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L'édito de Jacques Renucci : La citadelle des élites


Jacques RENUCCI le Mercredi 4 Octobre 2017 à 23:10

Lorsque l'Etat négocie avec les régions, et c'est le cas en Corse aujourd'hui, il leur fait comprendre qu'elles ne correpondent plus au modèle voulu par Emmanuel Macron



L'édito de Jacques Renucci : La citadelle des élites
Ce n'est pas une surprise. Les négociations sur le budget de la collectivité unie entre les représentants locaux et le ministre de l'Action et des Comptes publics Gérald Darmanin ne se déroulent pas selon un scénario sans histoire. Même sans être des spécialistes de la construction budgétaire, les Corses comprennent que plusieurs difficultés surgissent, et que des désaccords demandent à être aplanis pour que la réforme ait toutes ses chances. 


Mais le laboratoire corse n'est pas le seul à être impacté par la nouvelle donne nationale.
Si sur l'île les nationalistes ont concrétisé le succès de la troisième voie, rompant avec le système clanique, Macron a fait de même dans un autre contexte, avec des logiques de pouvoir, celles du modèle mondialisé, qui ont mis à mal la droite et la gauche traditionnelles.
L'élection du Président de la République a actualisé un phénomène qui est apparu en pleine lumière à l'occasion de la conférence des territoires, où les régions ont eu l'impression d'être flouées par le pouvoir central, en dépit des promesses de celui-ci. On n'est pas loin du divorce, et la défiance s'est installée autour des délégations de compétences sans les moyens correspondants. Cette « France périphérique » (selon l'expression de Christophe Guilluy dans son ouvrage La France d'en haut) est dispersée, désorganisée, face à la France dont l’Etat veut assurer le succès.


Quand Darmanin négocie, il ne pense pas à ses vacances de rêve au golfe de Lava, il suit la ligne gouvernementale. Les régions ont le droit et le devoir de s'exprimer, mais à condition qu'elles répètent ce qu'on leur a dit de dire. Et cette posture dépasse le cadre de l'échange budgétaire, pourtant essentiellement concret. Le ministre, élu local oublieux par devoir de ses racines, vient d'un monde différent, celui où les problèmes du bas sont perçus selon un prisme particulier, celui qui a cours dans ce que Guilluy, encore lui, nomme « la citadellisation des classes supérieures. » Macron n'est pas le président des riches, comme on l'affirme parfois, mais celui de ces élites, celui des métropoles plus que celui de la France d'en bas, ou plus précisément de la France d'à côté, conduites par ce que le Président nomme « les forces du passé . »
Bien sûr, les élites ne sont pas toutes aspirées par les métropoles, il y en a partout disséminées à travers le pays, mais elles n'ont pas l'impact de la concentration majeure. On n'est pas le même Français à Paris, à Bordeaux qu'en Ardèche ou... à Ajaccio. La Corse subit la fracture rurale, le pays vit sous le signe de la fracture territoriale. Les bastions mondialisés au mari de Brigitte... et 19 000 petites communes qui ont voté Le Pen en tête au premier tour.