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L'interview : Carina Orru


le Vendredi 26 Octobre 2012 à 08:04

Cette année, Festiventu fête ses 20 ans et un succès qui ne se dément pas. Sa présidente, Carina Orru, revient, pour Corse Net Infos, sur la genèse et l'état d'esprit de ce festival qui s'ouvre samedi, à Calvi, pour cinq jours. Elle présente les thèmes abordés, les moments forts et les innovations de cette 21ème édition.



L'interview : Carina Orru

- Que vous inspire d'avoir 20 ans ?

- C'est déjà un bonheur d'être arrivé jusqu'à 20 ans. Au début, notre envie était vraiment de créer un évènement qui rassemble artistes, sportifs, scientifiques, défenseurs des droits humains et écologiques... Nous avions, aussi, envie de décloisonner tous ces mondes dans le cadre idyllique de Calvi. En 20 ans, nous avons vu le festival évoluer, sa philosophie et ses valeurs se propager, une population entière adhérer à son esprit basé sur le partage, le savoir, l'éco-citoyenneté, la solidarité et la diversité. C'est, bien sûr, que du bonheur !

 

- Comment ce festival a-t-il évolué  ?

- Il a évolué avec la société, le public et les thématiques. Quand, en 1992, nous avons commencé à parler d'écologie et d'environnement, nous n'avions pas la même écoute qu'en 2012. Il y a eu un changement de mentalité et une prise de conscience. Si, à notre petit niveau de lanceurs d'alerte, nous avons pu faire évoluer la situation, ajouter une petite pierre à notre combat, ce n'est que positif. Quand nous avons créé le Festival du Vent, nous n'imaginions pas nous projeter 20 ans après. Nous espérions juste que ses valeurs puissent se propager et sensibiliser le public.

 

- Comment expliquez-vous cette longévité et ce succès qui ne se dément pas ?

- C'est toujours un succès chaque année, nous nous en réjouissons. Le Festival du Vent est, d'abord, un évènement familial qui touche les parents, les enfants, les adolescents... Sa force est de s'adresser à un public très large. Ensuite, c'est une plateforme d'expression qui reçoit des personnalités de renom, les thématiques sont abordées au niveau du grand public et dans un état d'esprit festif. Parler de thématiques sérieuses telles que les OGM, le nucléaire, l'alimentation, la santé, l'énergie, les droits humains..., dans un état d'esprit festif, fonctionne. Chacun peut s'exprimer, les débats sont animés, les gens ne sont pas forcément d'accord, mais il y a un échange, un partage. Je pense que la force du festival vient de là.

 

- Quel thème est mis en lumière cette année ?

- Nous ne déterminons pas un thème particulier, mais nous abordons des thématiques diverses rattachées les unes aux autres. Cette année, nous avons le grand plaisir d'accueillir le réalisateur Jean-Paul Jaud qui présentera, en avant-première, son film : "Tous Cobayes?" en présence de la députée européenne Corinne Lepage. Nous aurons aussi la joie d'accueillir notre parrain, Yann Arthus-Bertrand qui va présenter deux films : "La soif du  monde", "Planète océan", ainsi que "Sept milliards d'autres". Pour nous, parler d'écologie, c'est parler des droits humains, des rapports Nord-Sud, de l'humain dans cet environnement, d'économie...  Une rencontre portera sur la responsabilité sociale des entreprises en temps de crise. L'écologie, c'est un tout qui doit être rattaché à d'autres problématiques.

 

- Quel est l'objectif de ces rencontres-débats ?

- Nous sommes une plateforme d'expression où les gens se rendent compte que l'on peut avancer avec des idées différentes et qu'à plusieurs, on est aussi plus intelligent. Les festivaliers sont aussi, à un moment donné, acteurs. Nous voulons que chaque individu, chaque habitant de cette terre ressente un engouement et décide de faire quelque chose là où il veut, comme il peut. L'essentiel est que chacun soit mobilisé, ainsi on arrivera à un meilleur équilibre sociologique, humanitaire...

 

- Pourquoi avoir invité le juge Gilbert Thiel et ensuite l'avoir déprogrammé sous l'effet de la polémique ?

- Comme je l'ai dit, le Festival du Vent est une plateforme d'expression et un lieu de débats, d'échanges et de confrontation entre une personnalité et un public. Nous avons invité Gilbert Thiel pour qu'il réponde aux questions du public et que ce public puisse lui poser toutes les questions qu'il a envie de poser. Aucune question n'est tabou. Suite aux évènements tragiques de la semaine dernière, nous avons, d'un commun accord, décidé de ne pas garder cette rencontre parce que, du coup, elle devenait inopportune.

 

- Le festival programme des débats, des animations et des concerts. Est-ce le même public que l'on retrouve partout ?

- Le poumon du festival, c'est "Fête en Air" avec un public très familial. Pour le reste, c'est un public très éclectique qui est très à l'aise et qui se balade vraiment sur tous les sites et toute la programmation.

 

-  En 20 ans, avez-vous vu ce public changer ?

- Oui. Bien sûr. Nous avons remarqué une prise de conscience. Nous l'avons vu avec l'opération : "Halte aux sacs plastiques"  et le référendum sur l'arrêt du sac plastique dans la grande distribution, adopté par 99,8% des insulaires. Le fait de l'insularité nous donne une sensibilité forte à protéger notre bien, notre terre et à la laisser en bon état pour les générations futures. Le public a été sensibilisé, surtout les enfants.

 

- Le public n'est pas seulement composé d'insulaires. Quelle est la proportion de touristes ?

- Une équipe universitaire de la filière "Tourisme et Loisirs" a fait une enquête, l'an dernier. Elle a montré que le public se composait à 60% d'insulaires et à 40% de gens venant du continent, d'Italie et d'Europe, pour un total d'environ 40000 visiteurs.

 

- Au bout de 20 ans, peut-on encore innover ? Ne craignez-vous pas de vous répéter?

- Nous répéter, non ! Le festival garde son esprit et sa philosophie, mais sa programmation se renouvelle chaque année. Le contenu des ateliers, des animations et des exposants, les thématiques des conférences, des rencontres... changent et évoluent avec la société et les problématiques. Il y a des innovations au niveau des concerts et des spectacles de rue.

 

- Qu'y-a-t-il de nouveau cette année ?

- Cette année, on a un nouveau type de Tchatche, tous les matins à 11H au café des fleurs, en partenariat avec la Fondation de l'université de Corse. L'objectif est de mettre en avant les actions positives qui se passe sur l'île. C'est une tribune pour montrer qu'il y a des personnalités qui font bouger les choses. Nous recevons, par exemple, Valérie Mermet, adjointe au maire d'Aleria, qui a mis en place la première cantine Bio et a un projet de première crèche écolo. C'est une initiative qui nous plait et que le Festival du Vent doit porter et exposer. Il y a aussi Jean François Bernardini pour sa Fondation, Marc Muselli pour le projet Myrte... Le Festival du Vent permet à ces belles personnalités de parler de leur travail, de leur combat et de leur engagement.

 

- Est-ce la première fois que vous travaillez avec la fondation de l'université de Corse ?

- Oui. Nous nous sommes bien rapprochés depuis deux ans. Nous nous rencontrons régulièrement. Nous avons créé, ensemble, ce projet de Tchatche, cette année. Avec l'université, nous travaillons depuis plusieurs années, notamment avec des étudiants en arts plastiques.

 

- Qu'avez-vous prévu de spécial pour ce 20ème  anniversaire ?

- Il n'y a pas de cérémonie spéciale, mais plein de belles surprises qui ne sont pas, toutes, annoncées dans le programme. Par exemple, des installations sur la plage, un pique nique dimanche, un spectacle de pyrotechnie, des projections sur la citadelle... Il faut venir passer ces cinq jours avec nous pour découvrir cette 21ème édition.

                                                                                      Propos recueillis par Nicole MARI