévu plusieurs recettes : des brochettes, du sauté, de la souris et de la curatella. Peut-être faudra-t-il trois personnes en cuisine et cinq pour servir ? Cela dépendra du monde. J’espère que nous aurons des contacts avec des restaurateurs qui pourraient avoir envie de travailler notre viande. Et pourquoi pas avec des grandes surfaces ?
 
- Vous êtes éleveur. Qui s’occupe des bêtes pendant votre absence ?
- S.M. : J’ai en effet une exploitation de 100 ha, avec 300 brebis laitières, à Occhiatana. Mon fils – qui est en cours d’installation – prendra le relais avec un ami.
 
- Des échanges prévus avec d’autres structures ?
- S.R. : Le Salon, c’est l’occasion de discuter avec les gens, de faire connaître notre région, d’échanger sur des problématiques et les techniques. Nous avons fréquemment des discussions avec l’interprofession nationale par visioconférence. Mais au Salon, nous pourrons avoir des contacts physiques et c’est très important.
Nous avons prévu des rencontres avec l’interprofession – France Brebis Laitière –, avec les représentants de notre laiterie sur le continent, avec Interbev, l’interprofession viande : Interbev nous a beaucoup aidés à monter notre projet Pôle viande qui doit voir le jour prochainement à Vescovatu. Ce projet a pour objectif d’aider les éleveurs à mieux valoriser l’agneau corse : nous n’avons pas de structure d’abattage et nous sommes donc obligés d’exporter les agneaux en Sardaigne, d’octobre à mi-décembre, parce que nous avons besoin du lait pour le fromage. C’est très compliqué de faire abattre, et c’est difficile d’avoir des produits bien découpés.
Le pôle regroupera un abattoir, un atelier de découpe, un atelier de transformation et de la vente sur place, en gros et au détail. Ce projet, c’est beaucoup de temps et beaucoup d’argent. Ça n’était pas vraiment notre métier mais on l’a fait parce qu’il y avait un besoin sur le terrain. Il a été retardé par le COVID. Mais on y compte beaucoup. Nous espérons très prochainement une annonce de l’ODARC et de la CdC pour rassurer les éleveurs sur le fait qu’ils soutiennent le projet.
 

 

 
Éleveur en Casinca, Sébastien Rossi est Président de l’ANEOL – l’Association du Collège des Éleveurs de l’interprofession nationale, créée il y a deux ans et qui regroupe les quatre bassins de production nationaux – et également trésorier du Gruppamettu di Pastori Corsi. U  Gruppamettu regroupe environ 120 à 130 adhérents permanents, chiffre qui peut monter à plus de 200 dans le cadre de certaines actions spécifiques. Il commercialise près de la moitié des agneaux produits en Corse.
Steve Mattei est éleveur en Balagne.