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Les assistants médicaux pourraient-ils améliorer la qualité des soins en Corse ?


M.V. le Jeudi 2 Février 2023 à 18:58

Alors qu'actuellement 4 000 assistants médicaux secondent les médecins généralistes dans leur mission, le président Emmanuel Macron souhaite que ce nombre passe à 10 000 d’ici 2024. Mais qu’en est-il exactement de cette profession encore méconnue ? Est-elle la solution miracle pour répondre aux problèmes des déserts médicaux et de la pénurie de soignants ? Les docteurs Francescu Suzzarini, médecin généraliste au Querciolu, et Laurent Carlini, généraliste à Peri et urgentiste à l'hôpital d'Ajaccio, nous éclairent sur ce sujet.



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Le problème est connu : en Corse, région qui compte environ 600 médecins libéraux, dont 300 généralistes, la démographie médicale ne cesse de diminuer et les cabinets sont saturés. Dans ce contexte, toutes les solutions pour faciliter la prise en charge des patients doivent être considérées avec bienveillance et, selon les professionnels de santé, les assistants médicaux pourraient s'avérer être la solution efficace pour améliorer l'accès aux soins sur l'île.
"Aujourd'hui il est primordial pour nous de pouvoir déléguer certaines tâches qui embolisent notre organisation. C'est le cas par exemple de la facturation, des courriers, de l’accueil ou de la gestion des fournitures d'un cabinet médical. Toutes ces taches sont indispensables au bon fonctionnement d'un centre de soins et nous les réalisons aujourd’hui en dehors de nos heures d'ouverture." explique le docteur Francescu Suzzarini, généraliste à Querciolo, qui recrutera bientôt une assistante médicale à temps partiel. 

Le but de l'assistant médical est de soutenir les médecins dans leurs tâches les plus simples. Pour ce qui est des missions, elles dépendent des besoins du praticien qui recrute. Il peut, par exemple, avoir besoin de quelqu'un pour des tâches administratives, ou pour la gestion des dossiers ou bien encore pour réaliser des préconsultations. 
"Les médecins pourraient confier certaines tâches à ces professionnels pour qu’ils initient la consultation et facilitent l'analyse médicale comme, par exemple, la prise de la tension artérielle et des constantes, la réalisation d'un questionnaire dans le cadre d'un protocole de soin...Mais il est impossible, pour moi, de déléguer l'analyse sémiologique et la prescription médicale, pour lesquelles j'ai été formé pendant 10 ans. C'est d'ailleurs ma principale critique envers la proposition de loi Rist portant  sur une amélioration de l'accès aux soins discutée à l'assemblée" détaille le docteur Suzzarini, qui est aussi secrétaire général adjoint de l'URPS Médecins libéraux de Corse.

Une vision que partage le docteur Laurent Carlinigénéraliste à Peri et urgentiste à l'hôpital d'Ajaccio, "L’activité d’assistant médical est une valeur ajoutée dans la prise en compte des patients. Elle permet d’améliorer en partie l’accès aux soins, facilite l’organisation et la coordination d’un cabinet médical et décharge le médecin de certaines démarches administratives lui permettant de se recentrer sur sa mission première : le soin." 


Combler la pénurie de temps médical 

L'embauche des assistants médicaux est aujourd'hui assortie d'une aide financière sous certaines conditions et pour en bénéficier il est nécessaire de respecter un certain nombre de critères, dont les modérations tarifaires, le zonage prédéfini par les ARS (Agences régionales de Santé) ou encore de cumuler un certain nombre de patients pour les généralistes. 

Des conditions sine qua non qui n'ont pas manqué de réveiller des critiques parmi les professionnels de santé qui voient des failles dans le système actuel. "La cartographie proposée n’est pas dynamique et ne prend pas en compte la situation globale d'une région," analyse le docteur Francescu Suzzarini. "Cette année en Casinca, 5 médecins ont été contraints d'arrêter leurs activités. L'ensemble des professionnels de santé de la région a alors dû absorber une grande partie de leurs patientèles, malgré la forte tension qui s'exerçait , déjà, sur les médecins en exercice.Pourtant, ce territoire n'est pas considéré comme une zone d'action prioritaire, et le praticien en question ne peut donc pas bénéficier de la totalité de l'aide à l'embauche d'un assistant médical dont il aurait bien besoin." 

4000 assistants médicaux en France, 31 en Corse

Au 1er 
janvier on comptait 9 assistants médicaux en Corse-du-Sud et 23 en Haute-Corse. Pas de quoi chambouler le paysage donc. Il faut dire que les généralistes émettent aussi des réserves concernant certaines contreparties auxquelles l'aide à l'embauche est subordonnée.  "Le principal objectif d'un médecin est avant tout d'améliorer la qualité des soins prodigués et non pas d'augmenter sa productivité." critique le docteur Suzzarini.
"Il y a des incohérences"  concorde le Dr Carlini "il faudrait revoir certains critères d’éligibilités pour avoir accès à ces aides." Même si , selon lui, "de manière générale les médecins libéraux sont satisfaits du dispositif et de l'aide financière apportée par la CPAM."