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Pour le préfet de Haute-Corse, "le projet de PLU (rejeté) de Monte était bon"


Livia Santana le Jeudi 13 Janvier 2022 à 20:44

Le plan local d'urbanisme de la commune de Monte comprenant la construction d'une école et d'un centre de sur-tri a été rejeté le 2 décembre 2021 par la Commission territoriale de préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers. Ce refus suscite l'indignation du maire mais aussi l'incompréhension du préfet de Haute-Corse, François Ravier, qui s'étonne de cette décision défavorable "contre un bon projet".



commune-monte.fr
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Jean-François Mattei, maire de Monte ne pourra pas, pour le moment, construire l’école tant attendue dans sa commune. Pour en comprendre les raisons, il faut faire un petit retour en arrière.

Quand il reprend la mairie en 2014, l’homme poursuit le travail sur le plan local d’urbanisme (PLU) débuté par son prédécesseur, François Pancrazi. « Monte est un village à 700 mètres d’altitude, à 14 kilomètres de la plaine qui compte 600 habitants, ne disposant d'aucun service public. J’ai donc voulu implanter sur ma commune un groupe scolaire, des commerces de proximité et des logements pour y redonner un peu de vie », explique-t-il. Pour réaliser cela, la révision du Plan local d'urbanisme (PLU) était nécessaire.

Au même moment, la crise des déchets se pose avec acuité dans l’île, le maire de Monte représente la Communauté d’agglomération de Marana-Golo lors des réunions avec la Collectivité de Corse (CdC). Au fil des discussions, il propose d’implanter un centre de sur-tri sur sa commune qui réunit, selon lui, toutes les conditions pour l’accueillir. Pour qu’il soit réalisable, les 5 hectares nécessaires à l’implantation du centre doivent être inscrits dans le PLU. La municipalité les rajoute donc et présente le projet à la CdC. « Ce jour-là, au siège de la Collectivité à Ajaccio, on m’a dit : c’est très bien, foncez », se remémore Jean-François Mattei qui y gagnait 200 000 euros annuels de taxe foncière sur le bâti, une somme qui lui permettait de financer les postes d'assistantes maternelles de la future école.

La crise du Covid survient, les dossiers, qui doivent être examinés, ne le sont pas, mais Jean-François Mattei continue à peaufiner son PLU en collaboration avec l'Etat. 

« Le PLU était bon »
« J’ai eu l’occasion de travailler personnellement sur le dossier avec les services de la DDTM (Ndlr : Direction départementale des territoires et de la mer), de le faire modifier avec le maire de Monte pour revenir à ce qui était acceptable au regard des normes en vigueur. En douze mois, le projet a bien progressé », précise François Ravier, préfet de Haute-Corse qui assure : « par la suite, le projet a reçu l’avis favorable des services de l’Etat ».

Mais le projet se situe sur une terre agricole, avec option viticole. Pour être approuvé, le PLU doit passer par la Commission territoriale de préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers (CTPENAF) composée de représentants de la préfecture de Haute-Corse, de trois membres de la Collectivité de Corse, de la Chambre d’agriculture, de l’Institut national de l'origine et de la qualité (Inao) et de l’association de protection de l’environnement U Levante. Le 2 décembre dernier, réunie à la préfecture de Bastia, la Commission émet un avis défavorable au PLU de Monte. A la sortie de la réunion, Jean-François Mattei est partagé entre l’incompréhension et la colère. Il ne pourra pas, réagit-il, construire le centre de tri, l’épicerie, le bureau de tabac, le cabinet médical, la résidence pour les séniors, la soixantaine de logements en primo-accession et surtout, le groupement scolaire qu’il avait projeté depuis plusieurs années. « Si c’est pour les 5 hectares du centre de tri, moi, je n'en ai que faire ! Mon objectif était surtout de soulager le grand Bastia. Ce que je veux, c’est construire mon école et que mes administrés n’aient plus à faire 30 minutes de route avec le verglas pour emmener leurs enfants tous les jours en classe », s’indigne le maire.

Du côté de la préfecture de Haute-Corse, c’est la surprise et l’incompréhension : « Le projet de PLU était bon. Le maire a, de sa propre initiative, proposé un terrain pour le centre de tri. Pourtant, ce n’est pas un élément d’attractivité très fort pour une commune. Il y avait aussi un volet de politique sociale avec la création de logements en primo-accession à la propriété alors que sur l'île, il y a quand même une grande tension pour se loger », explique le préfet de Haute-Corse.

Les raisons de ce refus peu lisibles
Parmi les réfractaires au PLU de Monte : l’INAO, la Chambre d’agriculture et les syndicats agricoles. Les trois membres de la Collectivité de Corse se sont quant à eux, abstenus de voter, ce qui, selon Jean-François Mattei, aurait pu « tout changer ». C'est aussi l'avis du préfet. « Je regrette que ces considérations d'intérêt général n'aient pas été prises en compte », lance François Ravier. Si la Commission a refusé le PLU, c’est en raison « d’une consommation d’espaces agricoles excessive, particulièrement de surfaces à fort potentiel agronomique, classées en espaces stratégiques agricoles par le PADDUC ou dans l’aire parcellaire délimitée pour la production de raisin de l’AOP ‘’Vins de Corses’’ », est-il écrit le compte rendu. Cela, Jean-François Mattei ne peut pas l’entendre : « Je n’arrachais pas un pied de vigne ! En plus, à Monte, s’il y a un hectare de vigne, c’est le maximum et je n’y touchais pas ! A Vescovato, j’aurais pu comprendre, mais chez moi, non ! Les vins c’est bien, mais construire une école, c’est quand même plus important ! », s’indigne l’élu, qui voit en cette décision défavorable, un clivage politique. « Si j’avais été de la majorité territoriale, les trois représentants de la Collectivité auraient voté pour et ne se seraient pas abstenus », reprend désabusé l'élu de droite qui se trouvait sur la liste de Laurent Marcangeli aux dernières élections. De son côté François Ravier confie : « Au regard de l’intérêt du projet, je ne comprends pas cette opposition, il y a quelque chose qui m’échappe... ». La commune de Monte prépare, d’ores et déjà, un recours devant le tribunal de Bastia pour tenter, tant bien que mal, de construire son école.