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Quartiers je vous aime…. U Borgu, un authentique théâtre à ciel ouvert !


Jose FANCHI le Mardi 22 Août 2017 à 17:01

Ce merveilleux Borgu où il fait si bon vivre ! U Borgu, c’est effectivement une ville dans la ville, le centre nerveux de l’Ajaccio que l’on aime, que l’on fréquente, disons-le, un quartier dont on ne peut se passer. De la place des Palmiers (pardon, Foch) à la Piazetta et vice-versa, la grande rue Piétonne (enfin presque) est un passage obligé pour tout ajaccien qui se respecte. U Borgu, avec ses rues adjacentes, ses traverses et ses passages, c’est le poumon voire l’artère ou l’on sent véritablement battre le cœur de la cité.



Quartiers je vous aime….  U Borgu, un authentique théâtre à ciel ouvert !
On entre dans le vif su sujet sur la place des palmiers avec ces dames qui font la causette, taillent, cousent et coupent par tous les temps et à tous les temps flachine et custumi ! Elles n’en manquent pas une, bien au contraire.
Il y a peu, avant de franchir la « frontière » pour entrer de plain-pied in Borgu, une halte chez M. Paone était indispensable pour être au courant des derniers potins, pour mieux démarrer la promenade. Cela n’a d’ailleurs jamais fait de mal à personne. Fermé depuis quelques années, l’atelier réunissait la fine fleur des ajacciens en mal d’histoires du passé et du présent. On évoquait même l’avenir, mais en rigolant…La bonne humeur était de mise et le moral ne baissait que très rarement avec l’équipe présente. Je me souviens de cette histoire que me contait François lorsque je l’interrogeais sur les commerces de la place Foch à l’époque où le tourisme commençait à fleurir dans la cité impériale.
L’histoire se passe au restaurant des Palmiers, chez Morelli, il y a plusieurs décennies. Des cris stridents provenant de l’arrière cour commune n’en finissaient plus d’irriter le commerçant voisin du restaurant. Cela se manifestait pratiquement tous les jours, au moment où les cuisiniers s’activaient pour le repas du midi. Un jour, le propriétaire du commerce, excédé, entre dans le restaurant et demande instamment de faire en sorte que ces sifflements cessent. « Ce sont les rats, ils ont faim, ils manifestent » lui répond laconique, l’un des commis de cuisine. Et le commerçant de lui répondre : « eh bien, donnez-leur  manger, faites quelque chose mais arrêtez ce tapage. »
Le lendemain, même scénario, le commerçant est plus que jamais dérangé et cette fois, s’adresse directement au patron, lequel, un peu gêné certes, mais taquin et monta sega lui réplique : « Ecoute, ce matin pour les calmer, je leur ai donné de la langouste. Tu me croiras ou pas, ils ont continué » à s’agiter… »
« Bien sûr o calabro, tu leur as donné de la langouste avariée ! »
 
Les clefs d’u Muru
Quittons la place et engouffrons-nous dans cette rue Fesch si passionnante où le passé ressurgit à chaque pas, à chaque rencontre. L’ambiance est toujours aussi chaude, les personnages truculents. La rue Fesch est véritablement un théâtre à ciel ouvert avec des comédiens à chaque coin de rue.
En voilà un autre que les vieux ajacciens n’ont pas oublié. Impossible en effet d’oublier le sympathique Félix Martinetti, le patron du bar du XXe siècle, jovial, agréable, le cœur sur la main et comme tout bon ajaccien qui se respecte, monta sega et pince sans rire. Un jour qu’il fermait son bar dans le petit matin frisquet, Felix « U Muru » s’en va prendre un peu de repos dans un petit appartement du rez-de-chaussée situé à quelques pas de son établissement.
Lorsqu’il s’apprête à ouvrir la porte, la femme de ménage qui se dirigeait vers le bar lui fait discrètement remarquer qu’il est en train d’ouvrir la porte avec une cigarette. Félix, sans se démonter, imperturbable, se retourne et glisse à la dame : « Allora, o cara, mi so fumatu i chjavi ! » (Alors, ma chère, j’ai dû fumer les clefs).
Vous avez dit dérision ?  
Reprenons notre balade dans ce vieux quartier de la ville qui nous mène aux célèbres « Gallerie » et marquons une pause dans le portail qui jouxte l’hôtel et au fond duquel un dédale de cours et de couloirs mène jusque sur le cours Napoléon. Souvenirs de jeunesse lorsque nous jouions à « cache-cache bastunatti » (celui qui se faisait repérer passait dans le couloir à panettes, c’était sa fête en quelque sorte). C’est dans ce portail, dit « u purto d’u Mogu » que Mathieu Fiamenghi exploitait son four à bois et nous servait ce pain succulent qu’il transportait ensuite sur son chariot vers la boulangerie où Gracieuse, son épouse, faisait patienter sa clientèle. En dix minutes, la fournée était expédiée. Que de bons souvenirs…
En face de la boulangerie, les « Gallerie »  anciennement maison des corailleurs aujourd’hui superbement rénovée, au pied de laquelle Laurent Pieri dit « Pignol » nous apportait notre « finucchjettu » quotidien, puis, à quelques pas, le petit oratoire San Rucchellu dont l’association créée par Pierre-Jean Luciani et gérée avec efficacité par Joseph Pieri lui permet de retrouver ses lustres d’antan, pour mieux faire face à la Chapelle Impériale et à la cour du musée Fesch. Rappelons que face à la cour, existe un passage -  désormais fermé - qui mène directement sur le cours Napoléon (dans le portail de l’ancienne imprimerie Daroux) et traverse de merveilleux petits jardins arborés où l’on trouve de succulantes jujubes (i zizuli).
Poursuivons avec un arrêt « pèlerinage »  à la hauteur de la bibliothèque municipale près de laquelle se trouvait le commerce de Zia Lisabetta et ses chaussons aux blettes et oignons dont le goût est encore accroché à nos papilles, tout comme le fameux « lion d’or », la cantine de Pierlovisi, le bar André, la cordonnerie Pittalis, autant de commerces devenus boutiques…
Il est temps de marquer une pause, à la hauteur du 43, maison natale d’un des plus illustres de nos enfants, Tino Rossi et laissons traverser la rue Fesch par la rue des Trois Marie, la seule où la circulation est encore autorisée pour rejoindre le port.
A suivre…
 
 
P.S. : Extrait de  « Lieux de mémoire d’Ajaccio » à paraitre prochainement