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L'ancien braqueur Yazid Kherfi invité par l’Afc-Umani : « La parole est plus forte que la violence »


Michela Vanti le Mardi 17 Novembre 2015 à 21:42

Quand on cherche son nom sur les moteurs de recherche, le premier résultat qui s’affiche c’est un article de presse : "Yazid Kherfi ancien braqueur passé par la prison, aujourd’hui consultant en prévention urbaine". Cet artisan de la non-violence sera en Corse à partir de ce mercredo invité par l’Afc-Umani. Mercredi il rencontrera les détenus de la prison d’Ajaccio et jeudi les élèves du Lycée Jean-Nicoli de Bastia où en fin d’après-midi il animera une conférence au Théâtre Sant’Angelo.



L'ancien braqueur Yazid Kherfi invité par l’Afc-Umani : « La parole est plus forte que la violence »
- Qui étiez vous avant ? Et qui êtes-vous maintenant ?
- Je suis Yazid Kherfi, simplement. J’ai grandi dans les quartiers à côté de Paris, j’étais un jeune de banlieue qui, comme beaucoup, a eu un parcours de délinquant d’une quinzaine d’année, qui a fait cinq ans de prison et qui a changé. Avant j’étais en échec scolaire, aujourd’hui je suis enseignant à l’université, avant j’étais délinquant et aujourd’hui je suis un spécialiste de la prévention à la délinquance, avant j’étais en prison et maintenant j’y travaille, j’anime des groupes de paroles pour les prisonniers. Avant les policiers me courraient après et aujourd’hui je cours après les policiers pour les… former !

- Quand il y a-t-il eu la fracture entre la vie d’avant et celle d’aujourd’hui ?
- A la suite de mon emprisonnement, je devais être expulsé du territoire français parce que le gouvernement disait que j’étais irrécupérable, qu’on ne pouvait rien faire avec une personne comme moi. C’est en effet ce que j’ai entendu dire de moi pendant toute ma vie : que j’étais un bon à rien. Mais finalement des gens ont cru en moi, j’ai évité l’expulsion. Puis le directeur de la mission locale de Mantes m’a offert un travail. Tout à coup, des gens se battaient pour moi, ils croyaient en moi. Ça m'a bousculé. Leur regard, en changeant, a commencé à me faire changer.

- Aujourd’hui vous êtes un acteur du social, vous avez inventé la médiation nomade, qu’est-ce que c’est?
- Depuis trois ans je pratique ce que j’appelle de la médiation nomade. Au début je n'étais qu’en région parisienne mais les besoins ont changé et maintenant je vais aussi en Province. Je m’installe la nuit, à partir de 20 heures jusqu’à 1 heure du matin, dans les quartiers sensibles. J’arrive avec mon camion, je mets des tables, dehors, je fais du thé à la menthe, j’amène des jeux de société, je mets de la musique et j’accueille les gens qui sont dans les rues ou dans les halls d’immeuble à ne rien faire. Je crée des échanges de parole parce que la parole c’est plus fort que la violence.  

- A qui parlez-vous de la médiation ?
-A ceux qui traînent, qui sont dans la marginalité, qui sont dans la délinquance, qui ne sont pas bien dans leur peau, qui ne savent plus se parler ni écouter. Mais je parle aussi à ceux qui sont de l’autre côté : qui ne connaissent pas les quartiers, qui en ont peur et qui ont des préjugés. Mon travail c’est de rapprocher ces deux mondes qui s’ignorent et se méprisent. J’essaye de redonner de l’importance à l’échange verbal pour que ces deux mondes se rencontrent.

- Mercredi vous serez en Corse. Est-ce que vous pensez qu’ici on a les mêmes problèmes que sur le continent ?
- Je pense que la violence dans les quartiers populaires soit un problème commun à la Corse et au continent. La violence il faut la comprendre pour la guérir, quand on la connaît on peut essayer de l’éviter. Il faut bien la comprendre pour mieux agir.
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Vous pourrez rencontrer Yazid Kherfi jeudi 19 à 18h30 au Théatre Sant’Angelo de Bastia lors de la rencontre « La violence, mieux comprendre pour mieux agir » organisée par L’associu pé una Fondazione di Corsica, Università di l’omu.