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Conseil municipal de Bastia : Polémique sur « l’héritage de Tonton Cristobal » !


Nicole Mari le Mardi 26 Juillet 2016 à 22:52

Séance plutôt atone, mardi soir, pour la Der estivale du Conseil municipal de Bastia en l’absence de dossiers majeurs. A l’exception de deux coups de chaud entre le maire, Pierre Savelli, et l’élu communiste, Francis Riolacci : le premier concernant la facture de la rénovation du mur de soutènement de l’Île de Beauté, engagée par l’ancienne municipalité, le second bref et plus virtuel sur la présence ou pas de logements sociaux dans le futur projet de la Poste. En marge de l’ordre du jour, le Collectif des victimes du 5 mai 1992 a offert à la Ville les deux maillots commémoratifs que portaient les joueurs du Sporting et du CAB lors du match le plus proche du 5 mai.



Le maire de Bastia, Pierre Savelli, entouré de ses deux premiers adjoints : Emmanuelle De Gentili et Jean-Louis Milani.
Le maire de Bastia, Pierre Savelli, entouré de ses deux premiers adjoints : Emmanuelle De Gentili et Jean-Louis Milani.
C’est par une minute de silence pour les victimes de tous les attentats terroristes dans le monde que la séance du Conseil municipal de Bastia a débuté, suivie d’une courte allocution du maire Pierre Savelli, sur Bastia, porte d’entrée du futur parc naturel marin du Cap Corse, et une remise de maillots commémoratifs par le Collectif du 5 mai (cf vidéo). L’ordre du jour se dévidait dans une monotonie ronronnante quand la polémique a surgi brutalement sur un rapport concernant une décision modificative du budget principal adopté en juin. Deux modifications ont, notamment, été apportées, concernant deux contentieux dont les conclusions impactent le budget de la ville. Le premier est lié à la réfection par la ville du mur de soutènement de l'ancien hôtel Ile de Beauté dans la rue Gabriel Péri, qui s'était effondré suite à des intempéries. L'ancienne municipalité avait fait réaliser les travaux par l'entreprise Vendasi pour un montant d’environ 52 000 euros. Elle règle la facture, le 17 juin 2010, en émettant deux titres de recettes et en réclame le remboursement au propriétaire, la SCI Ile de Beauté 2. Cette dernière refusant de le faire, l’affaire est portée devant le Tribunal administratif qui déboute la ville et annule les titres de recettes le 30 avril 2014. La nouvelle municipalité est réduite à prendre acte.
 
Une question morale
L'élu communiste d’opposition, Francis Riolacci, monte au créneau en s'étonnant que la ville n'émette pas un nouveau titre. Le maire, Pierre Savelli, répond que cela ne servirait à rien, étant donné les motifs d’annulation invoqués par le tribunal. Francis Riolacci insiste, estimant que : « C'est une question morale ! ». Réponse identique du 1er édile qui lit l’arrêté du jugement et assène : « Cette annulation a été motivée notamment par le défaut de production de pièces justificatives par la ville et le comptable public dans les délais et voies légales conformes. Ce manque de rigueur manifeste dans la gestion de ce dossier entrave, désormais, la poursuite de la procédure et prive, donc, définitivement la ville de cette recette ». En clair, l’ancienne municipalité n’a pas fourni, à la SCI Ile de Beauté 2, les factures. De plus, le Tribunal fait valoir que la SCI Ile de Beauté 2 n’a pas retiré un avantage personnel de ces travaux…
 
Un héritage pas drôle !
Mais, comme Francis Riolacci n’en démord pas, la querelle s’envenime.
Pierre Savelli ironise : « C'est l'héritage de Tonton Cristobal ! Vous ne voulez parler que de ce qui vous arrange ! Moi, je vais parler de tout. Des 50 000 € de l’île de Beauté, c’est une grosse somme… mais, encore moins drôles les 1,5 millions € de l’hyper U que nous devons payer ! ». Il s’agit, en fait, du 2ème contentieux portant sur les travaux hydrauliques du pont d’Agliani, suite aux dégâts causés à l’Hyper U par les inondations de novembre 2008. En mars 2009, l’assureur Generali Iard engage une procédure contre la ville de Bastia, propriétaire de la zone. Il demande une expertise qui établit que la cause du sinistre était l’obstruction du pont de l’Agliani par le manque d’entretien de la rivière Montesoru à cet endroit. Lors des pluies torrentielles, le mauvais état des infrastructures hydrauliques a causé l’inondation. Le 16 juin 2016, la Ville est reconnue responsable du préjudice causé à l’Hyper U et condamnée à lui régler la somme de 1,5 million €.
 
La Ville condamnée
Et Pierre Savelli d’enfoncer le clou, un rien goguenard : « L’ancienne municipalité n’a pas usé de tous les arguments et les faits sur ce dossier afin d’exonérer ou d’amoindrir la responsabilité de la Ville. Premièrement, si elle avait, comme cela aurait dû être le cas, apporté la preuve que la Collectivité territoriale de Corse (CTC) était propriétaire de la zone concernée, la Ville aurait été mise hors de cause. Mais, il n’y a aucun document qui atteste la cession du terrain à la CTC. Deuxièmement, elle n’a pas mis en demeure, comme elle l’aurait dû le faire, les riverains qui n’avaient pas effectué le nettoyage de leur parcelle de propriété et dont les déchets naturels ont participé à l’obstruction du pont. Troisièmement, elle ne s’est pas suffisamment souciée du suivi de l’expertise initiale et n’a pas demandé de contre-expertise.
Pour ces raisons, la ville de Bastia est donc astreinte, aujourd’hui, à payer la somme de 1,5 million €. Cette énorme charge budgétaire est le résultat d’un manque de rigueur dans le suivi d’un dossier juridique aussi important. Néanmoins, la municipalité fera appel de ce jugement pour exploiter toutes les voies de recours légales dans le but de minimiser la somme de règlement de cette affaire ».
 
Des sommes dues
Francis Riolacci n’apprécie pas, tente de couper la démonstration, puis s’écrie : « Vous comparez ce qui n'est pas comparable et vous tombez dans la polémique. C’est une question morale ! C'est un problème politique ! ».
Riposte du maire : « Non ! C'est une question administrative. Toute initiative privée vous gêne ! Si vous aviez fait votre travail normalement, nous n'en serions pas là ! »
Francis Riolacci : « L'héritage est excellent ! »
Pierre Savelli : « La preuve ! Les faits sont têtus ! Les sommes dues restent dues ! ».
Le maire refusant le Chjami e rispondi veut stopper le débat. Il finit par concéder la parole à l’adjoint chargé du projet de l’île de Beauté, Michel Castellani, qui exprime sa stupéfaction : « L'opposition dit n'importe quoi ! Un défaut de procédure de l'ancienne municipalité fait que la ville de Bastia a été déboutée dans l’affaire du mur. Il est curieux qu'on vienne polémiquer sur des procédures qui ont été ratées. La nouvelle majorité a conduit cette affaire avec le souci permanent de l'intérêt de la ville et rien d'autre ! Il y aura, désormais, 174 places de parking et des commerces à la place d’un mur. On ne comprend pas la polémique ! ».
Le rapport est, finalement, adopté. Les Communistes votent contre, les deux autres groupes de l’opposition (PRG et MCD) s’abstiennent.
 
Logements sociaux à la Poste ?
La polémique rejaillit sur le dossier concernant l’approbation d’une convention de portage pour l’acquisition des locaux de la poste par l’Office foncier. Francis Riolacci s’interroge sur la destination de la surface disponible ainsi acquise et demande qu’elle soit, en totalité, dévolue à la construction de logements sociaux. Le maire, quelque peu interloqué, fait remarquer que Bastia dispose déjà de la quasi-totalité des logements sociaux de l’agglomération et des deux tiers de ceux du département. Sans préjuger du futur projet, ni dévoiler les intentions de la majorité, il révèle que l’enjeu, dans une ville pauvre comme Bastia, est, d’abord, économique. Francis Riolacci argumente sur les besoins qui s’élèveraient à 1400 logements. Chiffre immédiatement contesté par Pierre Savelli qui tacle les procédés d’attribution des dits logements sous l’ancienne mandature et annonce qu’il faut, avant toute chose, assainir les pratiques et imposer des critères objectifs et impartiaux. Ce nouveau Chjami e rispondi virant, lui aussi, au dialogue de sourds, le maire clôt la discussion en promettant à l’opposition qu’elle aura toute latitude pour participer à « un projet, certainement le plus important pour l’avenir de Bastia et qui s’étendra sur deux mandatures ».
Affaires à suivre…
 
N.M.
 

Le maire, le Conseil municipal et les porte-parole du Collectif du 5 mai 1992.
Le maire, le Conseil municipal et les porte-parole du Collectif du 5 mai 1992.
Remise des maillots par le Collectif des victimes du 5 mai 1992