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Noms de lieux et noms de famille (Corse et Sardaigne)


Jean Chiorboli le Mercredi 11 Octobre 2017 à 19:57

En règle générale les noms corses (de famille ou de lieu) ont été toscanisés alors que les noms sardes ont conservé une graphie conforme à la prononciation. Exemple : le latin CAMPU(S) a donné “campu” en sarde comme en corse, mais alors que dans la plupart des toponymes la forme sarde a été conservée, la forme corse a été toscanisée en “campo” ce qui ne correspond évidemment pas à la prononciation insulaire. L’histoire explique ces différences



La période de relative indépendance dont a joui la Sardaigne (XI°-XIV° siècles) a favorisé la formation d’une langue écrite officielle, ce qui n’a jamais été le cas en Corse (pendant la période indépendante Paoli avait choisi le toscan comme langue officielle). On peut faire un parallèle avec le Pays Basque:
“Étant donné que pendant de nombreux siècles la langue basque n’a bénéficié d’aucun statut d’officialité, les langues voisines ont créé de nombreuses altérations dans les noms de famille basques” (Académie de la langue basque). Récemment il a été décidé de “rendre à ces noms leur forme et leur graphie correctes”, pour les toponymes aussi bien que pour les noms de familles basques. En Corse la graphie des toponymes est en cours d’adaptation à la forme locale, mais il n’y a pas de revendication de corsisation pour les noms de famille, même lorsque ceux-ci sont issus de toponymes. Ainsi on a “Curtichjatu” pour le nom de lieu, mais le nom de famille reste CORTICCHIATO.


Beaucoup de régions, en France et ailleurs, présentent des situations analogues. Par exemple on signale pour le regretter que le Bretons n'ont pas la même approche de la question identitaire : "Au Pays basque sud, les communes ont massivement changé l'orthographe de leurs noms au sortir du franquisme. Est-ce si illogique que de vouloir passer d'une orthographe espagnole à l'orthographe normalisée moderne du basque ? Les noms de famille basques ont connu le même processus, et aujourd'hui il est très rare de voir des noms de famille avec une orthographe espagnole. Et je crois pouvoir dire que cela n'a pas suscité de "reuz" là-bas..."
On insiste sur le fait que le breton reste une langue dominée, qui porte les stigmates de cette domination, contrairement à la situation du basque qui a bénéficié d'une volonté politique d'émancipation:
"Les Basques, au sortir du franquisme, ont massivement fait le choix de “basquiser” leur toponymes et noms de famille. Ce choix était éminemment politique, et témoignait d'une volonté collective d'émancipation par rapport à la domination espagnole, qui avait pris une forme étouffante sous Franco. Nous, Bretons, sommes visiblement à mille lieues d'une telle audace...”(blog langue-bretonne.org).


"L'histoire, a écrit P.Valéry, est la science des choses qui ne se répètent pas. Contrairement à ce qui s'est passé au Pays Basque, la Corse n'a pas subi une dictature italienne après la dernière guerre. La domination italienne n'a (donc) pas été "étouffante" en Corse au point de susciter la même "volonté collective d'émancipation", d'autant que la nouvelle puissance dominante ne parle plus la même langue que celle qui a présidé à la formation des noms de famille. (extrait de J.Chiorboli, “La légende des noms de famille, http://www.albiana.fr/la-legende-des-noms-de-famille-appellations-d-origine-corse.html).